L’usage des langues dans la Pologne médiévale
Université de Lublin
L’état des recherches sur les langues des documents polonais médiévaux suscite plutôt des interrogations qu’il ne permet de formuler des réponses. Les questions fondamentales portent sur le fonctionnement de différentes langues et les facteurs qui en déterminaient l’usage. C’est le latin qui domine incontestablement dans les documents du moyen âge polonais. Il ne se distingue pas foncièrement du latin pratiqué dans les pays occidentaux. L’historiographie polonaise dispose des études sémantiques sur des termes tels que comes, terra ou Deus. Leurs résultats montrent la nécessité de considérer le latin des documents dans la perspective des catégories juridiques spécifiquement polonaises et du système politique en vigueur. A partir du XIIe siècle, on rencontre des vocables isolés (anthropo- et toponymes). Au XIIIe siècle on eut recours à des dénominations polonaises afin de renvoyer précisément aux obligations imposées par l’ancien droit. Au cours du siècle suivant, on notait des phrases entières en polonais qui étaient des formules de serments. Cependant, jusqu’à la fin du moyen âge aucun texte ne fut rédigé entièrement en polonais. Il ne faut pas en chercher les raisons dans le sous-développement de la langue polonaise, mais plutôt dans la particularité du système juridique polonais dont le conservatisme ne faisait reconnaître que la valeur du latin. En dehors de la Silésie et de la Poméranie où il jouissait d’un grand succès, l’allemand était aussi en usage. Il se répandit avec l’affluence des Allemands, mais aussi sous l’influence du droit dit “germanique”. Il était aussi la langue professionnelle des marchands et des banquiers. Enfin, à partir du milieu du XIVe siècle, dans les territoires ruthènes ainsi qu’à la suite de l’union polono-lituanienne, le ruthène entre en usage. On le rencontre également dans la chancellerie des rois de Pologne. De cette façon, la Pologne constitue un carrefour non seulement linguistique, mais aussi culturel de deux cultures scripturaires différentes, latine et orientale, cultures dont les documents étaient rédigés en langue locale. Les recherches actuelles montrent la pénétration des usages latins dans les documents ruthènes. Il reste encore à démontrer que les influences avaient le caractère réciproque.