Traduction anonyme en prose (milieu du XVe siècle)
Bibliographie:
M. Debae, La bibliothèque de Marguerite d’Autriche, essai de
reconstitution d’après l’inventaire de 1523-1524, Louvain-Paris, 1995,
p. 168-169
absent de P. Chavy, Traducteurs d’autrefois : Moyen Age et Renaissance,
dictionnaire des traducteurs et de la littérature traduite en ancien et moyen
français 842-1600, Paris-Genève, 1988
Transcription des deux premiers chapitresd'après le msBruxellesBibl. royale de Belgique11104-05Nous creons par escript que les sages hommes d’Egypte furent nez des
lignages aux dieux, car par leur subtil engin ilz mesurerent la grandeur de
la terre par le cours des estoilles ou ilz prenoient [f. 1v] leur
science especialment par astronomie et par nygromancie, par lesquellez ilz
sçavoient et faisoient toutes choses qu’ilz vouloient.Mais sur tous fut Neptanabus le plus sage et le plus vray de ce qu’il disoit
de sa bouche que nul des autres, car tout ce que autres roys de environ lui
soloient faire par force d’armes il faisoit par art et par science. Si grant
poissance avoit en science qu’il avoit grant commandement sur les
elemens.Avint une foiz que une grant guerre lui survint, car il estoit roy d’Egypte
trespoissant si lui courut sus grant pueple de toutes pars pour le chasser
hors de sa terre, laquelle il avoit longuement maintenue et gardee en grande
paix. Ceulx qui venoient sur lui estoient moult grant puissance et de moult
de royames, c'est assavoir Indiens, Arabiens, Feniciens, Parthiens,
Assiriens, Sectains, Alains, Suriens, Ebreux, Agrophagitez et toutes les
contrees d’Orient.[f. 2] Quant le roy Neptanabus oÿ ces nouvelles, il s’en esjoÿ moult
grandement et en jetta un ris puis appareilla tantost ses enchantemens qu’il
savoit et prist ung bachin plain d’eaue et fist dedens une nacelle de cuir
et puis fist dedens deux ymages de cire par une petite verge qu’il tenoit en
sa main, puis fist ses conjuremens qu’il savoit et appella les dieux du ciel
et d’infer en son ayde, et tantost par leurs respons s’apperçut et congneut
qu’il seroit vaincus et destruis s’il attendoit ses ennemis.Ces choses considerees, le roy Neptanabus mist tantost tous ses precieux
joyaus et autres richesses en une nef en laquelle il entra et esploita tant
par mer qu’il arriva en Macedone. Et quant il fut en la maistresse cité, il
se vesti de linge et dist aux gens qu’il estoit astronomien, promectant dire
verité de toutes choses que on lui demanderoit.Comment la royne Olympias manda Neptanabus et de ses respons.[f. 2v] Or avint que Neptanabus fut moult congneu parmi la cité de
Macedone et tant que la renommee de lui vint a Olympias la royne du paÿs,
laquelle le manda tantost qu’il incontinent venist parler a elle.A ce temps estoit le roy Phelippe de Macedone son mari hors du paÿs en
guerre contre aucuns ses ennemis.Quant Neptanabus fut venu devant la royne, elle lui demanda qu’il lui desist
comment il avendroit de son seigneur qui en la guerre estoit, mais il ne le
daigna oncquez saluer ne appeller dame, car bien lui ramembroit qu’il avoit
esté roy d’un si riche royaume comme estoit Egypte, mais moult s’esmerveilla
de la grande beauté d’elle car en le regardant fut espris de son amour
tellement qu’il ne se savoit contenir.La royne lui demanda : « Es tu Neptanabus qui tant scez d’astronomie ? » Et
il respondy : « La nostre science est de pluiseurs manieres, mais on ne puet
mie en un temps se ramembrer de tout [f. 3] ne a un respons dire
tout. » Comme il eut ce dit, il esgarda tousjours moult ententivement la
royne ou visage.Et la royne lui demanda : « Dy moy, prophete, je te prie pourquoy tu me
regardez si corageusement et ton oeil de ma face tu ne pues
re[m]ouvoir ? »Incipitd'après le msBruxellesBibl. royale de Belgique11104-05
Inc. f. 1Nous creons par escript que les sages hommes
d’Egypte furent nez des lignages aux dieux car par leur subtil engin ilz
mesurerent la grandeur de la terre par le cours des estoilles ou ilz
prenoient... Expl. f. 65vNulle cité n’assiega qu’il ne conquist nulles
gens par bataille ne requist qu’il ne vainquist et subjugast mais en la
parfin que nul homme ne puet par force vaincre par vin et par venin fut
vaincus surmontez et estains en la fleur de sa jonesse et en la fleur de
sa plusgrande fortune cellui qui tout le monde avoit surmonté et vaincu
Orez vous ay dit de sa mort si vous diray cy aprés comment il envoia par
escript a son maistre Aristote une partie des aventures qu’il eut en Ynde
et des merveillez qu’il y vit | S’ensieut la seconde partie de ce
livre qui est des merveillez d’Ynde.
Manuscrit
Bruxelles, Bibl. royale de Belgique, 11104-05
; ,
.traduction française anonyme de l’Epitome de Julius Valerius : table des chapitres f. 1-9,
f. 9v blanc, texte f. 10-65v ; traduction française anonyme de
l’Epistola Alexandri ad Aristotelem f. 66-90v [titre :
Cy commence la table de la seconde partie de ce
livre qui est des merveillez que eut Alexandre en Ynde f.
6v].90 f. parch.
Structure et décor
Illustration : 2 miniatures des 3/4 de la justification en tête de
chacun des deux textes réalisées par des successeurs de Guillaume Vrelant (f. 10 et 66)
Histoire du manuscrit
possesseurs : Philippe de Croÿ, comte de Chimay (armoiries f. 10)
(† 1482) ; Charles de Croÿ († 1527) (ex libris f.
90v : « C’est le livre du roy Alixandre ou yl y a deux histoires,
lequel est a monseigneur Charles de Croÿ, comte de Chimay
[signé] Charles » ) ; Marguerite d’Autriche (acquis en
1511) ; Marie de Hongrie (passe en 1530 ; ex
libris à l’intérieur du plat antérieur de la relieur) ; bibliothèque de Bourgogne
(1559)
Bibliographie:
M. Debae, La bibliothèque de Marguerite d’Autriche, essai de
reconstitution d’après l’inventaire de 1523-1524,
Louvain-Paris, 1995, p. 168-169, n° 104, pl. 43
—
M. Smeyers, L’art de la miniature flamande du VIIIe au XVIe
siècle, trad. M. Verboomen, Tournai, 1998, p. 328 et
333
.
Au IIIe siècle à Alexandrie, le roman d’Alexandre a trouvé sa forme canonique. Sa
première traduction latine, dédiée à l’empereur Constance II (337-361), fut réalisée
au milieu du IVe siècle par Julius Valerius Alexander
Polemius. L’intérêt suscité par la traduction fut mince durant
l’Antiquité tardive, qui donna cependant naissance à un épitomé (où a disparu le nom
du traducteur). Cet épitomé devait accompagner dans les manuscrits l’Epistola
Alexandri ad Aristotelem et devenir la base d’une réception quasiment
illimitée.
Bibliographie:
R. Herzog (éd.), Nouvelle histoire de la littérature latine, t.
V : Restauration et renouveau, la littérature latine de 284 à 374 après
J.-C., Turnhout, 1993, p. 244-247
Julii Valerii Res gestae Alexandri Macedonis translatae ex Aesopo
Graeco, éd. M. Rossellini, Stuttgart, 1993