Donné à Sainct-Maur des Fossez ou moys de septembre, l'an de grace mil cinq
cens soixante huict et de nostre regne le huictiesme.
Ainsi signé : CHARLES, et sur le reply : Par le roy, la royne sa mere,
messeigneurs les ducz d'Anjou et d'Alençon, freres dud. seigneur, messieurs les
cardinaulx de Bourbon, de Lorraine et de Guyse, ducz de Nemours, de Longueville
et d'Aumalle, mareschaulx de Dampville et de Cossé, duc d'Uzès, les srs de Morvillier, archevesque de Sens, evesques
d'Auxerre et de Limoges, tous respectivement conseillers au Conseil privé dud.
seigneur, les srs de Lansac et de Carnavallet presens.
DE L’AUBESPINE. Visa. Et seelé en cyre verd sur lacs de soye rouge et verd.hBOmis
Leues, publiées et enregistrées, oÿ et ce requerant et consentant le procureur
general du roy. A Paris en Parlement, le vingt huictiesme jour de septembre,
l'an mil cinq cens soixante huict. Ainsi signé : DUTILLET.
Ordonnons, voulons et nous plaist que nostre tres cher et tres amé beau-frere
le roy de Navarre, nostre tres cher et tres amé cousin le prince de Condé,
nostre tres cher et amé cousin le sieur de Damville mareschal de France, et
semblablement tous autres seigneurs, chevaliers, gentilzhommes et autres, de
quelque qualité ou condition qu’ilz soient, tant catoliques uniz que de lad.
Religion, rentreront et seront conservez en la jouissance de leurs
gouvernemens, charges, estatz et offices royaulx dont ilz jouissoient
auparavant le vingt quatreiesme aoust cinq cens soixante douze, sans estre
astraintz de prendre nouvelles provisions, et nonobstant tous arrestz et
jugemens contre eulx donnez et les provisions qui auroient esté obtenues desd.
estatz par autres. Pareillement rentreront en la jouissance de tous et chacuns
leurs biens, droictz, noms, raisons et actions, nonobstant les jugemens
ensuiviz pour raison desd. troubles. Lesquelz arrestz, jugemens, provisions et
tout ce qui s’en seroit ensuivy nous avons pour cest effect declarez et
declarons nulz et de nul effect et valleur.
Declarons que nous reputons et tenons nostre tres cher et tres amé frere le duc
d’Alençon pour nostre bon frere, nostre tres cher et tres amé beau-frere le roy
de Navarre pour nostre beau-frere et bon parent, et nostre tres cher et bien
amé cousin le prince de Condé pour nostre parent, fidele subject et serviteur,
comme aussi nous tenons et reputons nostre tres cher et amé cousin le sieur de
Damville, mareschal de France, et tous autres seigneurs, chevaliers,
gentilzhommes, officiers, habitans de villes, communaultez, bourgs, bourgades
et autres lieux de nosd. royaume et païs de nostre obeïssance qui les ont
suivis et secouruz, presté ayde et faveur, en quelque sorte et façon que ce
soit, pour noz bons et loiaux subjectz et serviteurs. Et aprés avoir entendu la
declaration faicte par nostred. frere le duc d’Alençon9, nous nous tenons bien et
suffisamment satisfaictz et informez de sa bonne intention, et n’avoir esté par
luy ny par ceux qui y sont intervenus, ou qui s’en sont en quelque sorte que ce
soit meslez, tant vivans que morts, rien faict que pour nostre service.
Declarons tous arrestz, informations et procedures sur ce faictz et donnez nulz
et de nul effect, comme chose non faicte ny advenue, voulans qu’ilz soient
rayez, biffez et mis hors des registres des greffes tant de noz courts de
parlemens que des autres jurisdictions où ilz ont esté enregistrez.
9 Le duc
d’Alençon, frère de Henri III, avait fait le 18 septembre 1575, trois jours
après s’être enfui de la cour, une Déclaration dans laquelle
il soutenait les prises d’armes des Malcontents pour préserver la noblesse
ancienne, chasser les mauvais conseillers de roi qui la menaçaient et
rétablir ainsi la concorde civile. La déclaration de Monseigneur
François, fils et frère de roy, duc d’Alençon, contenant les raisons de
sa sortie de court fut aussitôt publiée. Une réédition parue au
début de 1576 fut enrichie d’un commentaire attribué au juriste huguenot
Innocent Gentillet, Briève remontrance à la noblesse de France sur le
faict de la déclaration de monseigneur le duc d’Alençon. Cette
déclaration s’inscrit dans la longue série des manifestes qui prétendent
justifier les révoltes et soulèvements armés par le souci et le devoir de
défendre le bien public menacé.
VII, 53
Demeureront tant nostred. frere le duc d’Alençon, le roy de Navarre et prince
de Condé, que lesd. sieur de Damville et autres seigneurs, chevaliers,
gentilzhommes, officiers, corps de villes, communaultez et tous autres qui les
ont aydez et secouruz, leurs hoirs et successeurs, quictes et deschargez de
tous deniers qui ont esté par eux ou leurs ordonnances prins et levez, tant de
noz receptes et finances, à quelque somme qu’ilz se puissent monter, que des
villes, communaultez et particuliers, des rentes, revenuz, argenteries, ventes
de biens meubles ecclesiastiques et autres bois de haulte fustaie à nous
appartenans ou à autres, amendes, butins, rançons ou autres natures de deniers,
à l’occasion des presens et precedens troubles, sans que eulx ny ceux qui ont
esté commis par eux à la levée desd. deniers, ou qui les ont baillez et fourniz
par leursd. ordonnances, en puissent estre aucunement recerchez à present ny
pour l’advenir. Et demoureront, tant eulx que leurs commis, quictes de tout le
maniement et administration desd. deniers en rapportant pour toute descharge
acquictz expediez dans quatre mois aprés la publication de nostre present
eedict faicte en nostre court de parlement de Paris, et ce de nostred. frere,
du roy de Navarre, prince de Condé et mareschal Damvillenmareschal d'Amville E ou de ceux qui auront esté par
eux commis à l’audition et closture de leurs comptes, ou des autres chefz et
communaultez des villes qui ont eu commandement et charges durant lesd.
troubles. Demeureront pareillement les habitans de la ville de La Rochelle et
autres communaultez deschargées de toutes assemblées generales et
particulieres, establissement de justice, police et reiglemens faictz entre
eulx, jugemens et executions d’iceulx, soit en matiere civile ou criminelle,
ensemble de tous actes d’hostilité, levée et conduicte de gens de guerre,
fabrication de monnoye faicte selon l’ordonnance desd. chefz, fonte et prinse
d’artillerie et munitions tant en noz magazins que des particuliers, confection
de pouldres et salepestres, prinses, fortifications, desmantellemens et
demolitions de villes, chasteaux, bourgs et bourgades, entreprinses sur
icelles, bruslemens et demolitions de temples et maisons, voiages,
intelligences, negotiations, traictez et contractz faicts avec tous princes et
communaultez estrangiers, introduction desd. estrangiers es villes et autres
endroictz de nostred. royaume, et generallement de tout ce qui a esté faict,
geré et negotié tant par les catholiques associez que de ceulx de lad. Religion
durant les troubles presens ou passez depuis la mort de feu nostred. seigneur
et pere, encores qu’il deust estre particulierement exprimé et speciffié.
Entendans que suivant nostre presente declaration les sieurs vidame de Chartres
et de Beauvoir soient et demeurent deschargez, et les deschargeons
speciallement, des traictez et negotiations par eulx faictes avec la royne
d’Angleterre en l’an mil cinq cens soixante deux10, ne tenans ny reputans avoir esté en cest endroict rien faict par
eulx que pour nostre service, encores que es precedens eedictz de pacification
n’en ait esté faicte expresse mention. Et moiennant ce que dessus, lesd.
catholiques uniz et ceulx de lad. Religion se departiront et desisteront de
toutes associations qu’ilz ont dedans et dehors ce royaume et ne feront
doresenavant aucunes levées de deniers sans nostre permission, enroollement
d’hommes, congregations ny assemblées autres que celles qu’il leur est permis
cy dessus, et sans armes, ce que nous leur prohibons et defendons sur peine
d’estre puniz rigoreusement comme contempteurs et infracteurs de noz
ordonnances.
10 Jean de
Ferrières, seigneur de Maligny, vidame de Chartres, et son beau-frère Jean
de La Fin, seigneur de Beauvoir, furent accrédités par le prince de Condé
pour obtenir l’aide militaire et financière de la reine Élisabeth
d’Angleterre lors de la première guerre de religion. Les négociations des
réformés français aboutirent le 20 septembre 1562 au traité de Hampton Court
qui prévoyait que l’Angleterre leur fournirait 6000 hommes et la somme de
100 000 couronnes contre le port du Havre que Condé devrait livrer à
l’Angleterre qui pourrait le tenir comme gage d’un futur échange avec
Calais. Le Havre fut repris par l’armée royale le 28 juillet 1563 et le
traité de Hampton Court annulé par celui de Troyes signé le 11 avril
1564.