École des chartes » ELEC » InterPARES 2 » Partie 7 Structurer les relations entre les producteurs et les services d’archives en charge de la conservation définitive des documents

Partie 7
Structurer les relations entre les producteurs et les services d’archives en charge de la conservation définitive des documents371

Introduction372

La production, la maintenance et la conservation des documents d’archives font partie intégrante de nombreuses activités humaines et appellent à ce titre des directives explicites. La formulation de recommandations utiles aux politiques publiques s’inscrit donc directement dans les objectifs d’un projet de recherche comme InterPARES. Ces directives se doivent d’être parfaitement explicites quant aux aspects juridiques de l’authenticité des documents auxquels les dimensions archivistiques doivent satisfaire et quant aux exigences éthiques et morales de la conservation, inhérentes à sa fonction mémorielle. Pour être entendues, les conclusions et recommandations issues des deux phases du projet InterPARES doivent être défendues auprès des pouvoirs publics. Ce rapport est issu pour l’essentiel des travaux et des recherches conduits par les membres de l’équipe transversale Stratégie et orientations, en particulier sur la législation concernant l’authenticité et la maintenance des documents et les droits et obligations des producteurs et des utilisateurs des documents.

Concrètement, tous les domaines explorés par InterPARES sont concernés et ont des incidences pour les politiques publiques aux niveaux international, national, sectoriel et organisationnel. C’est la raison pour laquelle InterPARES 2 a créé le thème transversal Stratégie et orientations, héritier du groupe de travail Stratégie d’InterPARES 1, qui avait défini une politique comme :

une déclaration formelle d’orientation ou de recommandation quant à la façon dont une organisation accomplira son mandat/sa mission, ses fonctions ou ses activités, motivée par des intérêts ou des programmes déterminés373.

En tant que telle, une politique peut être exprimée par des lois, des règles, des normes (professionnelles, industrielles et techniques), des codes de déontologie, des codes de conduite ou des bonnes pratiques et des principes directeurs. L’application des lois et dispositions relatives à la production et la maintenance de documents d’archives est exprimée, ou devrait l’être, dans la politique de gestion et d’archivage des documents d’une organisation. La mise en œuvre par une organisation ou un individu d’une politique de records management donne lieu, ou devrait donner lieu, à la production, la maintenance et la conservation de documents d’archives, et de leurs métadonnées, pouvant être utilisés à des fins d’action ultérieure ou de consultation, et comme preuves des activités dont ils découlent374. Les relations entre les documents d’archives, leurs métadonnées et leur conservation font l’objet d’une réflexion distincte, conduite par l’équipe transversale Description.

L’équipe Stratégie et orientations s’est intéressée aux politiques et stratégies touchant à la conservation de documents d’archives numériques produits dans le cours d’activités artistiques, scientifiques et de l’administration. Les organisations ayant recours à des technologies de plus en plus riches mais aussi dynamiques et, partant, quelque peu instables, les défis de conservation se multiplient. L’utilisation par les organisations de systèmes dynamiques, interactifs et expérientiels pour la conduite de leurs activités est symptomatique d’une pratique largement répandue qui consiste à adopter des technologies sans prendre en compte les difficultés de conservation qu’elles soulèvent pour les documents qui sont produits et gérés. De fait, si cela est patent dans les initiatives d’administration électronique, on l’observe également dans la sphère scientifique ou la sphère artistique.

L’émergence de nouveaux modèles de collaboration et de production, l’externalisation d’activités et de fonctions et la privatisation de nombreuses parties du domaine public créent de nouveaux défis pour la conservation des documents d’archives. La législation, la jurisprudence et les accords internationaux forment un ensemble de régulations complexes souvent incohérentes et contradictoires qui, bien loin de faciliter la création et l’usage corrects d’objets numériques, rend ces activités toujours plus complexes375. Le changement technologique et l’évolution des politiques publiques et des modèles économiques mettent en danger la capacité des organisations à engager certaines des activités nécessaires à la conservation de leurs documents. Une partie des travaux de l’équipe Stratégie et orientations a donc porté sur l’identification des obstacles spécifiques à la conservation et sur les moyens d’y remédier.

Les travaux de l’équipe Stratégie et orientations ont abouti à l’élaboration d’un cadre conceptuel pour le développement de politiques publiques, comportant deux jeux de principes. Les principes ont été conçus comme des outils simples au service des objectifs de l'équipe – élaborer des politiques et des stratégies types pour la conservation sur le long terme de documents d’archives numériques authentiques. En se reportant aux principes correspondant à leur situation, les producteurs de documents ou les services d’archives pourront élaborer des recommandations internes, sous la forme de principes directeurs, d’instructions ou de politiques, à même de garantir la conservation ininterrompue de documents d’archives numériques authentiques selon des méthodes conformes aux conclusions des travaux de recherche d’InterPARES. Dans l’idéal, ces principes devraient également être inclus dans les politiques, stratégies et normes internationales, nationales, sectorielles et organisationnelles.

Des principes directeurs à l’usage des particuliers et des petites structures ont été élaborés par d’autres unités de recherche d’InterPARES 2376.

Objectifs de l’équipe de recherche

Le projet InterPARES a fixé la mission suivante à l’équipe Stratégie et orientations :

L’équipe Stratégie et orientations analysera les politiques et stratégies existantes dans chaque thème et domaine explorés, à la lumière des travaux conduits par les groupes de travail, puis élaborera à partir de leurs conclusions et de leurs rapports des politiques, stratégies et principes directeurs pour la production et la maintenance fiables et exactes des documents considérés, et leur conservation authentique dans le contexte des activités et de l’environnement dont ils sont issus377.

Tout au long du projet, les trois équipes sectorielles (arts, sciences et administration) ont conduit des études de cas sur des producteurs et leurs pratiques. Les données issues de ces études de cas et l’analyse diplomatique et les activités de modélisation qui leur ont été appliquées constituent le cœur des données de recherche d’InterPARES. En vue d’atteindre ses propres objectifs, l’équipe transversale Stratégie et orientations a conduit des recherches sur les législations, réglementations, directives, etc., internationales et nationales afin d’identifier les préconisations existant pour l’élaboration de politiques et de stratégies et les difficultés qu’elles soulèvent relativement à la conservation des documents d’archives sur le long terme.

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Méthodologie de recherche

La feuille de route de l’équipe Stratégie et orientations définit de la façon suivante la méthodologie suivie par l’équipe :

L’équipe Stratégie et orientations étudiera et analysera les politiques, stratégies, principes directeurs et normes existants dans chacun des domaines retenus relativement aux différents thèmes de recherche ; interrogera leur adéquation aux environnements numériques étudiés ; les comparera en vue d’identifier points communs, différences et écarts, en particulier relativement aux nouveaux enjeux découlant de l’accessibilité, l’utilisation, la facilité de manipulation et la fragilité des types de documents étudiés. Elle analysera ensuite les conclusions des études de cas et des travaux conduits sur les autres thèmes. À partir de cette analyse, l’équipe formulera des principes en vue de guider l’élaboration de politiques, stratégies et normes pour la production, la maintenance, l’évaluation et la conservation des documents d’archives concernés et les transmettra pour contextualisation aux équipes nationales et internationales. Enfin, après avoir reçu les commentaires et compléments demandés, l’équipe élaborera des principes directeurs à l’usage des acteurs en charge de l’élaboration de politiques, stratégies et normes au niveau international, national et organisationnel378.

En raison du temps requis pour conduire les différentes séries d’études de cas, de douze à dix-huit mois chacune en moyenne, l’équipe ne disposait au début de ses travaux que de données d’études de cas limitées. Elle s’est donc attachée dans un premier temps à collecter d’autres sources d’informations et à analyser les politiques qui y étaient présentées.

Priorité a été donnée aux politiques de haut niveau, telles que les lois et directives nationales et internationales. À cet égard, la collaboration avec les autres équipes de recherche, en particulier l’équipe en charge du domaine de l’administration, dont plusieurs membres appartenaient également à l’équipe Stratégie et orientations, a été particulièrement précieuse. Les chercheurs ont travaillé sur les thèmes clés que sont les méthodes d’authentification, les problématiques d’exactitude et de fiabilité qui n’avaient pas été explorées par InterPARES 1, et les technologies émergentes comme le Digital Asset Management (gestion des ressources numériques). Les données issues de ces travaux ont été enregistrées dans des tableaux comparatifs. Les chercheurs ont ensuite rédigé des rapports ou des articles universitaires et un panel de membres d’InterPARES 2 travaillant sur les droits moraux a débattu des enjeux clés lors de la Conférence 2004 de l’Association des archivistes canadiens à Montréal.

Après l’atelier plénier de mi-parcours en septembre 2004, et la mise à disposition des données d’une première étude de cas, cinq études ont été engagées par l’équipe Stratégie et orientations :

  • 1. Une bibliographie critique sur les politiques relatives à la propriété intellectuelle dans différents pays et au niveau de différents organismes internationaux379 et une analyse des données issues des études de cas traitant des questions de recherche suivantes : « La société limite-t-elle l’utilisation des documents et entrave-t-elle leur conservation pour protéger les intérêts des titulaires des droits ? Les limitations à la protection du droit d’auteur sont-elles remises en cause par des amendements portés aux droits existants concernant les contenus numériques ? ».

    La bibliographie critique couvre les modifications apportées aux législations nationales dans différents pays, changements qui ont été introduits à la suite d’initiatives pour mettre en œuvre les dispositions d’accords transnationaux dont les pays concernés sont signataires, à commencer par le Traité de l’OMPI (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle) sur le droit d’auteur. Les dispositions de ce traité incluent la protection du droit d’auteur pour les logiciels ainsi que pour les œuvres numériques et prévoient pour la première fois des sanctions pénales en cas de violation du droit d’auteur, de la copie sans autorisation de contenus mis en ligne sur un site web à la suppression ou à l’altération des systèmes de DRM (Digital Rights Management). Les restrictions apportées récemment à la réutilisation ne sont pas compensées par les exemptions ou les protections qui permettraient d’accomplir les activités de conservation des documents d’archives. Cet équilibre précaire l’est rendu plus encore par l’extension de la protection des droits d’auteur que l’on observe dans la plupart des pays, en prolongeant la durée de protection ou en élargissant le périmètre de protection, ou les deux.

  • 2. Une étude des politiques de protection des données à caractère personnel et de la liberté d’information380, qui explore les implications de la protection des données personnelles pour l’intégrité et l’authenticité des documents d’archives.

    L’étude a été nourrie par deux articles de recherche : une étude comparative de la législation au Canada, aux États-Unis, en Australie et dans l’Union européenne et une réflexion plus théorique à partir de divers points de vue archivistiques. Les deux articles et le résumé de l’étude présentent des recommandations pour favoriser la conservation de documents d’archives numériques authentiques dans le respect des principes de protection des données à caractère personnel.

  • 3. Une étude de la législation sur les archives en général (rôle et mission des institutions archivistiques, droit de la preuve, etc.) dans treize pays/régions en vue d’identifier les points communs ayant une incidence sur la conservation des documents d’archives et les obstacles potentiels à la conservation381.

    L’étude passe en revue les législations nationales et infra-nationales ainsi que l’environnement réglementaire de l’Union européenne. Elle indique comment les documents d’archives sont définis, évalue la législation au regard de la prise en compte des différentes phases du cycle de vie des documents et met en lumière la cohérence (ou l’incohérence) dans les environnements relevant de plusieurs pays/régions.

  • 4. Une étude sur l’authenticité du document d’archives382.

    L’étude analyse les concepts juridiques sous-jacents au droit de la preuve en Amérique du Nord, en Europe et en Chine, les compare aux conditions de référence requises définies par InterPARES 1383 et évalue les dispositions d’authentification numérique dans ces mêmes systèmes juridiques.

  • 5. Une étude sur les apports potentiels des logiciels open source et des formats ouverts à la conservation sur le long terme des documents d’archives numériques384

    L’étude a exploré les politiques d’acquisition et les procédures de versement d’une large variété d’institutions archivistiques afin de déterminer si elles s’appuyaient sur un corpus cohérent de connaissances quant aux enjeux de la sélection des formats de fichiers en général et l’utilisation de standards open source en particulier. Les données recueillies dans le cadre de l’étude n° 6 (Atlas cyber-cartographique de l’Antarctique) et l’étude générale n°10 (Pratiques de conservation des portails de données scientifiques) ont mis en lumière des politiques open source très développées dans le domaine des sciences. C’est un exemple de production de données uniques, d’utilisation très spécialisée et de coût en capital élevé, obligeant à envisager des normes de production à partir du stade de conception des systèmes et jusque dans les politiques sectorielles et de financement.

Les études ont été présentées lors de l’atelier plénier d’InterPARES qui s’est tenu à Chicago un an plus tard. La dernière étude a été transmise pour finalisation à l’équipe thématique Évaluation et conservation (thème 3), cette unité de recherche étant jugée plus adaptée. Un deuxième panel Stratégie et orientations a présenté les conclusions des études portant sur les aspects juridiques lors de la conférence annuelle de l’Association des archivistes canadiens en juin 2006.

Données des études de cas

Les données issues des études de cas ont été intégrées aux travaux du thème Stratégie et orientations en trois étapes. La première étape a consisté en une analyse des réponses aux quatre questions suivantes contenues dans les rapports des études de cas :

  • 1. Des politiques, procédures et normes encadrent-elles actuellement la production, la maintenance, la conservation et l’utilisation des documents d’archives dans le contexte de l’activité du producteur ? Ces politiques, procédures et normes nécessitent-elles d’être modifiées ou enrichies ?
  • 2. Quels enjeux, obligations ou préoccupations juridiques, moraux (par exemple, contrôle de l’expression artistique) ou déontologiques existent concernant la production, la maintenance, la conservation et l’utilisation des documents d’archives dans le contexte de l’activité du producteur ?
  • 3. Quels schémas ou normes de description ou d’autres métadonnées sont utilisés à l’heure actuelle dans la production, la maintenance, l’utilisation et la conservation du système de records management ou de l’environnement étudiés ?
  • 4. Quelle est la source de ces schémas ou normes (norme interne, organisme professionnel, norme/standard international, pratique individuelle, etc.) ?

La deuxième phase a consisté en un nouvel examen des études de cas avec des visées explicatives ciblées sur les questions de propriété intellectuelle et de protection des données à caractère personnel. Elle a été menée par une petite équipe d’assistants de recherche fin 2004, date à laquelle les études portant sur les politiques publiques et institutionnelles étaient achevées ou proches de l’être. La troisième étape est l’élaboration du présent document. Celle-ci s’est appuyée sur une dernière analyse des données collectées et un appel à commentaires auprès des chercheurs ayant dirigé les études de cas.

Sauf pour cette dernière phase, rapprocher les données fragmentaires issues des études de cas et celles provenant de l’étude des politiques publiques a été problématique. Ces difficultés peuvent être attribuées en partie à la difficulté des échanges interdisciplinaires entre archivistique et sciences politiques.

Recommandations : thèmes à retenir par les politiques publiques

Les environnements de production de documents d’archives illustrés par les études de cas et la réglementation relative à la production, la maintenance et la conservation des documents d’archives mise en lumière par l’étude des politiques publiques se caractérisent par un manque de maturité alarmant. Seul un nombre limité d’organisations et de systèmes juridiques se révèlent en mesure de relever avec efficacité le défi numérique, en particulier lorsqu’il s’agit de gérer des documents complexes constitués de composants multiples, comme cela est apparu dans de nombreuses études de cas. Sans surprise, la seule exception notable est constituée par le droit de la preuve : dans un large éventail de systèmes juridiques, la législation relative à l’utilisation des documents d’archives comme preuves devant un tribunal présente une grande cohérence avec les conclusions de l’équipe Authenticité d’InterPARES 1.

Les réponses au questionnaire de recherche Stratégie et orientations sont présentées dans les pages qui suivent. Les quatre constats ci-dessous reflètent les principaux thèmes à retenir par les politiques publiques, qui ont émergé des travaux conduits par l’équipe Stratégie et orientations, de ceux d’autres unités du projet et des rapports des études de cas.

Thème 1 : un cadre politique global pour le records management est nécessaire afin de soutenir les activités d’une société fortement dépendante des technologies de l’information385.

Une des principales conclusions d’InterPARES 2 est que la conservation des documents d’archives issus d’environnements interactifs, dynamiques et expérientiels exige une infrastructure politique globale par-delà les principes exprimés par le groupe de travail Stratégie d’InterPARES 1. Les considérations relatives au droit d’auteur, aux données à caractère personnel et à la sécurité existaient déjà dans l’environnement papier mais ne concernaient qu’une minorité de documents. Elles sont aujourd’hui beaucoup plus répandues. L’équipe Stratégie et orientations a présenté les principaux éléments d’une telle infrastructure dans le document intitulé « Principes en vue de l’élaboration de politiques, stratégies et normes pour la conservation sur le long terme de documents d’archives numériques ». Ces principes peuvent être mis en œuvre à différents niveaux de gouvernance.

Dans l’environnement en réseau/interconnecté actuel, qui se traduit par le transfert croissant d’informations à l’extérieur des frontières des organisations, les problématiques ci-dessous deviennent centrales. Si les trois premières ne portent pas sur les documents en tant que tels et sont traditionnellement à la base de la conservation archivistique, la question relative aux droits de propriété intellectuelle s’applique aux documents tant de manière externe (leur contexte) que de manière interne (leur contenu) ; les deux dernières dimensions sont internes aux documents.

  • Relation au processus métier
  • Relation à une transaction donnée
  • Relation au producteur
  • Relation aux droits de propriété intellectuelle (contexte et contenu)
  • Relation aux données à caractère personnel (contenu)
  • Relation à la sécurité (contenu)

L’adhésion à une compréhension nouvelle de la nature du document d’archives permettant de prendre en compte ces nouveaux environnements et sa déclinaison en principes directeurs favoriseront la convergence requise pour transformer les produits théoriques d’InterPARES en un fondement solide pour l’élaboration de normes et de politiques aux niveaux organisationnel, sectoriel, national et international. Comme toute orientation et tout instrument juridique mis à son service, les normes, pour être utiles, doivent être facilitatrices et non spécifiques à une technologie donnée.

Un projet de recherche tel qu’InterPARES doit définir des meilleures pratiques, voire des pratiques idéales, sur la base de principes théoriques précisément définis. Au niveau national et international, l’effort de normalisation tend à se concentrer sur la définition d’exigences minimales acceptables ou sur la transformation en normes de « meilleures » pratiques communément acceptées. L’utilisation généralisée des technologies informatiques a favorisé cette seconde démarche alors que c’est de toute évidence à la première que devrait se consacrer tout effort de normalisation. C’est particulièrement vrai du développement de l’interopérabilité (dans le temps et l’espace) entre systèmes numériques, qui est vitale pour accompagner les transferts d’informations et, partant, le processus archivistique. En dehors de l’étude des formats de fichiers déjà citée, l’équipe Stratégie et orientations n’a pas travaillé directement sur le sujet de l’élaboration de normes. Toutefois, d’autres unités de recherche au sein du projet ont étudié et participé à des initiatives de définition de normes386.

Thème 2 : une définition plus large et plus précise du document d’archives est nécessaire.

Les conclusions d’InterPARES 2 recommandent la conservation de tous les documents que le producteur traite comme des documents d’archives ; c’est-à-dire, tous les documents sur lesquels s’appuie le producteur dans le cours habituel et ordinaire de ses activités, qu’il associe à d’autres documents et auxquels il se réfère comme documents d’archives de ses activités. C’est plus cohérent avec la définition inclusive du terme « document d’archives » utilisée dans les textes législatifs. Le producteur décide donc ce qui constitue un document d’archives à conserver en vue d’une action ultérieure ou pour s’y reporter, et le service d’archives doit ensuite évaluer la faisabilité de la conservation sur le long terme.

Les conclusions d’InterPARES 2 portent également à l’attention une nouvelle catégorie de documents d’archives : les documents d’archives potentiels. Traditionnellement, les documents d’archives sont identifiés en tant que tels de manière rétrospective ; c’est-à-dire après avoir été élaborés et diffusés avec une forme fixe et un contenu stable ; mais, avec les systèmes dynamiques, il est possible d’identifier des documents d’archives « prospectifs ». Les objets numériques qui se manifestent comme documents d’archives dès leur production remplissent la fonction traditionnelle, mémorielle, des documents d’archives pour porter témoignage ou rappeler une action à laquelle ils participent ou dont ils sont le produit. Au lieu de témoigner du passé, les documents d’archives prospectifs consistent en une série d’instructions ou d’actions à accomplir, et ils ont donc une action sur l’avenir387. À ce titre, les documents d’archives prospectifs peuvent ne pas être considérés comme des documents d’archives lorsque leur processus d’élaboration débute mais, dans la mesure où leur contenu peut être fixé et leur forme documentaire et leurs fonctionnalités décrites pour qu’il soit possible de les re-produire dans le futur, ils peuvent devenir des documents d’archives. La définition de politiques pour gérer et archiver les objets numériques qui sont des documents d’archives prospectifs et pourraient devenir des documents d’archives est du ressort des guides, manuels et autres documents procéduraux.

Thème 3 : les processus métier sont répartis entre de nombreux systèmes.

Le déploiement de systèmes dynamiques, interactifs et expérientiels pour capturer, traiter et gérer des données ne prend pas toujours suffisamment en compte aujourd’hui les divers rôles des documents d’archives (comme témoignages, c’est-à-dire, pour s’y reporter ; ou comme orientations, c’est-à-dire comme instructions pour des activités futures) et leur nature parfois éclatée. Les systèmes peuvent être répartis au sein d’une organisation, qui peut elle-même être répartie sur plusieurs sites (cas des organisations multinationales implantées dans plusieurs pays). Ces deux configurations sont la norme dans les projets scientifiques collaboratifs électroniques comme l’Atlas cyber-cartographique de l’Antarctique (étude de cas n°6).

Des systèmes dynamiques, interactifs et expérientiels peuvent également être déployés pour atteindre des objectifs qui ne sont pas compatibles avec ceux du records management. Les documents susceptibles de satisfaire aux conditions requises du records management peuvent être représentés en de multiples points des systèmes. À titre d’exemple, le Service des impôts en ligne d’Irlande (ROS, étude de cas n° 20) est pour l’essentiel un « tuyau », qui permet l’entrée de données contrôlées directement par les citoyens au lieu que des agents de l’administration travaillent à partir de formulaires papier transmis par les citoyens. Les objets numériques du ROS sont des documents d’archives visant à instaurer et normaliser les relations des citoyens avec l’administration fiscale. En d’autres termes, l’activité des citoyens assujettis à l’impôt a été scindée en deux systèmes au moins : le ROS, qui gère la relation du citoyen avec l’administration des impôts, et les unités centrales qui calculent le montant de l’impôt. En outre, les éléments documentaires qui communiquent la sémantique d’un document d’archives (schémas de métadonnées par exemple) peuvent exister dans les systèmes comme objets numériques distincts du document. Dans l’étude de cas consacrée à un projet d’ingénierie utilisant le langage d’ontologie web OWL (Web Ontology Language), une extension du XML qui permet la représentation de sémantiques dans des schémas de métadonnées pour formuler un nouveau format de conservation logique pour les documents d’archives CAO complexes, les éléments de métadonnées étaient stockés dans un segment d’un système de conservation pilote situé à l’extrémité opposée d’un réseau national partagé par les partenaires de l’expérience388.

La subdivision d’un processus métier entre plusieurs systèmes, dont certains peuvent (a) être dynamiques, interactifs ou expérientiels et (b) franchir des frontières organisationnelles, appelle une politique aussi élaborée que les systèmes et les processus métier considérés. Les documents d’archives identifiés dans un système doivent être envisagés avec les documents liés au même processus métier produits par d’autres systèmes afin de garantir que la gestion, le sort final et la conservation des documents soient les plus efficaces possibles. La politique de records management devra garantir : (1) que l’identification des entités documentaires, et notamment les documents/métadonnées/liens, etc389., est conduite lors de la phase de conception du système ; (2) que les fonctions requises pour gérer et conserver les entités identifiées au début du développement du système y sont intégrées et (3) que le processus et les produits de ces activités sont régulièrement contrôlés.

Thème 4 : les politiques de conservation sont inadaptées ou inexistantes.

Les objets numériques que leurs producteurs considèrent comme des documents d’archives ne sont pas toujours propres à être conservés, du fait par exemple de l’utilisation insuffisamment réfléchie de signatures numériques ou, plus largement, parce qu’ils ne peuvent fonctionner comme documents d’archives rétrospectifs ou prospectifs. Les activités de conservation examinées dans le cadre des études de cas étaient majoritairement centrées sur la conservation des données, non des documents. Ainsi, si les procédures de sauvegarde et de reprise après sinistre étaient répandues, la possibilité de restaurer les documents - sauf vers un système identique (interopérabilité dans le temps) - était rarement prise en charge. Dans l’étude de cas consacrée à l’Atlas cyber-cartographique de l’Antarctique, les mesures prises pour assurer l’interopérabilité entre systèmes remplissaient nombre des mêmes finalités que la conservation. De même, la production d’expositions en ligne était parfois assortie d’éléments d’une politique de conservation, mais non de conservation sur le long terme, les objets produits étant considérés comme maintenus exacts et authentiques à travers l’espace (c’est-à-dire, d’un système à un autre). Comme le montre le modèle de Chaîne archivistique, tous les aspects du cycle de vie des documents doivent être pris en compte dans une politique de conservation390.

Réponses au questionnaire de recherche

Le programme de recherche de l’équipe transversale Stratégie et orientations comportait les questions suivantes :

  • Des politiques, procédures et normes encadrent-elles actuellement la production, la maintenance, la conservation et l’utilisation des documents d’archives dans les domaines étudiés ? Ces politiques, procédures et normes doivent-elles être révisées et complétées ?
  • Un ou des cadres intellectuels peuvent-ils être élaborés afin de faciliter la traduction des politiques, procédures et normes dans différents pays, secteurs et domaines ?
  • Comment favoriser le contrôle accru et la normalisation de la production, la maintenance, la conservation, la communication et l’utilisation des documents dans le respect des différences culturelles et juridiques qui peuvent exister en matière de liberté d’expression, de droits moraux, de vie privée et de sécurité nationale ?
  • Quelles obligations légales ou morales existent concernant la production, la maintenance, la conservation et l’utilisation des documents d’archives d’activités scientifiques et artistiques ?
  • Quels principes devraient guider la formulation de politiques, stratégies et normes pour la production de documents d’archives fiables, exacts et authentiques dans les environnements numériques étudiés ?
  • Quels principes devraient guider la formulation de politiques, stratégies et normes pour l’évaluation de ces documents ?
  • Quels principes devraient guider la formulation de politiques, stratégies et normes pour la conservation sur le long terme de ces documents ?
  • Sur quels critères devrait se fonder l’élaboration des politiques, stratégies et normes nationales ?
  • Sur quels critères devrait se fonder l’élaboration des politiques, stratégies et normes à destination des organisations ?

Le records management et l’environnement actuel

On constate dans les trois domaines explorés une influence très limitée des politiques, procédures et normes sur la production, la maintenance, la conservation et l’utilisation des documents d’archives. Les réponses apportées à cette question dépendent de la nature de l’organisation et de la phase ou du stade du cycle de vie (c’est-à-dire, production, maintenance, etc.) du document considéré.

Lorsque la culture de l’organisation est propice à l’élaboration de politiques et procédures et à l’adoption de normes, certains aspects de la production, la maintenance, la conservation et l’utilisation des documents sont effectivement soumis à des contrôles. Dans les environnements étudiés, l’administration et certaines organisations scientifiques ont élaboré ou adopté des politiques et procédures, ce qui n’est pas le cas des artistes ou des petites structures éphémères. De fait, dans ces organisations, le records management n’est absolument pas encadré par des politiques, des procédures ou des normes.

Dans la moitié des études de cas du domaine artistique, la maintenance et la conservation des documents ne sont pas envisagées. Lorsqu’elles le sont, la démarche répond à différents types de motivations. Dans certains cas, la maintenance et la conservation des documents répondaient à des motifs juridiques, relevant généralement de la protection de la propriété intellectuelle. Dans d’autres, la démarche relevait plutôt de considérations liées à la publicité et à la possibilité de donner des représentations futures des œuvres, cela n’allant toutefois pas nécessairement jusqu’à l’élaboration de politiques ou l’adoption de normes391.

Pour ce qui est du domaine scientifique, il a été noté que la définition de règles et de procédures autour de la production et de la maintenance des documents d’archives répondait à des exigences immédiates et prévisibles des différentes activités scientifiques concernées. Il a également été observé que, si des technologies sophistiquées sont souvent adoptées, celles utilisées pour maintenir les documents et y accéder étaient généralement rudimentaires (par exemple, Microsoft Windows ou d’autres outils logiciels propriétaires). Un processus pour déterminer combien de temps conserver les données d’un projet était systématiquement en place. Des procédures de duplication et de migration existaient également. Plus largement, permettre l’accès aux données sur différents systèmes (l’interopérabilité) était souvent une condition requise, même en l’absence de réels protocoles de conservation.

Les études de cas portant sur l’administration se caractérisent par les politiques et les procédures de records management les plus exhaustives pour ce qui est des différentes phases du cycle de vie des documents. Dans la plupart des cas, les organisations ont une relation formalisée avec un service d’archives ou une autre unité en charge de la conservation des documents. Comme pour les études de cas du domaine scientifique, cependant, il apparaît que les processus de maintenance et de conservation sont orientés sur les données, ou les systèmes, sans être nécessairement liés aux exigences spécifiques de gestion et d’archivage des documents de l’organisation.

Un autre facteur à prendre en considération lorsqu’une politique existe ou que des normes sont adoptées est la phase du cycle de vie des documents. Les études de cas montrent qu’il arrive que les organisations adhèrent à des politiques, procédures et normes à un stade du cycle de vie des documents (par exemple, la production des documents) mais pas aux autres. Le concept de conservation des documents d’archives tel qu’envisagé par InterPARES est global et inclut toutes les activités ayant une incidence sur le document à compter de sa production. Aucune des organisations ayant participé aux études de cas ne pouvait se prévaloir d’une approche aussi globale392.

L’étude de la législation relative aux archives montre que les systèmes étudiés ont des définitions très larges du document d’archives, qui contrastent avec la définition archivistique plus spécifique adoptée par le projet InterPARES 2 :

Un document produit ou reçu par toute personne ou physique ou morale et par tout service ou organisme public ou privé, dans l’exercice de leur activité et sélectionné en vue d’une action ultérieure ou à des fins de consultation393.

Les définitions trop larges et incohérentes du document d’archives entravent non seulement la capacité d’une organisation à élaborer les politiques et procédures dont elle a besoin mais aussi l’adoption de normes. Elles compromettent également la capacité d’une organisation à interpréter correctement les décisions de justice relatives aux documents d’archives394.

L’étude de la législation sur les archives montre que, si toutes les phases du cycle de vie des documents sont effectivement envisagées dans les lois ou directives des systèmes juridiques étudiés, elles ne sont prises en compte de manière exhaustive par aucune loi, ni aucun corpus législatif au sein d’un système juridique donné395. Les transactions foncières, par exemple, sont une activité juridiquement très encadrée. En Alsace-Moselle, il a été décidé d’informatiser le livre foncier. Le système mis au point est très efficace pour le court et le moyen terme mais présente des problèmes non résolus en ce qui concerne la maintenance et la conservation sur le long terme, en particulier pour ce qui est de la maintenance sur le long terme de la fonction d’authentification de la signature numérique du juge. L’étude de la législation sur les archives montre également que les phases du cycle de vie les plus souvent traitées par la législation sont la production et le sort final des documents.

Les obligations légales relatives au records management contribuent naturellement à faire évoluer les pratiques des organisations qui y sont assujetties. Cela étant, on ne peut demander à la législation de couvrir systématiquement et de manière exhaustive toutes les phases du cycle de vie des documents. En l’absence de dispositions légales, les organisations pourront souhaiter adopter des normes générales, comme la norme ISO pour le records management396, pour les aider à maintenir et conserver leurs documents comme ils doivent l’être.

Approche commune et respect des différences culturelles

L’adoption massive des nouvelles technologies de l’information dans les trois environnements étudiés par InterPARES 2 ne semble pas avoir profondément modifié les processus traditionnels qui y sont utilisés. Le rapport de l’équipe thématique 1, qui a travaillé sur la production des documents, conclut ainsi que les processus intervenant aujourd’hui dans la production des documents s’apparentent à ceux utilisés dans l’environnement papier.

On observe dans les études de cas consacrées au secteur artistique la continuation dans l’environnement numérique des pratiques traditionnelles du secteur. Les processus sont en grande partie identiques, fondés sur les principes artistiques établis de longue date par chaque domaine... pour ce qui est de la sphère scientifique, on observe dans la plupart des études de cas que la production des documents a lieu dans un environnement beaucoup plus formalisé et contrôlé, avec des processus prédéterminés pour la collecte, l’analyse et la conservation ou la communication des données... La plupart des études de cas conduites dans la sphère de l’administration portent sur des activités traditionnelles accomplies d’une manière nouvelle. Dès lors, le processus de production des documents est quasiment identique à celui qui prévalait dans l’environnement papier ; il est simplement transposé dans l’environnement numérique avec l’adjonction éventuelle de certaines étapes afin de prendre en compte la technologie397.

Si les processus ne subissent pas de modification fondamentale, les politiques, stratégies et normes existantes n’auront pas nécessairement besoin d’être totalement refondues mais seulement révisées et étendues. Dans l’environnement papier, lorsque les documents et leur support sont indissociables, le moment de production du document est bien défini. Il ressort des travaux d’InterPARES 1 que dans l’environnement numérique, le support n’est plus un élément essentiel du document. En conséquence de quoi, la conservation doit viser à préserver la capacité de reproduire les documents numériques, en les migrant d’un support sur un autre, en fonction des besoins. Dès lors, les procédures et les normes de production des documents doivent établir quand un document a été produit et identifier les composants numériques qui le constituent et leurs relations. Pour les documents d’archives produits dans des systèmes dynamiques, les procédures doivent indiquer comment ces composants sont identifiés et fixer la marge de variation acceptable de leurs relations398.

De nouveaux principes guidant les politiques, procédures et normes d’identification et de modification des documents produits sont également requis. Les technologies numériques permettent l’intégration de types de documents hier distingués par leur support (par exemple, audio et texte). Par-delà les complications que posent la maintenance et/ou la conservation des composants numériques de différents formats qui constituent le document, cette évolution appelle une gestion plus sophistiquée des droits de propriété intellectuelle associés aux documents - droits sur les bases de données, copyrights et brevets notamment. De la même manière, l’émergence d’une législation sur la communicabilité des données et la protection des données à caractère personnel exige une gestion du contenu des documents plus exhaustive que par le passé. Les lois sur les données personnelles mettent l’accent sur l’exactitude des données et permettent à toute personne identifiée dans le document de demander que les informations qui y sont contenues soient corrigées. Il peut arriver que les droits associés à certains composants des documents aillent à l’encontre de leur conservation par le service ou l’institution compétents. Alors que ces organismes avaient par le passé la possibilité de gérer ces situations en suspendant la communication des documents jusqu’à l’extinction des droits, ces situations doivent désormais être envisagées et prises en charge dans des politiques, et les règles correspondantes, qui s’appliquent dès le stade de production. Les producteurs de documents doivent également mettre en place des procédures précises quant à la mise en œuvre de ces règles. Ces procédures doivent être connues et acceptées par les personnes en charge ou intégrées à la conception des systèmes qui maintiennent les documents.

La technologie numérique a également considérablement renforcé les moyens de transmettre de l’information. Dans les études de cas des domaines scientifique et artistique, cette évolution est perçue de manière tout à fait positive. Pour l’artiste, la facilité de transmission peut démultiplier le public potentiel d’une œuvre. Pour les scientifiques, la facilité d’accès à davantage de données rend la recherche plus performante. La communauté scientifique est motivée par « la volonté et la possibilité de traduire les données collectées en un format neutre ou open source399. » Par contraste, les préoccupations de sécurité prédominent dans l’environnement de l’administration, où la transmission des documents renforce la nécessité de métadonnées et de technologies de sécurité pour assurer la non-répudiation par les participants au processus de production du document, et de normes pour des technologies de stockage sécurisées, comme le chiffrement, les signatures numériques sécurisées et les dispositifs biométriques. Les administrations aussi échangent des informations, naturellement. Pour que les documents soient correctement communiqués à travers l’espace, des politiques formelles sont requises non seulement afin que le récepteur du document puisse le reproduire avec exactitude mais aussi pour que les documents envoyés ne contreviennent pas aux exigences de sécurité, de protection de la vie privée et aux droits de propriété intellectuelle dans les différents systèmes juridiques concernés. Trois approches sont envisageables pour se doter des garde-fous nécessaires : (1) harmoniser les cadres juridiques, (2) mettre en œuvre des exceptions efficaces aux fins de la conservation archivistique et (3) garantir que les métadonnées de propriété intellectuelle requises accompagnent le document.

InterPARES 1 a souligné à quel point il est important que le service en charge de la conservation évalue la faisabilité de la conservation des documents au cours du processus d’évaluation archivistique. Les politiques et procédures d’évaluation de la faisabilité de la conservation doivent être définies en fonction des spécificités technologiques des documents relativement aux capacités du système de conservation. Elles doivent également prendre en compte les droits ou obligations qui restent attachés aux documents – données à caractère personnel, propriété intellectuelle, sécurité, etc. - et qui devront être gérés ou administrés par le service en charge de la conservation. La faisabilité est ainsi évaluée à un double niveau : le particulier (en relation avec un corpus identifié de documents) et le général, en ce sens que le service en charge de la conservation doit définir ou modifier ses politiques d’acquisition de façon à ce qu’elles soient cohérentes avec les capacités du système de conservation.

En pratique, le service d’archives en charge de la conservation qui maintient des copies authentiques de documents numériques doit être guidé par les mêmes considérations que le producteur. Si le producteur a été tenu de respecter certaines obligations quant à la protection des données à caractère personnel, la propriété intellectuelle et la sécurité en maintenant les documents, le service en charge de la conservation devra également s’y plier au sein de l’environnement de conservation, sauf à en être explicitement dispensé. Le premier principe qui doit guider la conservation sur le long terme des documents numériques a été établi par InterPARES 1, à savoir, garantir qu’au fil du processus de conservation, les documents demeurent des copies authentiques des documents du producteur.

Il ressort de la littérature examinée dans la bibliographie critique consacrée à la propriété intellectuelle que le contrôle accru de l’accès au contenu numérique dans un contexte marchand est une question clé dans la formulation des traités internationaux, des législations nationales, des jurisprudences et des débats politiques. Non sans ironie, les caractéristiques techniques et juridiques grâce auxquelles les détenteurs de droits bénéficient d’une protection économique et les utilisateurs d’un accès immédiat aux documents et à l’information, font peser des restrictions sur les usages futurs du contenu des documents et, au bout du compte, entravent la capacité de les conserver pour leur « seconde vie non marchande400 ». L’émergence de technologies de contrôle de l’accès et de la rediffusion (également appelées DRM ou digital rights management) et les débats que suscitent ces technologies et les défis qu’elles posent pour la conservation témoignent des difficultés à concilier contrôle accru de l’accès, attentes des usagers et considérations juridiques quant à l’utilisation des données/documents401.

Tenir compte des obligations légales et morales

Les activités des producteurs de documents et des organismes en charge de leur conservation doivent répondre à des obligations juridiques et morales ainsi qu’aux attentes des usagers. Les organismes en charge de la conservation sont les destinataires finaux de preuves des activités des producteurs de documents d’hier et d’aujourd’hui. Dans le même temps, ils sont également des producteurs à part entière de documents. Par le passé, les organismes en charge de la conservation, en particulier les archives, géraient le transfert de droits de propriété matérielle et intellectuelle dans des documents analogiques. Les choses sont bien différentes aujourd’hui. Parce que les producteurs utilisent des logiciels pour créer et/ou appliquent des technologies de gestion des droits pour protéger les actifs intellectuels, ils introduisent une couche totalement nouvelle pour la gestion de la conservation. Parce que cette couche supplémentaire est elle-même soumise à des droits et protections de propriété intellectuelle, le processus de conservation est assorti de tâches et de risques supplémentaires.

L’émergence des technologies de contrôle de l’accès aux documents et de leur rediffusion intervient à un moment où les droits moraux sont battus en brèche par les droits commerciaux, et où les droits à la protection des données à caractère personnel s’effacent devant les considérations de sécurité nationale. Les changements successifs des législations nationales, des accords de commerce internationaux et des modèles économiques rendent le défi, déjà considérable, de la conservation des documents d’archives numériques, bien plus complexe que la simple lutte contre l’obsolescence technologique.

Outre qu’elle doit garantir que les documents numériques conservés demeurent des copies authentiques des documents du producteur, la conservation doit être envisagée et conduite comme un processus compatible avec la finalité pour laquelle les documents conservés ont été produits. Dans le cas contraire, les organismes en charge de la conservation pourraient avoir besoin d’exceptions spécifiques ou générales quant aux obligations de protection des droits de propriété intellectuelle, y compris les droits moraux, et de protection des données à caractère personnel. Par exemple, l’anonymisation de documents contenant des informations à caractère personnel compromet l’intégrité du document produit. Les activités de conservation peuvent se traduire par des modifications des documents au niveau des bits mais non au niveau fonctionnel. Elles contreviendraient alors à une application rigoureuse des droits de propriété intellectuelle.

Dans certaines études de cas du domaine artistique, il est apparu que les documents produits n’étaient pas suffisamment bien définis pour qu’un service d’archives démontre l’authenticité des copies reproduites des documents. Dans l’étude de cas Obsessed Again..., une reproduction de l’œuvre a été jugée non authentique par le producteur. D’où l’importance du principe selon lequel les organismes en charge de la conservation doivent dialoguer dès le départ avec les producteurs pour conserver des copies authentiques des documents. Lorsque cette relation n’existe pas, les procédures et les normes de l’entité en charge de la conservation doivent fixer le degré d’authenticité des reproductions des copies conservées.

Principes pour l’évaluation et la conservation

Alliée à la rapidité du changement technologique, la nécessité de gérer les droits subsistant dans le contenu ou les composants des documents soulève d’importants défis pour la conservation sur le long terme des documents numériques. L’élaboration et l’adoption de normes et de contrôles procéduraux plus rigoureux pour le records management ne suffisent pas en elles-mêmes à rendre possible la conservation sur le long terme. Une relation suivie entre le producteur et l’entité en charge de la conservation est également nécessaire. Les deux dimensions se renforcent mutuellement. Les normes et contrôles procéduraux orientent la sélection des technologies de production et de maintenance des documents par le producteur. Devront être pris en charge par les principes directeurs, les procédures et les normes, les principaux aspects de la participation du service d’archives à la phase de production des documents. Les procédures et les normes établies aident également le service d’archives à développer et gérer un système de conservation et, beaucoup plus important, démontrent l’authenticité des documents maintenus dans le système. L’Union européenne considère que la normalisation est « partie intégrante de ses politiques visant à mettre en œuvre une « meilleure régulation », à renforcer la compétitivité des entreprises et à supprimer les obstacles aux échanges commerciaux au niveau international ». Les directives relatives à la protection des données, la signature électronique, la facturation électronique et le cadre réglementaire pour les réseaux et services de communication électronique (qui fait l’objet de cinq directives additionnelles) constituent une réglementation nouvelle (ou législation sur la société de l’information). Elles sont promulguées sous l’égide des Organisations européennes de normalisation en vue de définir « un cadre juridique pour garantir la libre circulation des services de la société de l’information entre les États membres »402.

Face à la créativité des utilisateurs des documents et au déploiement de nouveaux systèmes et technologies, les normes et les contrôles procéduraux sont statiques ; ils ne peuvent donc en eux-mêmes répondre à et prendre en charge les différences nationales et culturelles403. Une relation suivie entre les producteurs des documents et les services d’archives en charge de leur conservation est un moyen pour le producteur de communiquer au service d’archives des usages innovants ou des variations des procédures. Cette relation informe également le service d’archives du comportement déontologique d’une communauté (par exemple, dans la communauté scientifique, les données de recherche doivent être partagées le plus largement possible, mais pas avant que ceux qui les ont établies ou collectées aient eu raisonnablement la possibilité de publier leurs conclusions).

Le degré d’influence des politiques publiques, sectorielles et organisationnelles sur les participants à diverses activités de production des documents varie selon les dimensions légales, éthiques et morales de leur relation avec leurs correspondants. Ainsi, il y a moins d’obligations juridiques et morales qui pèsent sur le records management dans les environnements artistiques et scientifiques que dans l’administration. Dans le domaine artistique, ces obligations renvoient pour l’essentiel à la propriété intellectuelle alors que dans la sphère scientifique, elles portent davantage sur l’exactitude et l’accessibilité des données de la recherche404.

Parmi les études de cas du domaine artistique, certains créateurs ne se sentaient tout bonnement pas concernés par le risque à long terme de perdre leurs documents numériques. Comme cela été indiqué plus haut, même lorsque les organisations productrices des documents se préoccupaient de leur gestion et de leur archivage, les obligations étaient relatives à la protection ou à la reconnaissance de droits de propriété intellectuelle ou visaient à répondre aux exigences comptables d’un organisme ayant accordé une aide.

Dans la communauté scientifique, il semblerait que l’on assiste à un renforcement des obligations légales et morales en matière de records management, principalement du fait des politiques des organismes finançant les recherches. Communauté fondée sur les connaissances, il est dans son intérêt de veiller à ce que les données issues de la recherche puissent être maintenues en vue d’utilisations futures. Certaines communautés scientifiques ont établi de longue date des normes de records management (normes de métadonnées pour les données géo-spatiales, par exemple) qui s’imposent naturellement aux chercheurs. De même, on observe un usage très répandu des licences creative commons pour favoriser la consultation et l’utilisation par le plus grand nombre des données issues de la recherche scientifique, tout en garantissant la protection des droits du créateur.

La législation récente relative aux données à caractère personnel a étendu les obligations en la matière au-delà de l’administration et des activités du secteur privé les plus réglementées, comme la banque. Cette législation impose des obligations supplémentaires à toute organisation collectant et utilisant des informations à caractère personnel. Les communautés scientifiques ont déjà mis en place des règles pour la collecte, l’utilisation et la maintenance éthiques des données issues de recherches impliquant des sujets humains ; on peut donc avancer que l’on assiste dans la sphère scientifique à un renforcement des obligations juridiques pesant sur les documents qui contiennent des données à caractère personnel. Il est difficile d’évaluer quel sera l’impact de cette nouvelle législation sur les documents dans l’environnement artistique.

Lorsque les documents pris en charge par les services d’archives restent soumis à des droits qui peuvent faire l’objet d’une protection, la législation sur la propriété intellectuelle place les services d’archives face à un dilemme. L’obligation morale de ne pas modifier la création d’un artiste, par exemple, peut rendre impossible la conservation sur le long terme si les documents concernés dépendent de composants technologiques à courte durée de vie. Dans certains pays, le législateur a choisi d’exempter certaines institutions de conservation, généralement les archives nationales, des obligations découlant du copyright (par exemple, Library and Archives Canada est autorisé à parcourir et capturer des contenus sur le Web canadien). Pour ce qui est des données à caractère personnel, les institutions de conservation ou leurs usagers doivent dans certains cas prouver à une autorité extérieure que l’utilisation envisagée de documents contenant des données à caractère personnel est compatible avec la finalité pour laquelle ceux-ci ont été produits.

Fonder les politiques nationales sur une base commune

Les politiques, stratégies et normes nationales doivent être guidées par des approches et des finalités communes pour toutes les phases du records management. Les directives élaborées par l’Union européenne (UE) offrent un exemple de la définition de critères communs pour une mise en œuvre spécifique au sein de chaque État membre. Les critères ainsi élaborés doivent être examinés ou évalués relativement aux limites technologiques et économiques. Alors que les principes généraux de la Directive européenne sur la signature électronique sont appliqués par les pays membres « en dépit des limites reconnues de la technologie supportant la signature électronique, [on observe qu’] « il n’existe pas actuellement de demande du marché pour des certificats qualifiés et les services associés »405. Les limitations technologiques sont reflétées dans la prudence de la Directive sur l’e-signature qui « exclut explicitement certaines catégories de contrats »406.

Les relations entre les producteurs et les services d’archives en charge de la conservation des documents doivent être reconnues et accompagnées par les politiques, stratégies et normes nationales. Il conviendra de définir des règles afin d’identifier et de répertorier les professionnels et les organisations qui conservent des documents numériques à tous les niveaux de la société, et pas seulement au niveau d’institutions nationales. Ces règles devront prendre en compte les obligations auxquelles doivent satisfaire les différents acteurs en charge de la conservation des documents ; c’est-à-dire, expliciter les caractéristiques de l’archiviste tiers de confiance, relativement aux droits subsistant dans les documents conservés et la nature fluctuante des technologies utilisées pour le records management, et en particulier la production des documents. Les politiques et normes nationales devront en outre être suffisamment souples pour répondre aux normes de communautés spécifiques, ainsi des arts ou de la recherche scientifique, pour lesquelles la notion de frontière nationale n’est pas toujours pertinente.

Bien qu’il soit admis que les politiques et normes nationales doivent être prises en compte de manière exhaustive par la législation, il est important que celle-ci s’inscrive dans une stratégie d’information la plus exhaustive possible. Définir des politiques qui ne peuvent être mises en œuvre de façon homogène, comme dans le cas de la Directive européenne sur la signature électronique, met en danger les droits de tous. En l’absence de documents d’archives authentiques, fiables et exacts et de règles sur leur utilisation et leur diffusion, le respect des droits tels ceux concernant les données à caractère personnel ou la propriété intellectuelle des citoyens ne peut être garanti. Faute de politiques sur la production, la maintenance et la conservation des documents, l’État lui-même pourrait contribuer au non-respect de ces droits.

Critères pour la définition de politiques au sein des organisations

Il va sans dire que les politiques, stratégies et normes de records management pour les organisations doivent être en conformité avec la législation. Dans la mesure du possible, les organisations ou les communautés de pratiques doivent codifier la façon dont elles satisferont à ces obligations. Lorsque des obligations juridiques restent attachées aux documents (par exemple, données à caractère personnel ou propriété intellectuelle) et lorsque les activités normales de maintenance ou de conservation conduiraient à les enfreindre, les politiques de gestion et d’archivage des documents devront comprendre une évaluation du risque. Les organisations pourront se protéger en travaillant avec des organisations similaires pour définir des pratiques communes. Ce type d’approche exigera nécessairement de prendre en compte toutes les phases de records management et toutes les organisations impliquées dans l’une quelconque de ces phases.

Un autre critère pour la définition de politiques, stratégies et normes de records management pour les organisations est la prise en compte explicite des exigences de conservation sur le long terme. Ceci est indispensable non seulement pour définir ces exigences mais également pour déterminer si la conservation est même possible ou souhaitable au sein de l’organisation concernée ou s’il convient de se tourner vers un service d’archives extérieur. Dans ce dernier cas, les obligations de conservation sur le long terme constitueront la base de la relation entre l’organisation productrice et l’organisation en charge de la conservation.

Deux ensembles de principes ont été élaborés par InterPARES 2 en vue d’aider les particuliers et les organisations à mettre en place des politiques, stratégies et normes de records management. Le premier ensemble est intitulé « Principes directeurs à l’usage des producteurs – Produire et maintenir des documents numériques : recommandations à l’usage des particuliers et des petites structures407 » et il est destiné à aider les individus ou les petites structures qui produisent et maintiennent des documents numériques, dont des documents d’archives numériques. Comme l’ont révélé les études de cas, « les technologies utilisées par les innovateurs, indépendamment de leur domaine d’activité, étaient propriétaires et souvent personnalisées », et « dans de nombreux cas, le but du travail de ce type de créateurs est d’explorer, de tester et de repousser les limites des technologies existantes, qu’il s’agisse de matériel ou de logiciels408. » Ces principes directeurs visent à sensibiliser et informer les producteurs des problèmes et enjeux de la production et de la maintenance des documents numériques. En particulier, les preuves de paternité, avec des conséquences pour la conservation des droits de propriété intellectuelle, sont menacées même si les problèmes d’obsolescence technologique sont pris en charge.

Le second ensemble de principes directeurs, « Principes directeurs à l’usage des services d’archives en charge de la conservation définitive – Conserver des documents d’archives numériques : recommandations à l’usage des organisations409 », fournit des recommandations procédurales pour toute organisation ayant pour mission de fournir des services de conservation (c’est-à-dire, où la problématique de la conservation est centrale). Ces principes directeurs ne sont pas réservés aux grandes organisations. Ils guident l’élaboration de procédures et de systèmes de conservation pouvant maintenir l’exactitude et l’authenticité des documents conservés et sont fondés sur les concepts décrits dans le modèle de Chaîne archivistique d’InterPARES 2.

Vers des principes pour l’élaboration de politiques

Au vu de ce qui vient d’être dit, il ne fait pas de doute que l’élaboration de politiques, procédures et normes plus exhaustives est non seulement possible mais nécessaire. Plusieurs documents produits par InterPARES 2 fournissent des recommandations détaillées pour tous les aspects de l’archivage numérique. En termes de politique, le principal livrable de l’équipe transversale Stratégie et orientations est le document intitulé « Principes pour l’élaboration de politiques, de stratégies et de normes pour la conservation sur le long terme de documents d’archives numériques », composé de deux ensembles complémentaires de principes directeurs pour la production et la conservation des documents numériques. On trouvera une présentation détaillée de ces principes en annexe 19. Ils offrent la possibilité d’élaborer des politiques de conservation et d’archivage homogènes et exhaustives dans différents pays, secteurs et organisations. Ils peuvent également contribuer à l’élaboration de nouvelles normes et à l’évaluation de l’applicabilité et de l’utilité des normes existantes ou en projet pour tous les aspects du records management.

Ces principes prolongent ceux qui avaient été proposés par InterPARES 1 selon trois axes clés410. Premièrement, et c’est le point le plus important, ils fixent des principes pour la production de documents du point de vue du producteur. Deuxièmement, par la double perspective adoptée (producteur et service d’archives en charge de la conservation), ils structurent les relations entre ces deux acteurs. Cette relation consiste en un transfert graduel de la responsabilité des documents du producteur au service d’archives411. Si l’idée d’une responsabilité mobile n’est pas nouvelle, les principes définissent les conditions et les modalités d’un transfert efficace. Troisièmement, les principes envisagent les documents issus de trois environnements (les arts, les sciences et l’administration) et produits dans des systèmes dynamiques, expérientiels ou interactifs. Leur périmètre d’application en termes d’organisations et de systèmes est dès lors plus large que les principes stratégiques établis par InterPARES 1 qui étaient dérivés des pratiques observées dans des administrations publiques où les politiques de records management sont les plus abouties.


371 Traduction de « Part VII – Structuring the Relationship between Records Creators and Preservers » : traduction des pages 309-310 (Introduction), 310-311 (Team objective) et 312-327 (Research Methodology)
372 Les auteurs remercient tous les membres de l’équipe Stratégie et orientations pour leur contribution à l’élaboration de ce document. Leurs remerciements vont tout particulièrement à Mahnaz Ghaznavi, Ken Hawkins et Tracey Lauriault pour leur travail sur le texte et leurs conseils. Toute erreur ou omission serait de la seule responsabilité des auteurs.
373 Luciana Duranti et al., « Part Four – An Intellectual Framework for Policies, Stratégies and Standards : Strategy Task Force Report », note 1, in The Long Terme Preservation of Authentic Electronic Records : Findings of the InterPARES Project, Luciana Duranti, ed. (San Miniato, Italie : Archilab, 2005), 118. Une version en ligne est disponible à l’adresse suivante : http://www.interpares.org/book/interpares_book_g_part4.pdf.
374 Voir par exemple un procès récent aux États-Unis, William v. Sprint/United Mgmt. Co., 230 F.R.D. 640 (D. Kan. 2005), en ce qui concerne la recevabilité des métadonnées. https://ecf.ksd.uscourts.gov/cgi-bin/show_public_doc?2003cv2200-3410.
375 Susan Gutman, Luke Meagher et Adele Torrance (2006), « InterPARES 2 Project – Copyright Policy Annotated Bibliography, Draft Version 4 ». Voir : http://www.interpares.org/display_file.cfm?doc=ip2(biblio)_copyright-annotated.pdf.
376 Pour les procédures concernant les services d’archives, voir le rapport de l’équipe thématique 3, « partie IV : Méthodes d’évaluation et de conservation » et les Principes directeurs à l’usage des services d’archives en annexe 21. Pour les procédures concernant les producteurs, voir le rapport de l’équipe thématique 1, « Partie 2 : Production et maintenance des documents d’archives » et les Principes directeurs à l’usage des producteurs en annexe 20.
377 Voir Luciana Duranti (2001), « International Research on Permanent Authentic Records in Electronic Systems (InterPARES) : Exepriential, Interactive and Dynamic Records », SSHRC MCRI InterPARES 2 Project Proposal, 412-2001, 1.1-7. Voir http://www.interpares.org/display_file.cfm?doc=ip2_detailed_proposal.pdf.
378 InterPARES 2 Policy Cross-domain Methodologies. Voir http://www.interpares.org/ip2/ip2_policy.cfm.
379 Gutman et al., « Copyright Policy Annotated Bibliography », op. cit.
380 Malcolm Todd (2005), « InterPARES 2 Project – Policy Cross-domain : Information Policy – Privacy Report ». Voir http://www.interpares.org/display_file.cfm?doc=ip2(policy)privacy_report.pdf. Les principaux articles sont : Livia Iacovino et Malcolm Todd (2007), « The Long Term Preservation of Identifiable Personal Data : A Comparative Archival Perspective on Privacy Regulatory Models in the European Union, Australia, Canada and the United States », Archival Science 7(1) : 107-127 ; et Malcolm Todd (2006), « Power, Identity, Integrity, Authenticity and the Archives : A Comparative Study of the Application of Archival Methodologies to Contemporary Privacy », Archivaria 61 (Printemps) : 181-214.
381 Jim Suderman, Fiorella Foscarini et Erin Coulter (2005), « InterPARES 2 Project – Archives Legislation Study Report ». Voir http://www.interpares.org/display_file.cfm?doc=ip2%28policy%29archival_legislation_study_report.pdf. Les pays étudiés sont l’Australie, le Canada (ainsi que les lois provinciales de Nouvelle Écosse, Québec, Manitoba et Colombie Britannique), la Chine, l’Union européenne, la France, Hong Kong, l’Italie, Singapour et les États-Unis. Les études correspondantes sont consultables sur le site web d’InterPARES 2 : http://www.interpares.org/ip2/ip2_documents.cfm?cat=policy.
382 Luciana Duranti (2005), « InterPARES 2 Project – Policy Cross-domain : Authenticity and Authentication in the Law ». Voir http://www.interpares.org/display_file.cfm?doc=ip2(policy)authenticity-authentication_law.pdf. Les études correspondantes sont consultables sur le site d’InterPARES 2 : http://www.interpares.org/ip2/ip2_documents.cfm?cat=policy.
383 Heather MacNeil et al., « Part One – Establishing and Maintaining Trust in Electronic Records : Authenticity Task Force Report », in Duranti, Long Term Preservation, op. cit., 19-65. Voir : http://www.interpares.org/book/interpares_book_d_part1.pdf.
384 Evelyn Peters McLellan (2006), « InterPARES 2 Project – General Study 11 Final Report : Selecting Digital Formats for Long-Term Preservation ». Voir http://www.interpares.org/display_file.cfm?doc=ip2_gs11_final_report_french.pdf (en français).
385 Dans la base de données terminologique d’InterPARES 2, le « records management » est défini comme « l’ensemble des principes, politiques, règles et stratégies, utilisés par le producteur qui établit et maintient les contrôles administratif, intellectuel et matériel sur ses documents d’archives » et le « système de records management » comme « l’ensemble des règles gouvernant le stockage, l’utilisation, la maintenance et le sort final des documents d’archives et/ou des informations sur les documents d’archives, ainsi que les outils et les mécanismes utilisés pour mettre en œuvre ces règles. »
386 Pendant InterPARES 2, des développements importants sont intervenus dans le domaine de la pérennisation de l’information numérique, en particulier des standards ouverts. La norme ISO 19005 (voir International Organization for Standardization, ISO 19005-1:2005 – Gestion des documents – Format de fichier des documents électroniques pour une conservation à long terme - Partie I : Utilisation du PDF 1.4 (PDF/A-1)) est une spécification de format de fichier dérivée de PDF Reference, version 1.4 du logiciel propriétaire d’Adobe Systems Incorporated Acrobat (un format image avec certaines capacités textuelles). C’est un exemple encourageant de spécification de format propriétaire devenue une spécification libre après que les détenteurs des droits de propriété intellectuelle l’ont remplacée par un autre format pour leurs principaux marchés commerciaux. Dans ce cas, la propriété intellectuelle sera gérée par l’ISO pendant cinquante ans. Fin 2006, Microsoft a annoncé que les futures versions de la suite logicielle Microsoft Office, à compter de la version 2007, pourraient enregistrer des documents XML en « Open Office XML » (ou OOXML), format de fichier créé par Microsoft pour le stockage des documents numériques. Le format a été validé comme standard par l’Ecma (European Computer Manufacturers Association) International avec le nom Ecma 376 en décembre 2006, qui a depuis été soumis pour adoption au processus ISO/IEC JTC 1. Une distinction importante doit être établie du point de vue archivistique entre les standards « sectoriels » largement adoptés et ceux qui sont réellement ouverts : des dépendances vis-à-vis de l’environnement informatique actuel peuvent exister tant pour le contenu des documents que pour leurs métadonnées aux niveaux de l’encodage/la syntaxe, du fichier informatique, de l’application et de la base de données et du matériel informatique. Les chercheurs de l’équipe Stratégie et orientations qui ont élaboré le système MADRAS (Metadata and Archival Description Registry and Analysis System) ont travaillé avec le groupe de travail chargé, au sein de l’ISO Technical Committee 46/Sub-Committee 11, de rédiger la troisième partie de la norme ISO 23081 – Information et documentation – processus de records management – métadonnées des documents d’archives. MADRAS est un outil créé en vue de renforcer la visibilité des schémas de métadonnées de records management et d’archives et pour faciliter la comparaison des schémas avec d’autres référentiels/normes existants. De la même manière, à l’automne 2006, le projet a fait une soumission dans le cadre de la révision de la norme ISO 14721, l’Open Archives Information System Reference Model. Parmi les études de cas, c’est dans la sphère scientifique que l’adhésion la plus large à des normes de production des documents a été observée, en particulier dans les études de cas n° 6 et n°19. Plusieurs des études de cas conduites dans la sphère de l’administration ont mentionné des normes/standards en réponse à des questions des chercheurs mais ils ne sont soit pas pertinents en termes de conditions requises pour la gestion et la conservation des documents d’archives soit pas mis en œuvre (par exemple, la norme ISO 15836:2003 – Information et documentation – jeu de métadonnées Dublin Core a été citée souvent).
387 Luciana Duranti et Kenneth Thibodeau (2006), « Le concept de document d’archives dans les environnements interactifs, expérientiels et dynamiques : le point de vue d’InterPARES », Archival Science 6(1) : 13-38. Voir l’annexe 2.
388 Voir Kenneth Hawkins (2006), « InterPARES 2 Project – Cas Study 19 Diplomatic Analysis : Preservation and Authentication of Electronic Engineering and Manufacturing Records » ; le document est disponible à l’adresse suivante: http://www.interpares.org/display_file.cfm?doc=ip2_cs19_diplomatic_analysis.pdf. Voir également Kenneth Hawkins (2006), « InterPARES 2 Project – Case Study 19 Final Report : Preservation and Authentication of Electronic Engineering and Manufacturing Records », 14, 18. Le document est disponible à l’adresse suivante : http://www.interpares.org/display_file.cfm?doc=ip2_cs19_final_report.pdf.
389 Une valeur sémantique pouvant être dérivée de la compréhension des relations entre entités documentaires (par exemple, un registre avec une série de documents et les documents eux-mêmes), les modèles de données et de systèmes, les taxonomies spécifiques à des domaines et les modèles et spécifications d’urbanisation informatique pourraient constituer des entités supplémentaires dignes d’intérêt.
390 Voir le rapport de l’équipe transversale Modélisation, « Partie 5 : Modéliser la production, la maintenance et la conservation des documents d’archives ».
391 Voir le rapport de l’équipe thématique 1, « Partie 2 : Production et maintenance des documents d’archives ».
392 La conclusion que la conservation des documents d’archives numériques doit débuter au stade de leur production est commune à la plupart voire à tous les travaux conduits dans ce domaine. Cette conclusion est détaillée dans InterPARES 1 et dans les principes stratégiques du projet : « … la conservation de documents d’archives numériques authentiques est un processus continu qui débute avec le processus de production des documents... » (Duranti et al., « Strategy Task Force Report », op. cit. 4).
393 Définition du « document d’archives » figurant dans la base de données terminologique d’InterPARES 2.
394 Certaines organisations ont été poursuivies pour des sommes considérables alors que d’autres organisations similaires continuent d’ignorer le risque.
395 Suderman et al., « Archives Legislation Study Report », op. cit., 24.
396 Voir la norme ISO 15489-1:2001 – Information et documentation - « records management » - Partie 1 : Principes directeurs.
397 Rapport de l’équipe thématique 1, op. cit., 89, 91, 92.
398 Voir Duranti et Thibodeau, « Le concept de document d’archives », op. cit.
399 Rapport de l’équipe thématique 1, op. cit., , 91.
400 Ce concept de « seconde vie non marchande » a été défini par le juriste Lawrence Lessing comme la période qui débute lorsque le copyright s’éteint et que le contenu peut être réutilisé. Voir Lawrence Lessing, Free Culture (Penguin Press, 2004) et « The Coming of Copyright Perpertuity », New York Times, 16 janvier 2003, p. A28.
402 Suderman et al., « Archives Legislation Study Report », op. cit., 30.
403 Les études de cas conduites au cours des phases 1 et 2 d’InterPARES émanaient de différents pays et différents systèmes juridiques. Pour les études consacrées à des enjeux spécifiques, comme l’authenticité, voir les études du thème transversal Stratégie et orientations résumées plus haut dans la section Méthodologie de recherche.
404 Le lien avec les pratiques de records management des particuliers/individus réside dans leur relation avec les organisations ; les principes directeurs pour la gestion et la conservation des documents établis à leur usage par InterPARES figurent dans les « Principes pour l’élaboration de politiques... » (voir en annexe 19).
405 Suderman et al., « Archives Legislation Study Report », op. cit., 31.
406 Ibid., 31-32.
407 Voir l’annexe 20.
408 Rapport de l’équipe thématique 3, « Partie 4 : Méthodes d’évaluation et de conservation », 178-179.
409 Voir l’annexe 21.
410 Voir Duranti et al., « Strategy Task Force Report », op. cit.
411 La théorie de la responsabilité mobile a été développée il y a plusieurs dizaines d’années au Royaume-Uni par Felix Hull. Elle reconnaissait que le records manager et l’archiviste travaillaient ensemble tout au long du cycle de vie des documents, mais que les responsabilités du records manager diminuaient progressivement à mesure que celles de l’archiviste augmentaient.