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CORROYER Édouard, Jules

n. Amiens, 1835, d. Paris, 1904.

Élève de Viollet-le-Duc ; il commença sa carrière en 1862 en construisant l'hôtel de ville de Roanne (salon de 1865) et presque en même temps l'église de Vougy dans la Loire, puis le château de Fleyriat dans l'Ain (1868-1869). Par la suite, il a également construit les églises de Villers et de Saint-Cyr-les-Vignes (Loire) et surtout le Comptoir d'escompte (1878-1882) à Paris.Il présenta divers autres projets au salon où il obtint une médaille d'or en 1873 et 1878.

Parallèlement, Corroyer menait des études sur l'architecture médiévale et fut chargé d'étudier les églises de Lamballe, Saint-Pol-de-Léon et Dol ; il effectua des missions à Dinan (1872), Pleyben (1873), restaura les églises de Ham, Nesle, Athies dans la Somme et le château de Chamarande dans la Loire, appartenant au vicomte de Vougy, ainsi que la cathédrale de Soissons. À partir de 1878, il entreprit la restauration du Mont-Saint-Michel. Il fut révoqué de cette fonction par Larroumet, directeur des Beaux-Arts le 6 décembre 1888 à la suite d'une cabale locale, à la demande des députés Lockroy et Bassé qui le jugeaient clérical ; l'affaire, qui fut l'objet d'un vif débat à la chambre des députés, fut amplement rapportée par la presse (Débats du 8 décembre 1888, Gaulois du même jour, Univers du 9 décembre 1888, Liberté du même jour, l'Estafette, journal républicain quotidien du 10 décembre 1888). Corroyer fut très meurtri de cette révocation et s'en plaignit amèrement dans une lettre qu'il fit paraître dans la presse (Gaulois du 3 décembre et Liberté du 9 décembre 1888) :

Je vous avoue que je me croyais le droit d'être mieux défendu. Mon déplaisir n'est pas d'être révoqué mais de n'avoir pas trouvé en vous, directeur des Beaux-Arts de qui je relevais hiérarchiquement, une indépendance de jugement et l'esprit de justice sur lesquels j'avais le droit de compter. Architecte du Mont-Saint-Michel depuis quinze ans, j'avais eu à lutter contre les intérêts les plus divers et les plus opposés pour sauvegarder ceux qui m'étaient confiés et sans songer à mes sympathies les plus chères, j'avais accepté la lutte contre l'évêque, contre les religieux, contre la municipalité, contre les ingénieurs qui ont fait la digue et sans me préoccuper des passions locales qui soulevaient les passions des habitants... Dès que vous acceptiez les racontars de petite ville et les basses attaques intéressées, j'ai compris que je n'avais plus rien à attendre de vous, non plus que de ce vieil esprit de solidarité de la grande administration des Beaux-Arts.

Corroyer travaillait parallèlement pour le compte de l'administration des édifices diocésains. Après avoir sollicité en 1873 un poste de rapporteur au comité des inspecteurs généraux, il fut appelé en juillet 1874 à remplacer Lance, malade, comme architecte diocésain de Soissons. Lance s'en plaignit, déclarant n'avoir besoin que d'un surveillant pour vérifier la qualité des travaux du transept sud et la pose d'échafaudages : « Malheureusement, dit-il, les vues de M. Corroyer ne s'accordent pas avec les miennes ». Lance sollicita l'appui de l'inspecteur général Millet dans cette affaire et l'obtint. Le 24 décembre 1874, Lance décéda et Corroyer lui succéda. Tout en continuant à s'occuper de Soissons, Corroyer fit carrière aux Édifices diocésains et fut nommé le 13 juin 1885 inspecteur général.

Corroyer fut comblé d'honneurs : il reçut une médaille de l'académie des inscriptions en 1878, entra en 1879 à la société nationale des antiquaires, reçut la distinction de chevalier de la légion d'honneur en 1882, d'officier en 1896 sur la recommandation du sénateur Spuller et du député Berger, d'officier de l'Instruction publique le 17 juin 1898. En 1896, il fut élu membre de l'académie des Beaux-Arts en remplacement de Barbet de Jouy : il y retrouva Larroumet.

Corroyer avait deux passions : la création de pièces d'orfèvrerie. Il exposa notamment au salon de 1866 un projet d'autel avec garniture pour l'autel Notre-Dames des Victoires à Roanne. L'autre passion fut l'archéologie : ses principales publications concernent le Mont-Saint-Michel à propos duquel il écrivit notamment une Description de l'abbaye (...) et des abords précédée d'une notice (1877, 440 p.), L'Architecture romane (1880, 320 p.) et L'Architecture gothique (1889, 382 p.).

Voir aussi : LABBÉ Jean-Louis ; MILLET Eugène ; MONNIER Jules, Eugène ; PELLISSIER Antoine ; SAUVAGEOT Louis, Charles ; TRUCHY, Casimir ; VIOLLET-LE-DUC Eugène, Emmanuel.