ENGELMANN Godefroy

Nom: 
ENGELMANN
Prénom: 
Godefroy
Date de début d'activité: 
21/12/1834
Date de fin d'activité: 
02/08/1839
Adresses professionnelles: 

30, rue de la Justice (1821)

18, rue Cassette (1816)
27, rue Louis-le-Grand (1818)

Engelmann, Graf, Coindet et cie
92, Dean street Soho (1829)

Ville - Département: 
Mulhouse (Haut-Rhin)
Adresse personnelle: 

6, rue du faubourg Montmartre (1828)

Successeurs: 
Informations personnelles: 

Il est né à Mulhouse le 17 août 1788. Il a appris le dessin à Paris et fréquenté l'atelier de Regnault,  avant d'entrer comme dessinateur dans une fabrique d'indiennes. Il a épousé  en 1809 Anne-Catherine Thierry, la fille de son patron.
Il meurt le 25 avril 1839.
 

Informations professionnelles: 

Après quelques essais inspirés, dès 1813,  par la découverte de lithographies rapportées d'Allemagne par un de ses amis, et un voyage à Munich pour acquérir presse et pierres, il installe une petite presse au Musée des Beaux-arts de Mulhouse et, le 8 mars 1815, il fonde, avec le concours du maire de Mulhouse, du préfet du Haut-Rhin et de Jean Zuber, fils du fabricant de papiers peints, la Société lithotypique du Haut-Rhin "pour la gravure en tout genre, d'après les procédés déjà connus et usités en Allemagne, particulièrement à Munich sous le nom de lithographie". Le traité prévoit la possibilité d'implantations hors de l'Alsace et  le peintre Antoine Pierre Mongin qui, à l'occasion de sa collaboration avec le fabricant de papiers peints Zuber, découvre la lithographie chez Engelmann, en offre l'opportunité : "Camarade d'études, et je dirai plus, ami de presque tous les artistes  les plus estimés du public, je pourrai facilement  vous les faire connaître et les engager à employer leurs talents pour nous", promet-il. En juin 1816, Engelmann vient à Paris avec son beau-frère Pierre Thierry et  crée une imprimerie au 18, rue Cassette à Paris  ; pour être en conformité avec l'ordonnance du 8 octobre 1817, il lui est accordé un brevet pour Paris le 15 octobre 1817. Comme il ne peut avoir qu'un seul brevet, il jouit, pour Mulhouse, d'une "tolérance provisoire", accordée le 4 décembre 1817. La Société lithographique de Mulhouse, société anonyme autorisée par ordonnance royale du 12 novembre 1817, finance ces établissements par la création de 70 actions de 1 000 F, réparties entre Engelmann, son beau-frère Thierry, Jérémie Graf, un négociant de Mulhouse, et quelques associés comme le général Guilleminot. Il exploite ces deux imprimeries en collaboration avec Thierry. En 1823, l'administration s'émeut de cette contravention à la loi, mais le préfet du Haut-Rhin "fait valoir des raisons d'utilité publique pour la conservation provisoire" de l'imprimerie de Mulhouse et prévient les associés de la menace  qui pèse sur eux. Cependant, à l'occasion de l'impression d'une chanson Les deux tombeaux, "qui, sans avoir rien de légalement répréhensible, porte l'empreinte d'une opposition manifeste au Gouvernement",  le Préfet suggère de saisir ce prétexte pour décider la fermeture de l'imprimerie mulhousienne ; le ministre de l'Intérieur temporise comme il le fera encore en 1827 après l'impression, sans déclaration ni dépôt,  d'une plaquette de vers adressée à Benjamin Constant. Engelmann qui peut se prévaloir déjà de ses illustrations pour les Voyages romantiques et  pittoresques dans l'ancienne France, la Galerie des oiseaux, les Lettres sur la Suisse, et beaucoup d'autres travaux ayant reçu l'aval de l'administration, obtient en 1828 qu'un brevet  pour Mulhouse soit décerné à Pierre Thierry, ce qui régularise la situation de l'atelier alsacien. En septembre 1833, Pierre Thierry et Godefroy Engelmann demandent conjointement à échanger leurs brevets, le premier se fixant définitivement à Paris ; ils restent néanmoins associés par une série d'actes les liant ainsi que Jean Thierry, le frère cadet. .
En 1825, la constitution de la société Engelmann et cie a fait entrer Jean Thierry, son beau-père, au capital de l'imprimerie et, en 1826, est créée la société Engelmann, Graf, Coindet et cie pour l'exploitation d'une annexe à Londres. Revenu à Mulhouse après 1833, Godefroy Engelmann s'associe avec son fils Jean dans la société Engelmann père et fils.En 1830, l'imprimerie bénéficie de 30 000 F de prêt de l'Etat au titre du soutien à l'économie du Livre ; à la mort de Godefroy Engelmann, la société n'en aura remboursé qu'une moitié environ.
Il est très actif pour assurer la promotion et le perfectionnement de la lithographie. En octobre 1815, il envoie des épreuves d'impression lithographique à la Société d'encouragement pour l'industrie nationale dont Lasteyrie rend compte le 20 décembre. Lors de la séance du 3 août 1816 de l'Académie des Beaux-arts, il présente avec Antoine Pierre Mongin "une suite de gravures  lithographiques et [ils ] lui exposent les divers procédés de perfectionnement qu'ils ont apportés dans cet art et les nouvelles applications qu'ils ont eu le secret d'en faire à plus d'un emploi  aussi utile que curieux." Ces perfectionnement permettent d'augmenter "l'uniformité des épreuves et leur netteté" et surtout donnent la possibilité aux artistes de retoucher leur dessin. Cette présentation fait l'objet d'un rapport remis le 2 novembre suivant qui recommande au ministre de l'Intérieur d'encourager les recherches d'Engelmann.  Il fait enregistrer le 12 octobre 1819 un brevet d'invention pour reproduire par la lithographie les dégradés de gris sans recours aux hachures ou pointillés, mais par  effet de lavis. Le 31 août 1837, associé avec son fils Jean, il obtient un autre  brevet d'invention de dix ans pour "un nouveau procédé d'impression lithographique en couleurs" qu'ils nomment "impression lithocolore" et rapidement "chromolithographie". Quelques ajouts mineurs font l'objet d'un nouvel enregistrement le 27 mars 1838, garantissant ainsi pour dix ans leur invention. Il avait déjà publié, en 1837, un Album chromolithographique ou recueil  d'essais du nouveau procédé d'impression en couleurs, inventé par MM. Engelmann père et fils  de 7 chromolithographies.
Ses recherches pour améliorer les presses lithographiques sont remarquées par le jury de la Société d'encouragement de l'industrie française qui le récompense, en 1830, pour une presse métallique moins encombrante et surtout munie d'une racle métallique, mais souple, efficace ; l'ensemble de la machine semble encore perfectible mais les "efforts continus" d'Engelmann et "les services qu'il a rendus à la lithographie" lui valent une médaille d'or de seconde classe.
En 1820, il imprime un Porte-feuille géographique et ethnographique rassemblant diverses cartes géographiques, paysages, costumes, dessins scientifiques avec un texte comparant les divers pays du monde. L'imprimerie parisienne que Mongin fait profiter de ses relations avec le milieu artistique, travaille avec Girodet (À la France, 1820) et ses élèves (Collection de têtes d'étude d'après le tableau peint en 1801 par M. Girodet-Trioson, d'Aubry-Lecomte, 1821) ou Jean-Baptiste Isabey ( Divers essais lithographiques, 10 planches avec texte de présentation, 1818). Certains de ces artistes sont mobilisés pour la grande entreprise des Voyages romantiques et pittoresques dans l'ancienne France dont le premier volume consacré à la Normandie paraît en 1822. Engelmann est, sous la Restauration et la monarchie de Juillet, l'un des grands imprimeurs de prestigieuses entreprises comme les Souvenirs pittoresques du général Bacler d'Albe, Lettres sur la Suisse, l'Anatomie de l'homme, les Cathédrales françaises, le Voyage pittoresque dans le Brésil, le Voyage pittoresque et militaire en Espagne... Toutefois, il produit des lithographies très diverses : quelques illustrations médiocres pour le Gymnase lyrique (1831) recueil de chansons vendues par livraisons, mais aussi de volumineuses galeries de portraits (militaires français "qui se sont distingués par leur courage", artistes de l'Opéra, Alsaciens ). Il fait aussi des travaux de ville.
La succursale londonienne, à la fois dépôt des lithographies imprimées en France et imprimerie locale, ne réussit pas comme escompté et doit être liquidée au début des années 1830. En revanche, dès 1824, Engelmann et ses associés abordent le marché européen, en commençant par la Russie, puis les états germaniques qu'ils visitent eux-mêmes ou par le biais de représentants, et sont présents à partir de 1827 à la foire de Leipzig. Leur réseau atteint bientôt la Belgique, la Hollande, la Suisse, l'Italie, voire Riga, New York et le Mexique.
Il a reçu dès 1816 une médaille d'argent de la Société d'encouragement, une médaille d'or au Salon de 1819, une médaille d'argent  à l'Exposition des produits de l'Industrie de 1823, rappelée en 1827...

Bibliographie Sources: 

Archives Nationales F18 2050

INPI, 1 BA 1835 Procédé de lavis lithographique, 1819.   http://bases-brevets19e.inpi.fr/
INPI, 1BA 5768 Procédé d'impression lithographique d'objets d'art en couleur nommé par les auteurs "impression lithocolore", 1837.   http://bases-brevets19e.inpi.fr/
Procès-verbaux de l'Académie des Beaux-arts, J.-M. Leniaud dir., Paris, École des chartes, 2001-->
Bulletin de la Société d'encouragement de l'industrie française, 1830, p. 453-457.

Traité théorique et pratique de lithographie, par G. Engelmann [édité par A. Penot], Engelmann père et fils (Mulhouse), 1839.
Manuel du dessinateur lithographe, ou Description des meilleurs moyens à employer pour faire des dessins sur pierre dans tous les genres connus,... par G. Engelmann, 1824.
Porte-Feuille Géographique et Ethnographique contenant des planches pour la Géographie mathématique : des dessins représentant les principales curiosités de la nature,... accompagnés, Chez G. [...] (A Mulhouse et à Paris), 1820.

Twyman (Michael), A History of lithography. Printed colour for all, London: The British Library, 2013.
Lang (Léon), "La société lythotypique du Haut-Rhin", Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, 1972, p. 39-42
Lerch (Dominique), "Pour une histoire de la lithographie en France : Engelmann, un passage obligé", Le Vieux Papier,  2017.
Lerch (Dominique), "L'empire commercial du lithographeEngelmann et sa stratégie d'expansion internationale dans la première moitié du XIXe siècle", Revue d'Alsace, 2021, p. 133-140.
Lerch (Dominique), "L'éditeur lithographique Engelmann à Paris", Histoire et civilisation du livre, vol. 18, 2022, p. 267-288.
Le Men (Ségolène), "Engelmann et l'Alsace pittoresque et romantique. Art, nature, industrie", dans L'Alsace pittoresque. L'invention du paysage, C. Peltre et V. vander Brüggen dir., Colmar, Unterlinden / Paris, Hazan, 2011.

Remarques: 
Le brevet de Godefroy Engelmann pour Paris se trouve dans le dossier de Pierre Thierry.