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Édition critique des carnets de prison et de la correspondance privée d’Henri Delescluze à Belle-Île (1851-1853)

Archives nationales, 494AP/1, dossier 4 : carnet 1, page 53 : cliquer pour consulter l’image avec la visionneuse des Archives nationales
Archives nationales, 494AP/1, dossier 4 : carnet 1, page 53

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Sans cesse tu vécus, ainsi qu’elle abreuvée.
Sois bénie, ô ma mère ! En ton âme éprouvée
Gît un trésor d’amour. Ses doux rayonnements
Ont souvent consolé dans ses déchirements
Mon pauvre cœur brisé par les luttes humaines.
Et alors, attiré par ces lueurs soudaines,
Meurtri, je revenais me mettre à tes genoux,
Où je retrouvais pour moi ton regard le plus doux.
Tu cachais en ton cœur des décrets de tendresse
Qui savaient par un mot adoucir ma détresse.
Tu pleurais au récit de mes folles douleurs,
Sur mes rêves déçus ta main jetait des fleurs !
Écoute, mère, écoute, il me vient dans la tête
Un bien vieux souvenir - c’était aussi ta fête,
Comme aujourd’hui, le ciel était étincelant,
Les oiseaux se taisaient et le soleil brillant
Colorait en or mat la campagne haletante ;
et les fleurs se penchaient sous l’haleine brûlante.
Nous étions réunis tous au fond du jardin,
Sous un berceau couvert de vigne et de jasmin.
J’étais bien jeune alors, j’avais dix ans à peine.
Cet âge heureux, ma mère, où la vie est sereine,
Où l’horizon s’étend comme un champ de fruits mûrs.
Aux aspects célestes, aux parfums les plus purs.
J’avais appris par cœur cette fable touchante
Du loup et de l’agneau 1 . Comme une voix qui chante,