Description matérielle du corpus édité > Structure d’un carnet
a. Page de titre
Le premier carnet n’a pas de page de titre. Ce n’est qu’à partir du deuxième carnet que l’on voit apparaître une ébauche d’intitulé. La page de titre porte alors le numéro du carnet, le titre « Éphémérides », les dates extrêmes des notes du carnet, les adresses de résidence d’Henri Delescluze durant la rédaction du carnet, la signature d’Henri Delescluze.
Le numéro du carnet dans le coin supérieur droit du premier carnet est un ajout fait avec l’encre délayée ou fabriquée par Henri Delescluze lui-même au moment où il a décidé d’ordonner ses carnets. Le numéro remplace ici la page de titre.
b. Organisation du texte des carnets
Emplacement de la date
La structure des pages s’est fixée assez vite, dès l’écriture des deux premières pages. D’emblée, Delescluze date son carnet. Ainsi, les dates des deux premiers jours, dont les évènements ont été retenus par Delescluze (le 30 novembre 1851 et le 14 janvier 1852 ), sont écrites à gauche de la page.
Ensuite, Delescluze écrit les dates au milieu de la page.
Pour la rapidité d’écriture, Delescluze ne retient que le quantième du mois. C’est le cas du 29 janvier 1852.
Pour distinguer les dates du reste du texte, Delescluze les encadre entre deux traits horizontaux à partir du 29 janvier 1852 (voir ci-dessus).
À partir du vendredi 13 février 1852, la présentation de la date est stabilisée. La première date de la nouvelle page est présentée au format « nom du jour / quantième du jour / nom du mois / année ». Les autres dates de la même page sont présentées en abrégé : «nom du jour / quantième du jour ».
La mise en page du texte
À première vue, la mise en page du carnet impressionne par l’extrême densité du texte. Delescluze s’évertue, au moyen d’une écriture fine, à remplir toute la page sans laisser aucun espace.
La densité du texte est probablement un moyen d’économiser les matériaux. Les premières pages du carnet comportent beaucoup de mentions ayant trait aux dépenses. Delescluze note soigneusement la somme à sa disposition, les produits achetés avec leur prix, la somme totale des dépenses du jour et le reliquat. Ce soigneux contrôle des dépenses témoigne des difficultés financières de Delescluze et de ses tentatives pour économiser par tous les moyens. La densité du texte écrit peut aussi s’expliquer par l’ajout de mentions non pas le jour de l’évènement, mais le jour suivant.
c. Signes et dessins du carnet
Analyse
Signes de structuration du texte
La densité du texte a poussé Delescluze à recourir à de nombreux signes graphiques pour mieux structurer les informations. Ainsi, comme nous l’avons signalé, de longs traits horizontaux encadrent les dates. Nous avons répertorié dans un tableau tous les signes de structuration du carnet.
Dans la plupart des cas, il s’agit de petits tirets, de traits de longueur différente ou de lignes droites ou courbes. Ainsi, pour séparer deux blocs du texte, Delescluze peut mettre de petits tirets entre eux au milieu de la page. Les cas les plus représentatifs sont les extraits de recettes de fabrication d’encre et de papier, déjà mentionnés.
Pour relier les informations entre elles, Delescluze utilise des traits de conduite. C’est le cas dans les comptes où les lignes servent à relier les produits avec leurs prix. Delescluze utilise aussi des accolades pour totaliser les dépenses d’un même jour.
Delescluze emploie aussi les traits de justification en fin de phrase.
Signes de traitement d’information
D’autres signes aident au repérage dans le texte. Ainsi des petits tirets dans les énumérations.
En encadrant avec des tirets ou le signe « égal » un mot ou une phrase, Delescluze met en valeur les informations écrites. De cette façon, il peut aussi attirer l’attention sur la phrase, si elle est ajoutée ou n’est pas facilement repérable dans le texte à cause de son emplacement.
Pour attirer l’attention sur une mention ultérieure difficile à repérer dans le texte, ou pour mettre en valeur un mot ou un membre de phrase quelconque, Delescluze utilise de simples soulignements de texte. Ainsi, la phrase « Wrotte to minister » du 28 janvier 1852 est un ajout postérieur écrit à droite de la date. Delescluze l’a soulignée pour la repérer facilement dans le texte.
Un signe spécial de traitement de l’information
Certains signes sont propres au carnet d’Henri Delescluze, dont un récurrent. Il s’agit d’une croix pointée ou astérisque utilisée 64 fois dans le texte pour signaler la correspondance écrite ou reçue.
On trouve aussi cette croix pointée devant les évènements importants pour Delescluze, par exemple, son moral, sa santé ; les arrivées, départs, bannissements ou libérations de détenus ; les dîners et échanges avec les autres détenus ; les communications avec le directeur de la prison ; son déménagement (une seule fois).
À trois reprises, la croix pointée a été utilisée sans raison apparente : le dimanche 29 février 1852 une croix pointée est placée au milieu de la page et le lundi 8 mars 1852 une croix a été inscrite à côté du mot « Money » (Carnet 1, page 6). S’agit-il d’une réception d’argent ? Enfin, le 17 juillet 1852 une croix pointée est insérée entre les mots « Nothing » et « Un paquet de tabac ». Delescluze voulait-il signaler l’achat du tabac ou voulait-il noter quelques autres informations et mis une croix pour les signaler ? (Carnet 1, page 50)
L’iconographie des carnets.
Outre les signes particuliers, le texte du carnet contient quelques dessins. Nous avons repéré deux types. Quatre dessins de petits casques figurent aux pages 9, 10 et 11 du premier carnet. Nous n’avons pas réussi à identifier leur signification chacun accompagnant des informations de nature différente. Le premier est en face du mot « Nothing » signifiant qu’il n’y avait rien d’important à mentionner le 29 mars 1852.
Le deuxième casque est dessiné le 2 avril 1852, à la fin d’une phrase sur la lecture d’une préface de Langlois à Delescluze et ses codétenus (Carnet 1, page 9). Le troisième est dessiné le jour suivant, à la fin d’une note sur la conversation de Delescluze avec le directeur de la prison au cours de laquelle a été discutée la possible mise en liberté de Delescluze. Cette discussion n’a cependant rien apporté, comme le laisse entendre le « Nothing » qui suit (Carnet 1, page 10). Enfin, le quatrième casque est tracé le 10 avril 1852, encore une fois en face du mot « Nothing » (Carnet 1, page 11).
Nous voyons que trois fois sur quatre Delescluze a utilisé le dessin du casque en relation avec le mot « Nothing ». S’agit-il d’informations que Delescluze voulait cacher à d’autres gens et dissimuler sous la forme d’un moyen mnémotechnique ?
Le deuxième type de dessin est la représentation d’un concombre de mer, ou holothurie, que Delescluze a vu le 22 septembre 1852 au cours d’un bain de mer des détenus. Delescluze en a noté la description et l’a dessiné.
- Tableau analytique des signes graphiques des carnets
La densité du texte a poussé Delescluze à recourir à de nombreux signes graphiques pour mieux structurer les informations. Ainsi, comme nous l’avons signalé, de longs traits horizontaux encadrent les dates. Nous avons répertorié dans un tableau tous les signes de structuration du carnet.
| Numéro du signe (ordre libre) | Description de signe | Rôle du signe |
|---|---|---|
| 1 | Longs traits horizontaux mis de chaque côté des dates du jour | Marquer le début du nouveau jour |
| 2 | Tirets | Séparer les différents passages du texte entre eux |
| 3 | Traits de justification | Marquer la fin de la phrase ; mettre les lignes en cohérence structurelle entre elles |
| 4 | Traits de conduite | Ils sont utilisés uniquement dans les dépenses ; relient le nom du produit et son prix |
| 5 | Accolades | Elles sont toujours utilisées pour les dépenses ; réunissent les dépenses du même jour entre elles |
| Numéro du signe (ordre libre) | Description du signe | Rôle du signe | Fréquence du signe (si nécessaire) |
|---|---|---|---|
| 1 | Croix pointée |
|
108 |
| 2 | Signe égal mis d’un ou de deux côtés du mot ou de la phrase |
|
- |
| 3 | Tiret |
|
- |
| 4 | Carrés, rectangles ou cercles qui entourent les phrases ou les mots | Mettre en valeur les informations écrites | 3 |
| 5 | Soulignement des mots ou des phrases par un ou deux traits | Mettre en valeur les informations écrites | - |
| 6 | Traits horizontaux avec deux tirets verticaux au milieu | Signaler la répétition de l’information de la phrase précédente ou écrite au-dessous | - |
| 7 | Petit cercle au point à l’intérieur entre les barres | Mettre en valeur l’information écrite | 1 |
| 8 | Dièse | Mettre en valeur l’information écrite | 1 |
| 9 | Dièse pointé | Une fois (carnet 1, notes du Mardi 27 avril 1852) ce signe lie les informations et les ajouts postérieurs ; il peut aussi servir pour marquer les informations (carnet 2, notes du mercredi 5 Janvier 1853). | 2 |
| 10 | Simple croix | Mettre en valeur les informations écrites | 3 |
| 11 | Plusieurs lignes de points | Mettre en valeur les informations écrites | 1 |
| Numéro du dessin (ordre libre) | Description du dessin | Rôle du dessin | Fréquence du dessin (si nécessaire) |
|---|---|---|---|
| 1 | Petit casque | Rôle non attribué | 4 |
| 2 | Holothurie | Représentation visuelle de l’objet décrit | 1 |