École nationale des chartes » Elec » La langue des actes

La Flandre au Moyen Âge

Un pays de trilinguisme administratif

Professeur à l’université de Gand, Vakgroep Middeleeuwse Geschiedenis, Blandijnberg 2, B–9000 Gent. therese.deHemptinne@UGent.be

Professeur émérite à l’université de Gand, Vlieguit 14, B–9830 Sint-Martens-Latem. walter.prevenier@pandora.be

Le plurilinguisme dans la vie publique et dans l’administration des comtes et des villes de Flandre est le résultat de l’existence d’une multitude de destinataires et de la diversité sociale et intellectuelle des auteurs d’actes (clercs, nobles, citadins). Chaque groupe cultivait des traditions spécifiques, des compétences spécifiques, des besoins spécifiques. Le latin, d’usage littéraire, scientifique et diplomatique exclusif avant 1200, demeura important à la chancellerie des princes, dans la bureaucratie intérieure des institutions ecclésiastiques, chez les notaires. Le français, d’usage littéraire dans les cours princières et dans le milieu noble, fut aussi langue des élites urbaines en Flandre et des hommes d’affaires pour le commerce international. Le néerlandais, enfin, fut en usage dès la participation (au cours du XIIIe siècle) d’une nouvelle élite bourgeoise, des femmes et du petit peuple à la consommation de littérature et à la production et l’utilisation de documents. Dans la plupart des villes, les trois langues furent maniées simultanément, répondant aux besoins parallèles de plusieurs publics et en fonction de plusieurs objectifs. Les contrastes et les préférences dans l’usage des langues, d’une ville à une autre, ne sont pas conditionnés par la langue maternelle en usage sur place, car, pour la très grande majorité de la population de Flandre, cette langue est partout le néerlandais, et pourtant le français et le latin y sont bien présents. La diversité doit être attribuée plutôt à quelques variables, dont l’émancipation socio-économique et socioculturelle précoce ou tardive, les stratégies commerciales et politiques de groupes d’intérêt, l’usage volontaire du français, comme langue de prestige social, par les élites urbaines, imitant la vie de la cour comtale, la spécificité économique des villes.

La prédominance du latin avant 1200

Au commencement était le latin, partout et pour tout ce qui concernait la communication par écrit, tant dans l’enseignement secondaire et universitaire que dans la vie des clercs, tant pour les activités littéraires que dans la pratique de toutes les sciences, tant dans les chancelleries des princes que dans les secrétariats des villes, en Flandre comme partout en Europe. Dans chacune de ces institutions et chacun de ces secteurs dominaient le langage et les codes socioculturels du clergé, qui pratiquement monopolisait l’infrastructure globale de la culture écrite. Au moins jusque vers 1200 la prédominance du latin était quasi totale. Elle était évidente pour la production de documents concernant la gestion domaniale dans les abbayes et les chapitres, ainsi que dans l’administration des princes, dont le chancelier et le personnel étaient des clercs sans exception. Avant le milieu du XIIIe siècle en Flandre, même les échevins des villes formulaient en latin les rares actes urbains, précoces, qui nous sont parvenus. C’est en latin que les échevins de Gand émettent les premiers actes échevinaux connus en 1147 et en 1200 et qu’ils corroborent un acte privé en 11691 ; de même pour les échevins de la « ville » d’Ename vers 1150, ceux de Tournai en 1160, d’Ypres en 1170 et 11872.

L’introduction du français et du néerlandais : contexte culturel

L’introduction des langues vernaculaires (le français et le néerlandais) dans la communication écrite par les agents de la vie culturelle dans les anciens Pays-Bas méridionaux se situe au milieu du XIIe siècle, tandis que les acteurs de la bureaucratie démarrent ce processus un peu plus tard, à la fin de ce siècle3. C’est d’abord le français qui est devenu la « lingua franca » pour les milieux de cour et de la noblesse, et cela à cause de son rayonnement international en Europe et au Proche Orient4. On observe l’usage du français littéraire à la cour de Flandre dès le milieu du XIIe siècle. Il est intéressant de constater qu’une femme, Laurette d’Alsace, demi-sœur du comte Philippe, en est l’instigatrice5. À l’occasion de fêtes organisées à cette même cour vers 1169, Philippe d’Alsace avait commandé des pièces en français à un jongleur anonyme, ensuite au trouvère réputé Chrétien de Troyes6. En ce qui concerne les villes, c’est Arras (qui à cette époque appartenait au même comte de Flandre) qui emportait la palme de la précocité. Vers 1190 ses échevins patronnaient déjà des confréries de jongleurs pour qu’ils donnent des spectacles dans la langue des élites et du commun de la ville, et plus tard ils procuraient une audience enthousiaste à Adam de la Halle et à d’autres critiques de la vie urbaine7. Entre 1248 et 1261, le duc de Brabant Henri III, poète lyrique lui-même, son épouse Adélaïde de Bourgogne et leur cour se divertissaient des oeuvres de poètes francophones, tels l’Arrageois Gilbert de Berneville, Jean Érart et surtout Adenet le Roi, ménestrel du duc ; à la mort d’Henri III ce dernier passa au service du comte de Flandre Guy de Dampierre, tandis que la duchesse douairière commissionnait probablement le roman de chevalerie français Sone de Nansay8.

L’introduction de la littérature néerlandophone s’effectue avec un peu de retard par rapport au français, bien que le plus ancien manuscrit conservé en ancien néerlandais, le « Saint-Servais » d’Henri van Veldeke, date de vers 1175. Cet auteur de la région mosane et du Bas-Rhin est non seulement lié aux cours des comtés de Looz (la comtesse Agnès était sa patronne) et de Clèves (dans l’épilogue de son roman d’Enée il remercie la comtesse[-douairière Adélaïde de Sulzbach] pour sa largesse), mais aussi à celle de Brabant9. On peut observer à nouveau que ce sont des femmes qui sont à l’origine de ces œuvres en langue vernaculaire. À la cour comtale de Flandre, des textes littéraires en cette langue ne semblent avoir été introduits qu’entre 1238 et 1244 sous la comtesse Jeanne, à la cour de Brabant – hormis l’hypothétique origine brabançonne du Van den bere Wisselau, cela se passait sous Jean Ier (1267-1294), à celle des comtes de Hollande sous Florent V (1266-1296)10.

Français et néerlandais dans les chartes

Dans la production de chartes et autres documents administratifs, on constate le même processus, mais avec un net retard vis-à-vis de la production littéraire. En ce qui concerne l’ancien français administratif, les Pays-Bas méridionaux, et particulièrement la zone frontalière entre le Hainaut et la Flandre (située aux confins de la frontière linguistique), sont à la pointe de l’introduction de la langue d’oïl. L’acte le plus ancien en cette langue est la charte-loi de Chièvres en Hainaut de 1194. En 1204 suivait, avec un acte original en bonne et due forme, la ville de Douai en Flandre wallonne11. Le Brabant ne suit qu’en 1237, avec une charte de l’abbaye d’Afflighem, dans la partie néerlandophone du duché, mais destinée à un prieuré situé dans le Brabant wallon12. En dehors du milieu urbain, l’emploi du français administratif a été également assez précoce dans les familles nobles, avec des actes dès 121913.

En ce qui concerne l’emploi diplomatique du néerlandais, le vernaculaire s’installe d’abord dans les documents de gestion, tels un registre des échevins d’un domaine rural de l’abbaye de Saint Bavon à Gand de 1210-1239 où apparaissent des morceaux de phrases en néerlandais, et les statuts de la léproserie de Gand de 1236, entièrement en moyen néerlandais14. La plus ancienne charte en bonne et due forme rédigée en cette langue est produite par les échevins de la paroisse rurale de Boekhoute-Velzeke, près d’Audenarde, en mai 124915. Si l’on est en droit de s’étonner devant la précocité de telles petites communautés rurales, et devant l’absence des échevinats des grandes villes dans ce panorama, il faut se rappeler que les grands centres urbains, Bruges et Gand, ont été victimes d’incendies dévastateurs, respectivement en 1280 et 1297. En Brabant, l’apparition des premières chartes en néerlandais, en 1266-1267, se situe également dans les échevinages ruraux, tandis que les grandes villes continuent à employer le latin16. Il n’est sans doute pas trop téméraire d’expliquer l’apparition précoce du vernaculaire dans les statuts des institutions sociales urbaines, telles les léproseries et hôpitaux, par l’argument que dans ce secteur social l’usage de la langue des laïcs et plus particulièrement des femmes (qui jouaient un rôle essentiel dans ces institutions) était encore plus nécessaire que dans les administrations locales, où seuls des hommes étaient actifs. L’usage du vernaculaire dans le secteur des soins de santé s’explique par la volonté d’être parfaitement compris de tous les gestionnaires et autres acteurs impliqués17.

Les succès du vernaculaire : aspects sociaux et culturels

Des changements dans le comportement culturel ont toujours été liés à des mutations plus profondes dans la société. Le succès du vernaculaire, assez précoce dans les anciens Pays-Bas méridionaux, est sans aucun doute un épiphénomène de plusieurs processus de « démocratisation ». On peut mentionner par exemple l’accroissement sensible de l’impact, sur la décision politique, de la bourgeoisie en Flandre au début du XIIe siècle, ainsi que celui des classes populaires dans les villes dès 1297-1302. L’émancipation politique et sociale des élites urbaines est en effet perceptible en Flandre dès la crise institutionnelle de 1127-1128, quand fut brisé pour la première fois le monopole des anciennes élites nobles et cléricales. Les auteurs laïcs des chartes et des chansons des XIIe et XIIIe siècles se détournaient du latin hermétique des clercs de chancellerie et des religieux des monastères, pour aller à la rencontre des vœux et des besoins de représentants des nouvelles couches de la société, capables de lire et d’écrire, et désireux d’entendre parfaitement les termes dans lesquels les transactions concernant leurs biens étaient consignées. Ce souhait commence donc à être exaucé dès 1194 dans les anciens Pays-Bas méridionaux18.

La percée du vernaculaire en Flandre serait due à des dynamiques internes, du type « émancipation sociale », mais encore plus à des facteurs externes culturels et économiques. Dans la sphère culturelle jouaient avant tout les facteurs du comportement d’imitation et du snobisme des modes nouvelles. Le succès des trouvères de langue d’oïl à la cour de Flandre, dès 1169, est lié à la présence à cette cour de nobles hommes et femmes, dont la langue usuelle était le français. N’oublions surtout pas que Philippe d’Alsace avait des liens de parenté avec les dynasties d’Anjou-Aquitaine et de Champagne, et qu’Aliénor d’Aquitaine et sa fille Marie de Champagne à la cour de Troyes furent des promotrices enthousiastes de la poésie courtoise en vernaculaire. L’étiquette d’honorabilité et l’aspect « tendance » que ces princes et princesses conféraient à la littérature vernaculaire de leur époque explique son immense succès ultérieur dans les milieux nobles et parmi les élites des villes des Pays-Bas. Un deuxième facteur est la féminisation de la religion au XIIIe siècle, qui a provoqué la percée du vernaculaire dans les écrits destinés aux religieuses des ordres nouveaux, mais aussi aux béguines et autres femmes dévotes, alphabétisées mais ignorant le latin pour la plupart19.

Les succès du vernaculaire : milieux économiques

Le succès culturel du vernaculaire avait un pendant, au moins aussi net, dans la pratique usuelle et la communication journalière des milieux économiques. Le commerce international médiéval a fatalement provoqué l’usage de multiples idiomes sur les marchés européens. Le vocabulaire de ces marchands contenait nombre de mots de produits et de termes techniques, dans les domaines de la finance et de la comptabilité, mais aussi de la fiscalité, mots qui souvent faisaient défaut dans le latin des clercs. Cela explique l’usage fréquent, dès 1159-1164 dans le comté de Flandre, de termes isolés, français et néerlandais, dans des textes latins, comme par exemple les tarifs de tonlieu20. La plupart des marchands itinérants n’avaient guère reçu de formation (cléricale) classique. Au cours de leurs rencontres dans les villes marchandes en Europe, ils communiquaient certainement en anglais, italien, français, allemand et néerlandais. Serge Lusignan a par ailleurs démontré que au XIIIe siècle le latin n’était fonctionnel, pour les clercs, que dans leurs activités liturgiques et pastorales, et surtout dans la culture écrite. Pour la communication orale, le vernaculaire local était de rigueur, même dans l’enseignement, même à l’université de Paris21.

Quant aux foires commerciales, celles de Champagne (dès environ 1100), mais aussi les cinq foires de Flandre, dont Torhout et Messines (dès 1071-1084), Ypres (dès 1127) et Bruges (dès 1200), elles furent des endroits clefs pour l’émergence et la propagation aux XIIe et XIIIe siècles des idiomes européens comme langues écrites des milieux marchands22. Il est piquant de constater que l’influence de la cour comtale de Troyes sur l’utilisation du vernaculaire littéraire à la cour de Flandre se reflète dans celle de la foire de Troyes sur les usages linguistiques des commerçants et des administrations en Flandre. Ypres, ville de foire, avait conservé dans ses archives, jusqu’à leur destruction dans l’incendie lors de la première guerre mondiale, pas moins de 8000 chirographes d’entre 1249 et 1300. Ces chirographes consignaient les ventes conclues et les dettes faites entre marchands internationaux durant la grande foire. Pratiquement tous étaient formulés en français23. Le latin ne fonctionnait donc pas comme « lingua franca » pour le commerce international, mais c’était (selon l’endroit où l’on se trouvait et les aptitudes linguistiques dont on disposait) plutôt le français, l’italien, l’allemand des Hanséates et l’anglais qui étaient utilisés. Les commerçants de Flandre avaient en plus l’avantage intéressant de maîtriser aussi bien une langue germanique (le néerlandais) qu’une langue romane (le français), ce qui leur facilitait sensiblement la compréhension et l’interprétation d’autres langues européennes. L’abandon du latin n’a nullement handicapé les relations dans le commerce international. Comme dans certaines villes des Asturies et en Bohème, les administrateurs de villes de foire des anciens Pays-Bas se sont efforcés de créer une ambiance cosmopolite pour ceux qui venaient du dehors, de fournir l’infrastructure nécessaire pour un enregistrement efficace des contrats et lettres de créance en toutes langues, passés entre marchands de diverses régions d’Europe lors de ces foires24.

Le plurilinguisme

Le plurilinguisme dans les anciens Pays-Bas présente de multiples aspects. Les princes de Flandre et de Brabant, tenant compte de la diversité des usages linguistiques dans leurs régions, ont montré un intérêt simultané pour les deux cultures littéraires présentes sur leur territoire. La comtesse de Flandre, Jeanne (dite) de Constantinople, a commandé, entre 1238 et 1244, aussi bien une version française qu’une version néerlandaise du roman d’Aiol. En Brabant, cette double voie linguistique était encore plus prononcée25. Le plurilinguisme dans les rapports ordinaires de la vie publique et dans l’administration des comtes et des villes de Flandre était le résultat de l’existence d’une multitude d’audiences, et de la diversité sociale et intellectuelle des auteurs d’actes. Il y avait d’une part la tradition des clercs qui continuaient à préférer le latin tout au long du XVe siècle, et d’autre part celle des nobles et des bourgeois, pour qui les langues vernaculaires étaient devenues des moyens de communication écrite par excellence. Chaque groupe cultivait des traditions spécifiques, des compétences particulières, des besoins bien à eux.

L’utilisation littéraire et scientifique du latin évoluait d’un usage exclusif avant 1200, vers un usage plus restreint bien que toujours important par après, au moins dans certains secteurs26. La chancellerie des comtes de Flandre en faisait usage tout au long des XIIIe, XIVe et XVe siècles, bien que ce fût simultanément avec le français et le néerlandais. Il est difficile d’y trouver une logique interne parfaite ; la chancellerie usait du latin pour la communication interne, pour les relations avec des ecclésiastiques et des religieux (sauf certains couvents de femmes et autres béguinages), ainsi que pour la correspondance de la diplomatie internationale, mais elle évitait le latin pour les relations avec les milieux urbains et les échevinages. Jusque vers 1300, le personnel de l’administration comtale était resté fondamentalement clérical, mais après cette date les nobles, les juristes, les experts financiers et les universitaires d’origine bourgeoise y étaient introduits en grand nombre27. Les institutions ecclésiastiques restaient quant à elles fidèles au latin, l’instrument classique pour les actes et pour la comptabilité. Le latin demeurait également, jusque tard dans le courant du XVe siècle, la langue des notaires de Bruges, plus par tradition sans doute que par nécessité, car leurs documents ne concernaient le plus souvent que des compatriotes italiens28.

À première vue, on pourrait s’étonner de l’usage du latin dans un manuel d’écolier avec des modèles de lettres, rédigé à l’abbaye Saint-Pierre à Gand, à la fin du XIIIe siècle, car le contenu et la thématique de ces lettres prouvent que l’enseignement visait des bourgeois de Gand, destinés à devenir des industriels et des marchands internationaux. On peut expliquer ce paradoxe, sans doute, par le caractère clérical de l’école, mais aussi comme une indication du prestige que le latin conservait dans le système éducatif préparatoire à l’université, même si pour la majorité des écoliers l’utilité pratique de cet enseignement pour leurs activités professionnelles futures était minimale. Dans les « petites écoles », qui se multipliaient spectaculairement au XIIIe siècle, les langues vernaculaires, plus fonctionnelles pour les futurs marchands, étaient de rigueur 29.

Le français poursuivait son chemin littéraire dans les cours princières et dans le milieu noble, tandis que les élites urbaines et les hommes d’affaires l’utilisaient pour le commerce international. Le néerlandais trouvait également, surtout après 1300, une large audience à cause de la participation d’une nouvelle élite bourgeoise, des classes moyennes et du petit peuple à la consommation littéraire et à la production de documents juridiques. À Bruges, presque la totalité des actes des échevins de 1260 à 1300 est en néerlandais, tandis qu’à Ypres on se servait alors exclusivement du français pour la rédaction des actes urbains30.

Il est intéressant de constater que en Flandre à la fin du XIIIe siècle on considérait l’usage des trois langues également efficace et socialement acceptable. En effet les fameuses « lettres de doléances » que plusieurs groupes urbains (aussi bien les gens du « commun » que les classes moyennes) adressaient, entre 1275 et 1300, aux comtes pour protester contre les malversations des échevins au pouvoir, pouvaient aussi bien être rédigées en latin qu’en néerlandais ou en français31. Le choix de la langue dépendait sans doute des aptitudes intellectuelles des rédacteurs, mais il n’y a aucune trace de réactions négatives de la part du prince contre ces choix linguistiques. Les choix sont aussi déterminés par ceux à qui on s’adresse. La chancellerie des comtes s’adapte à la langue maternelle des destinataires, le français pour des familles nobles en Flandre, le néerlandais pour les actes destinés au comte de Hollande32.

L’impact des marchands

Des recherches récentes concernant les voies et moyens de communication entre marchands étrangers et milieux commerçants locaux en Flandre révèlent la flexibilité des autorités, parfaitement capables à s’adapter aux exigences linguistiques des différentes nations. Une étude d’Annelieke Carlier sur base des sentences civiles de Bruges au XVe siècle montre que les étrangers étaient jugés en néerlandais ou en français selon des critères de parenté linguistique entre les langues « germaniques » et « romanes »33. Apparemment les Hanséates, les Anglais et les Écossais comprenaient sans trop de difficultés le néerlandais local, tandis qu’on utilisait le français avec des Espagnols et des Italiens. Ces derniers étaient les moins bien intégrés à cause de leur réticence à adopter le néerlandais, mais aussi, selon Laura Galoppini, à cause de différences plus nettes de mentalité, de codes sociaux et d’étiquette34. On constate que les marchands et banquiers italiens à Bruges faisaient souvent rédiger leurs lettres, leurs accords et leurs transactions financières en latin, par des notaires qui souvent étaient eux aussi d’origine italienne, ce qui facilitait évidemment les contacts35.

L’impact de la communication sociale

Dans la plupart des villes de Flandre, les trois langues (le latin, le français, le néerlandais) étaient utilisées simultanément dans les actes, répondant à des besoins parallèles des différents destinataires et en fonction de plusieurs objectifs. À Gand, la première charte en français date de 1251, la première charte en néerlandais de 1253. À Bruges, la première charte en néerlandais est de 1262, la première en français de 1274. À Ypres, la première charte en néerlandais date de 1252-1253, la première en français de 125036. Le bilinguisme dans la confection de chartes destinées à la population locale répond à une réalité de diversité sociale. Les élites gantoises et brugeoises, bien que maîtrisant la langue néerlandaise, se distinguaient du commun par l’usage interne de la langue française, comme elles se distinguaient par beaucoup d’autres éléments de prestige social et politique, telles la possession de maisons luxueuses et bien fortifiées, l’acquisition de bijoux précieux et d’œuvres d’art, la tenue vestimentaire. Johan Huizinga a bien souligné l’impact de ces éléments de standing social37. Tout au long du bas Moyen Âge les deux langues vernaculaires restent en usage. Le néerlandais est fonctionnel pour les actions juridiques à l’intérieur de la ville, pour des transactions de la vie courante, comme les ventes, les testaments, les contrats de mariage. Le français est utile pour la correspondance entre bourgeois et princes, comme pour celle des marchands et des industriels avec les villes à l’étranger. Le français est également de rigueur pour les contacts entre les villes et l’administration comtale, surtout à l’époque bourguignonne. À cette époque, de 1384 à 1506, les représentants des ducs de Bourgogne dans les villes, les baillis et les receveurs des aides et des domaines, rédigeaient leurs comptes et leurs lettres en français, afin d’être compris par les gens de la Chambre des comptes et du Conseil ducal à Lille38. Ces gens de finance et ces légistes étaient en effet souvent d’origine bourguignonne, française, hennuyère, donc en grande majorité francophones39. Le latin reste la « lingua franca » pour les correspondances et les traités internationaux, et pour les notaires italiens établis à Bruges.

Les contrastes et les préférences pour l’usage des langues dans la communication écrite, d’une ville à une autre, ne sont pas conditionnés par la langue maternelle parlée dans ces lieux, car pour la très grande majorité de la population en Flandre flamingante cette langue est partout le néerlandais, et pourtant le français et le latin y sont bien présents. La diversité doit être attribuée plutôt à toute une série de facteurs.

Le premier est l’émancipation socio-économique et socioculturelle précoce ou tardive des villes en question. Le passage du latin au vernaculaire apparaît d’abord dans les villes économiquement dynamiques, telle Douai en 1204, tandis que des centres plus archaïques comme Bapaume, qui ne passe au français qu’en 1268, ou comme Aire-sur-la-Lys, en 1290, prennent du retard40. Dans les campagnes, le mouvement est encore plus précoce et il est ici symptomatique de changements profonds dans les rapports entre seigneurs et paysans. L’usage précoce du vernaculaire pourrait donc être un signe de l’émancipation socioculturelle et des ambitions économiques d’une population.

Un autre facteur se trouve dans la stratégie de groupes d’intérêt commerciaux et politiques. Le Gantois Jacques d’Artevelde, par exemple, écrit en français au roi d’Angleterre pour lui demander de l’aide, parce qu’il croit cet usage de bon ton vis-à-vis du monarque anglais41. Un autre facteur est l’usage volontaire du français, comme langue de prestige social, par les élites urbaines en Flandre, imitant les courtisans amateurs de littérature courtoise en cette langue. Une tout autre variable est la spécificité économique des villes : pour Ypres, ville de foire, orientée vers la France et la Champagne, nous ne disposons que d’un seul acte néerlandais sur 5500 de 1250 à 1300 ; les comptes de la ville sont rédigés en français de 1276 à 1325 et de 1325 à 1380 (ils sont en néerlandais seulement de 1325 à 1329, et finalement après 1380)42. À Bruges, ville portuaire et marchande par excellence, c’est par contre le multilinguisme qui domine, à cause de la présence de nombreuses nations étrangères.

Conclusion

Le trilinguisme administratif de la Flandre au bas Moyen Âge tire son origine de la situation du comté au milieu d’une frontière linguistique et aux confins de deux entités culturelles et politiques, l’une germanique (l’Empire), l’autre romane (le royaume de France), mais aussi de son essor économique précoce, de son urbanisation intense entraînant un processus de participation politique, économique et sociale des différentes couches de sa population aussi bien rurale que citadine.


1 . Actes échevinaux de 1147 (à noter toutefois que les auteurs de l’acte sont probablement les bénéficiaires, les abbés et couvent de Saint-Bavon) : Constant-Philippe Serrure, Cartulaire de Saint-Bavon à Gand (655-1255), [Gand, 1836-40], p. 39-40, n° 34, et Thesaurus Diplomaticus (Nouveau Wauters), n° 2292, et de 1200 : original Archives nationales, J 532/1/3 (9), édition Alexandre Teulet, Layettes du Trésor des chartes, t. I, Paris, 1863, p. 216, n. 571 ; acte privé de 1169 : Arnold Fayen, Liber traditionum sancti Petri Blandinensis, Gand, 1906, p. 189, n° 187.
2 . Ename : Ludo Milis, De onuitgegeven oorkonden van de Sint-Salvatorsabdij te Ename voor 1200, Bruxelles, 1965, p. 12-13, n° 14 , et Thesaurus Diplomaticus (Nouveau Wauters), n° 957 ; Tournai : J. Vos, Cartulaire de l’abbaye de Saint Médard ou de Saint Nicolas-des-Prés près Tournai, t. II, Tournai, 1873, p. 47, n° 24, et Thesaurus Diplomaticus (Nouveau Wauters), n° 2065 ; Ypres : Eusèbe Feys et Aloïs Nélis, Les cartulaires de la prévoté ou abbaye de Saint-Martin à Ypres, t. I, Bruges, 1880, p. 21, n° 28, et p. 28, n° 40, et Thesaurus Diplomaticus (Nouveau Wauters), n° 2345.
3 . Les rapports entre latin et langues vernaculaires et l’apparition de ces dernières dans les œuvres littéraires et dans les documents diplomatiques des anciens Pays-Bas ont fait récemment l’objet de plusieurs publications collectives : De verschriftelijking van het Nederlands, éd. Eef Dijkhof, Jan Goossens & Jozef Van Loon = Tijdschrift voor Dialectologie, 12 (1999) ; Van vader- naar moedertaal : Latijn, Frans en Nederlands in de dertiende-eeuwse Nederlanden, éd. Rita Beyers = Handelingen van de Koninklijke Zuid-Nederlandse Maatschappij voor Taal- en Letterkunde en Geschiedenis, 53 (1999) ; Skripta, Schreiblandschaften und Standardisierungstendenzen : Urkundensprachen im Grenzbereich von Germania und Romania im 13. und 14. Jahrhundert, Beiträge zum Kolloquium vom 16. bis 18. September 1998 in Trier, éd. Kurt Gärtner et al., Trèves, 2001 (Kliomedia) ; The Dawn of the Written Vernacular in Western Europe, éd. Michèle Goyens et Werner Verbeke, Louvain, 2003.
4 . À ce sujet, voir les remarques de Willy Van Hoecke sur le caractère « international » du français aux XIIe et XIIIe siècles : « De opkomst van het Frans in de oorkonden vanaf het einde van de twaalfde eeuw », Van vader- naar moedertaal…, p. 55-79, spéc. p. 71-72.
5 . Stewart Gregory, The twelfth-century Psalter Commentary in French for Laurette d’Alsace : an edition of Psalms I-L, Londres, 1990, 2 vol.
6 . Mary D. Stanger, « Literary Patronage at the Medieval Court of Flanders », French Studies, 11 (1957), p. 214-229. Concernant les rapports étroits entre Philippe d’Alsace et l’œuvre de Chrétien de Troyes, voir les publications de Michèle Vauthier, dont « Du comte de Flandre au conte du Graal à Carduel : Poésie et contre-politique du pouvoir », The Growth of Authority in the Medieval West : selected Proceedings of the International Conference, Groningen 6-9 November 1997, éd. Martin Gosman, Arjo Vanderjagt et Jan Veenstra, Groningen, 1999, p. 11-123, et « Les paradoxes du Prologue du Conte del Graal : vers de nouvelles perspectives », dans Prologues et épilogues dans la littérature du Moyen Âge, éd. Aimé Petit, Lille, 2001 (Bien dire et bien aprandre, 19), p. 225-239.
7 . Roger Berger, Littérature et société arrageoises au XIIIe siècle, Arras, 1981 ; Ursula Peters, Literatur in der Stadt, Studien zu den sozialen Voraussetzungen und kulturellen Organisationsformen städtischer Literatur im 13. und 14. Jahrhundert, Tübingen, 1983, p. 63-96.
8 . Albert Henry, L’œuvre lyrique d’Henri III, duc de Brabant, Bruges, 1948, p. 16 ; Remco Sleiderink, De stem van de meester : De hertogen van Brabant en hun rol in het literaire leven (1106-1430), Amsterdam, 2003, p. 57-73.
9 . R. Sleiderink, De stem van de meester…, p. 30-32.
10 . Sur la Flandre, Walter Prevenier, « Court and city culture in the Low Countries from 1100 to 1530 », Medieval Dutch Literature in its European Context, éd. Erik Kooper, Cambridge, 1994, p. 15-17. Sur le Brabant, Remko Sleiderink, De stem van de meester…, p. 33-36 et 75-97. Sur la Hollande, Willem Pieter Gerritsen, « Wat voor boeken zou Floris V gelezen hebben », Floris V, Den Haag, 1979, p. 77-80 ; Jan van Herwaarden, « Floris V in zijn culturele context », Wi Florens : De Hollandse graaf Floris V in de samenleving van de 13de eeuw, éd. Dick E.H. De Boer, Erik H.P. Cordfunke et Herbert Sarfatij, Utrecht, 1996, p. 259-280, spéc. p. 270-271.
11 . Maurice A. Arnould, « Le plus ancien acte en langue d’oïl : la charte-loi de Chièvres, 1194 », Hommage au professeur Paul Bonenfant, Bruxelles, 1965, p. 85-118. Sur l’acte de Douai de 1204, et sur quelques autres textes non datés de la fin du XIIe siècle, Maurits Gysseling, « Les plus anciens textes français non littéraires en Belgique et dans le nord de la France », Scriptorium, 3/2 (1949), p. 190-210 ; Willy Van Hoecke, « De opkomst van het Frans in de oorkonden vanaf het einde van de twaalfde eeuw », Van vader- naar moedertaal…, p. 56-79.
12 . Godfried Croenen, « Latin and the vernaculars in the charters of the Low Countries : the case of Brabant », The Dawn of the Written Vernacular…, p. 107-125, à la p. 110.
13 . M. Gysseling, « Les plus anciens textes français… », p. 197.
14 . Le registre de 1210-1239 a été édité par Maurits Gysseling et Adriaan Verhulst, Het oudste goederenregister van de Sint-Baafsabdij te Gent (eerste helft XIIIe eeuw), Brugge, 1964 ; le texte de 1236 par Maurits Gysseling, Corpus van Middelnederlandse teksten, tot en met het jaar 1300, Reeks I, Ambtelijke bescheiden, t. I, La Haye, 1977, p. 20-29. Une réédition des statuts de 1236, avec fac-similé et traduction en néerlandais moderne est parue en 2003 : Jacques Van Keymeulen, Marc Adriaen, Griet Maréchal, In der sieker dienste : De oudste ambtelijke tekst in het Nederlands, De statuten van de leprozerie van Gent, 1236, Gand, 2003.
15750 jaar ‘Schepenbrief van Bochoute’, éd. Johan Taeldeman et Luc Van Durme, Gand, 1999 (Studia Germanica Gandensia, 48), p. 59-75.
16 . Godfried Croenen, « Latijn en de volkstalen in de dertiende-eeuwse Brabantse oorkonden », De verschriftelijking van het Nederlands…, p. 23-26.
17 . Thérèse de Hemptinne, « De doorbraak van de volkstaal als geschreven taal in de documentaire bronnen : Op zoek naar verklaringen in de context van de graafschappen Vlaanderen en Henegouwen in de dertiende eeuw », Van vader- naar moedertaal…, p. 7-21, spéc. p. 11 et 17.
18 . En Hollande et Zélande, cela se passe au temps du comte Florent V (1266-1296) : Jan W.J. Burgers, Eef C. Dijkhof et Jaap G. Kruisheer, « De doordringing van het schrift in de samenleving in Holland en Zeeland tijdens graaf Floris V », Wi Florens…, p. 191-211. Il est toutefois à remarquer que les diplomatistes néerlandais de l’école de Jaap Kruisheer ont tenté de démontrer à plusieurs reprises que la langue vernaculaire diplomatique fut utilisée beaucoup plus tôt, notamment en Zélande et en Flandre, pour des brouillons d’actes de législation urbaine qui étaient ensuite traduits en latin et qui ont disparu. Voir à ce sujet, par exemple, Jan W.J. Burgers, « De invoering van het Middelnederlands in de dertiende-eeuwse documentaire bronnen in Holland en Zeeland », Tijdschrift voor Middelnederlandse Taal- en Letterkunde 112 (1996), p. 129-150 ; id., « Het ontstaan van de twaalfde-eeuwse Vlaamse stadskeuren », Van vader- naar moedertaal…, p. 81-99 ; Jaap G. Kruisheer, « Entstehungs- und Überlieferungsforschung und Urkundenedition : Bemerkungen anlässlich des neuen ‘Oorkondenboek van Holland en Zeeland tot 1299’ », Skripta, Schreiblandschaften…, p. 647-658, aux p. 653-654.
19 . Thérèse de Hemptinne, « De doorbraak… », p. 11 et 16.
20 . Voir le tarif de tonlieu institué en 1159-1164 par le comte Thierry d’Alsace : Adriaan Verhulst, Thérèse de Hemptinne et Lieve De Mey, « Un tarif de tonlieu inconnu, institué par le comte de Flandre Thierry d’Alsace (1128-1168) pour le port de Littersuerua, précurseur du port de Damme », Bulletin de la Commission royale d’histoire, 164 (1998), p. 143-172. Multiples exemples cités d’après des chartes du Brabant au XIIIe siècle par G. Croenen, « Latijn en de volkstalen… », p. 13-15.
21 . Serge Lusignan, Parler vulgairement : les intellectuels et la langue française aux XIIIe et XIVe siècles, Paris, 1986, p. 83-84.
22 . Adriaan Verhulst, The Rise of Cities in North-West Europe, Cambridge, 1999, p. 139-140 ; Walter Prevenier, « Urban Chanceries in the Low Countries from the Twelfth to the Fourteenth Century : the European Context », Stadt, Kanzlei und Kultur/City, Chancery, and Culture, éd. Jan R. Veenstra et Rudolf Suntrup, Münster-Groningen, 2004, p. 1-11.
23 . Guillaume Des Marez, La lettre de foire à Ypres au XIIIe siècle, Bruxelles, 1901 ; Carlos Wyffels, Analyses de reconnaissances de dettes passées devant les échevins d’Ypres, 1249-1291, Bruxelles, 1991 (Commission royale d’histoire), édition d’une des plus anciennes lettres en français, datant de 1251, à la p. 491. À Douai, les chirographes en français débutent en 1224 : René Jacob, « Du chirographe à l’acte notarié : l’instrument de la paix privée dans les villes du Nord du XIIIe au XVIe siècle », Gnomon, Revue internationale d’histoire du notariat, 1995-1996, p. 17-29.
24 . Walter Prevenier, « La production et la conservation des actes urbains dans l’Europe médiévale », La diplomatique urbaine en Europe au Moyen Âge, éd. W. Prevenier et Thérèse de Hemptinne, Leuven-Apeldoorn, 2000 (Studies in Urban Social, Economic and Political History of the Medieval and Early Modern Low Countries), p. 559-570, à la p. 569 (basé sur les rapports de Ivan Hlavácek et de Mª Josefa Sanz Fuentes).
25 . M. D. Stanger, « Literary Patronage… », p. 220-221; Evert van den Berg et Bart Besamusca, « Middle Dutch Charlemagne romances and the oral tradition of the ‘chansons de geste’ », Medieval Dutch Literature in its European Context, éd. Erik Kooper, Cambridge, 1994, p. 81-95, aux p. 86-88 ; Frank Willaert, « Hovedans : fourteenth-century dancing songs in the Rhine and Meuse area », ibid., p. 168-187, aux p. 172-175. Remco Sleiderink, De stem van de meester…, p. 233-239 (résumé en français).
26 . Pour un panorama de l’usage du latin médiéval aux Pays-Bas au XIIIe siècle, Marc Van Uytfanghe, « De “ vadertaal ” Latijn in de dertiende eeuw », Van vader- naar moedertaal…, p. 23-53.
27 . Walter Prevenier, « Officials in Town and Countryside in the Low Countries : Social and Professional Developments from the Fourteenth to the Sixteenth Century », Acta Historica Neerlandica, 7 (1974), p. 1-17.
28 . Walter Prevenier, James M. Murray et Michel Oosterbosch, « Les notaires publics dans les anciens Pays-Bas du XIIIe au XVIe siècle », Estudios sobre el notariado europeo, siglos XIV-XV, éd. Pilar Ostos et Maria Luisa Pardo, Séville, 1997, p. 69-70.
29 . Henri Pirenne, « L’instruction des marchands au Moyen Âge », Annales d’histoire économique et sociale, 1 (1929), p. 13-28 ; reproduction de quelques pages de ce manuel scolaire dans H. Pirenne, Album belge de diplomatique, Jette-Bruxelles, 1909, planche XXXI. Sur les petites écoles, Alphonsus M.J. van Buuren, « ‘Want ander konsten sijn mij te hoghe’ : De stadsschool in de Nederlanden in de late middeleeuwen », Scholing in de middeleeuwen, éd. René E.V. Stuip et Cees Vellekoop, Hilversum, 1995, p. 221-238.
30 . Mieke Leroy, « Les débuts de la production d’actes urbains en Flandre au XIIIe siècle », La diplomatique urbaine en Europe…, p. 267-279. Pour Ypres, C. Wyffels, Analyses de reconnaissances… À Bruges, les actes pour le public local sont tous en néerlandais, mais ceux qui sont destinés aux marchands étrangers sont en français : Th. de Hemptinne, « De doorbraak… », p. 19.
31 . Complainte en néerlandais à Damme en 1280 : Antoine De Smet, « De klacht van de ‘Ghemeente’ van Damme in 1280 », Bulletin de la Commission royale d’histoire, 115 (1950), p. 3-4. Texte en français à Nieuport vers 1295 : Archives générales du Royaume, Trésor de Flandre, 1re série, 867. Texte en latin à Gand en 1275 : Leopold A. Warnkoenig, Flandrische Staats- und Rechtsgeschichte bis zum Jahr 1305, Tübingen, 1836, Abt. 1, t. 2, p. 68-69.
32 . Six des sept chartes en néerlandais du comte Guy de Dampierre à la fin du XIIIe siècle sont des traités avec le comte de Hollande et Zélande : M. Gysseling, Corpus van Middelnederlandse teksten, Reeks I…, t. IV, La Haye, 1977, p. 2580, 2589-2604. De même pour la correspondance entre le comte de Flandre Louis de Male et le duc de Brabant Wenceslas, au milieu du XIVe siècle, Roland Willemyns, Het verhaal van het Vlaams : De geschiedenis van het Nederlands in de Zuidelijke Nederlanden, Antwerpen-Utrecht, 2003, p. 97.
33 . Annelieke Carlier, Taaldiversiteit in de kosmopolitische stad : Taalgebruik, migratie en integratieaspecten in Brugge in de 15de eeuw, mémoire de licence inédit (sous la direction de Th. de Hemptinne), Université de Gand, 2002, p. 151-176.
34 . Herman J. Leloux, Zur Sprache in der ausgehenden Korrespondenz des Hansischen Kaufmanns zu Brügge, thèse de doctorat inédite (sous la direction de Gilbert De Smet), Université de Gand, 1971, t. I, p. 221-310. Sur les Italiens, Laura Galoppini, Mercanti toscani e Bruges nel tardo medioevo, thèse de doctorat inédite (sous la direction de Ludo Milis), Université de Gand, 2003, p. 288-298.
35 . James M. Murray (avec la collaboration de Walter Prevenier et Michel Oosterbosch), Notarial instruments in Flanders between 1280 and 1452, Bruxelles, 1995 (Commission royale d’Histoire), p. 120-121.
36 . Reine Mantou, Actes originaux rédigés en français dans la partie flamingante du comté de Flandre (1250-1350), Liège, 1972, p. 44 (Bruges, 1274), 68 (Gand, 1251), 78 (Ypres, 1250). M. Gysseling, Corpus van Middelnederlandse teksten, Reeks I…, t. I, p. 44-49 (Gand, 1253), 50 (Ypres, 1252-1253), 76 (Bruges, 1262).
37 . Johan Huizinga, Herfsttij der middeleeuwen, 7e éd., Haarlem, 1950, p. 5 ; voir aussi Paul de Ridder, « The Use of Languages in Brussels before 1794 », Secretum scriptorum, Liber alumnorum Walter Prevenier, éd. Wim Blockmans, Marc Boone et Thérèse de Hemptinne, Leuven-Apeldoorn, 1999, p. 145-164. En Angleterre, le français connaissait un grand prestige social tout au long des XIIIe et XIVe siècles pour la juridiction, les débats politiques et la vie culturelle ; bien que en 1362 l’anglais eût été prescrit pour les débats oraux dans les cours de justice, la transcription dans les registres continua à se faire en français tout au long du XVe siècle : William Mark Ormrod, « The Use of English : Language, Law, and Political Culture », Speculum, 78 (2003), p. 772-781.
38 . Les clercs chargés de ces tâches étaient souvent bilingues et traduisaient du flamand. On lit par exemple dans un compte du domaine flamand de Herzele, en 1392 : « Au clerc qui a eu grand peine de escripre et registrer lesdites rentes, a fait que on les trouvoit et aussi a faire ces comptes par deux foiz, du flamenc en rommans, 4 £. », éd. Vera Meyhuys et Frank Daelemans, De oudste domeinrekeningen van Herzele 1386-1394, Bruxelles, 1979 (Herzele Dossier, 7), p. 88. Commentaire linguistique de ces comptes domaniaux par Reine Mantou, Herzele (1386-1394), étude linguistique des plus anciens comptes domaniaux, en français, Bruxelles, s.d. (Herzele Dossier, 10). Sur la communication entre les autorités bourguignonnes et leurs administrés flamands, Marc Boone, « ‘Doen traitieren elken Vlaminc in Vlaemscher tale’ : Talige communicatie tussen machthebbers en hun onderhorigen in het Bourgondische Vlaanderen (1385-1505) », Schatbewaarder van de Taal : Johan Taeldeman Liber Amicorum, éd. Johan De Caluwe et al., Gand, 2004.
39 . Wim Blockmans et Walter Prevenier, The Promised Lands : The Low Countries Under Burgundian Rule, 1369-1530, Philadelphia, 1999, p. 116-123.
40 . Bernard Delmaire, « La diplomatique des actes échevinaux d’Aire-sur-la-Lys au XIIIe siècle », La diplomatique urbaine en Europe…, p. 115-117.
41 . Napoléon de Pauw, Cartulaire historique et généalogique des Arteveldes, Bruxelles, 1929 (Commission royale d’histoire), p. 621-622.
42 . Guillaume Des Marez et Emile de Sagher, Comptes de la ville d’Ypres de 1267 à 1329, Bruxelles, 1909-1913, 2 vol. (Commission royale d’histoire).