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Édition critique des carnets de prison et de la correspondance privée d’Henri Delescluze à Belle-Île (1851-1853)

Biographie d’Henri Delescluze > La famille et les années de jeunesse

Henri  Delescluze, troisième enfant de Charles-Étienne  Delescluze et de Marie Reine Victoire  Lavenant, est né à Dreux le 23 avril 1819. Une dizaine d’années le séparent de sa sœur Azémia (1808-1876) et de son frère Charles (1809-1871). La famille Delescluze appartient au début du XIXe siècle à la petite notabilité drouaise, le père étant nommé en 1807 commissaire de police de la ville, grâce à la protection de son beau-frère Louis  Lavenant, baron d’Empire qui avait fait fortune par un mariage avantageux. Charles-Étienne perd son emploi en 1831, et la situation de la famille, qui s’installe l’année suivante à Paris, ne fait que se dégrader par la suite. En effet, les activités politiques de Charles  Delescluze, qui se trouve dès 1832 sur la barricade de Saint-Merri, et les mauvaises relations de la famille avec Lavenant conduisent ce dernier à rompre tout lien avec les Delescluze.

Charles  Delescluze, journaliste en Belgique puis à Valenciennes, devient alors le seul soutien de sa famille. Les multiples vertus de ce frère modèle, tout entier voué à la propagation des idées républicaines, en font une figure dominante pour son frère cadet. Mais ce dernier apparaît, dans la correspondance familiale des années 1840, comme un fils prodigue », frivole, inconscient et désordonné. Henri  Delescluze mène une vie légère, se crée des dettes importantes et tente de tromper dans les distractions l’ennui d’un emploi de bureau mal payé chez Gondouin, Levainville & fils, entreprise générale des services de l’Hôtel royal des Invalides (sorte de sous-traitant chargé de la gestion matérielle de cette institution). À Charles, on rapporte avec désapprobation les inconduites d’Henri : Henri est toujours le même, il ne sait ni ménager ni ses effets, ni faire un bon usage de son argent, il est au moins 27 jours sur 30 sans un sou, lui écrit son père en 1844 ; il n’a pas donné, ainsi qu’il le pratique depuis longtemps, une obole à la maison, quoiqu’il connût notre position. Et six jours après [qu’il a reçu son mois], il n’avait plus rien, nous pensons qu’il conduit au bal et festin une grisette qu’il fréquente. Dans peu, ses vingt-cinq ans vont sonner, et il agit comme un étourdi de 14 à 15 ans,  lit-on un peu plus loin 1 .

En janvier 1847, Henri  Delescluze épouse la « grisette » en question, Anastasie  Guiard, qui porte son enfant (Henriette, qui naîtra en avril), au grand désespoir de sa famille. Résumant la décennie qui vient de s’écouler, sa mère écrit à Charles en 1848 : Ce malheureux garçon ne nous a fait que du mal, et nous a pas donné une heure de satisfaction 2 .