[p. 101] La diplomatique des actes échevinaux d’Aire-sur-la-Lys au XIIIe siècle
La diplomatique des actes échevinaux des villes du Nord de la France au XIIIe siècle est entièrement à constituer. Les causes de cette carence sont variées : la diplomatique princière et ecclésiastique, sans doute plus prestigieuse, attire davantage les historiens ; la quasi-absence d’actes avant le XIIIe siècle les oblige à faire de la diplomatique tardive qu’ils ne cultivent guère d’habitude ; les recueils d’actes manquent, sauf pour Douai. De façon paradoxale, la documentation est à la fois trop abondante pour ceux qui sont habitués à retourner dans tous les sens un corpus ne dépassant pas quelques centaines d’actes, et trop maigre pour ceux qui voudraient étudier l’apparition et l’essor de l’acte écrit dans les nombreuses villes des Pays-Bas. Aussi le sujet traité sera-t-il prudemment réduit à un exemple, celui de la ville d’Aire en Artois, ville bien connue de médiévistes par sa célèbre charte de l’Amitié accordée par Philippe d’Alsace en 1188.
Aire, Aire-sur-la-Lys de son nom officiel1, est l’une des nombreuses villes qui jalonnent le cours de la Lys entre la ville épiscopale de Thérouanne (à dix km à l’ouest d’Aire) et Gand, en passant par Merville, Estaires, Armentières, Comines, Courtrai, et autres villes de draperie. Aire n’apparaît dans l’histoire qu’au milieu du XIe siècle grâce à la fondation du chapitre Saint-Pierre par le comte de Flandre Baudouin V : c’est la seule institution airoise qui ait laissé des documents avant 11882. En 1191, la ville fut annexée au domaine du roi Philippe Auguste avec toute la partie du comté de Flandre située au sud de l’Aa et de la Lys — c’était la dot de sa première femme Isabelle de Hainaut — et elle fit partie désormais de ce qui devint en 1237 le comté d’Artois, en dépit d’un bref retour au comté en Flandre entre 1200 et 1212. Les agents du pouvoir princier auxquels la ville avait affaire au XIIIe siècle furent donc les baillis du comte de Flandre jusqu’en 1212, puis du roi jusqu’en 1237, puis de Robert I et II, comtes d’Artois.
Dès le XIIIe siècle, Aire était une ville fortifiée3 de quelque 45 hectares de superficie, mais elle comptait une dizaine de hameaux dispersés [p. 102] sur son terroir particulièrement étendu4. Siège d’une châtellenie flamande depuis le XIe siècle, la ville devint tout naturellement le siège d’un bailliage, royal puis comtal. Un puissant château construit à l’ouest de la ville par le futur Louis VIII, qui administrait l’Artois pour son père, doubla la vieille motte du châtelain située à l’intérieur de la ville près de l’église Saint-Pierre. La ville vivait à la fois de la draperie et du commerce des produits agricoles ; mais le chiffre de la population n’est pas connu : contre l’historien d’Aire Paul Bertin qui proposait il y a un demi-siècle un chiffre très bas de 1615 habitants5, A. Derville a proposé une estimation haute de 6000 à 10 000 habitants vers 13006. Aire se place parmi les villes moyennes de l’Artois, comme Bapaume, Béthune, Calais, Hesdin, Lens, loin sans doute derrière Arras et Saint-Omer.
Ville de commune, Aire avait à la fois des judices, cités dans la charte de l’Amitié de 1188, et des échevins, cités à partir de 11877. Que les judices soient ou non les mêmes personnes que les échevins, il est de fait qu’ils disparaissent aussitôt apparus et qu’au XIIIe siècle seuls les échevins jugent, administrent et font les actes écrits dont il est question ici. La première partie de l’article consistera donc à présenter le corpus des actes échevinaux connus à ce jour ; la seconde à en examiner les caractères diplomatiques ; une brève comparaison avec ce que l’on sait des actes échevinaux d’autres villes de l’Artois et de la Flandre wallonne terminera cette esquisse.
Le corpus des actes échevinaux du XIIIe siècle
Les archives communales d’Aire, conservées à l’hôtel de ville, sont anciennes (dès 1187) et riches, mais surtout à partir du XVe siècle. Elles ne possèdent plus de grande collection d’actes de juridiction gracieuse passés devant les échevins8 qui sont l’une des richesses des archives de Saint-Omer, de Valenciennes et surtout de Douai. Aussi n’y trouve-t-on que deux actes échevinaux [p. 103] du XIIIe siècle, l’un de 12189 et l’autre de 124410. En dehors d’un acte de 1218 échoué dans la collection Salis aux Archives communales de Metz11 et d’un autre de 1273 qui repose aux Archives du Nord à Lille12, l’essentiel du corpus provient se trouve (ou se trouvait) à Arras et à Saint-Omer.
Le fonds du chapitre Saint-Pierre d’Aire, dans la sous-série 4 G des Archives départementales du Pas-de-Calais à Arras13, quoique bien amoindri par l’incendie du 5 juillet 1915, conserve 36 actes échevinaux portant avant tout sur des transactions immobilières à Aire et dans sa banlieue. La plupart d’entre eux sont entrés dans les archives du chapitre, non à la date de la rédaction, mais plus tard avec des immeubles ou des rentes vendus ou donnés à l’église Saint-Pierre, comme le prouvent parfois les mentions dorsales14.
A ces actes originaux il faut lier un certain nombre d’analyses, d’extraits et de mentions d’actes similaires aujourd’hui disparus, dont un petit quelque chose nous est parvenu grâce à deux érudits. Le premier, un Airois, s’appelait Jean-Robert Hannedouche de Rebecque et vivait au milieu du XVIIe siècle (il fut mayeur d’Aire en 1660-1661). Il passa une partie de sa vie à fouiller dans les archives de sa ville, des monastères et des chartriers seigneuriaux de sa province ; de cette activité, il nous est resté trois registres de copies, analyses et notes de bonne tenue, ce qui lui a valu de la part de Roger Rodière, le plus grand érudit artésien du XXe siècle, le surnom flatteur de “Gaignières artésien”. On trouve dans l’un de ces registres, aujourd’hui à Bruxelles, des extraits de neuf actes échevinaux du XIIIe siècle15. Le second érudit est le juge boulonnais François Morand qui a analysé au siècle dernier les actes échevinaux pour dresser la liste des maires et des échevins au moyen [p. 104] âge ; ses fiches, conservées à la bibliothèque municipale d’Aire16, conservent la trace d’une dizaine d’actes qui ont disparu depuis 1915.
Le dernier lot d’actes, qui a échappé jusqu’ici à l’attention des historiens, se cache dans un terrier de l’hôpital Saint-Jean d’Aire17, aujourd’hui manuscrit 858 de la bibliothèque municipale de Saint-Omer ; on y a copié en 1404, aux f° 21 r°-24 r°, vingt-cinq actes échevinaux de 1227 à 1267 ; presque tous portent sur des transactions immobilières faites, les unes avec l’hôpital, les autres avec des personnes qui lui ont donné ou vendu plus tard un immeuble ou une rente18.
Le nombre des actes connus à ce jour s’élève donc à 86, ainsi répartis :
décennie | originaux | copies | analyses et extraits | total |
1201-1210 | 1 | 1 | ||
1211-1220 | 3 | 3 | ||
1221-1230 | 1 | 4 | 5 | |
1231-1240 | 4 | 4 | 2 | 10 |
1241-1250 | 9 | 14 | 6 | 29 |
1251-1260 | 9 | 2 | 4 | 15 |
1261-1270 | 9 | 1 | 3 | 13 |
1271-1280 | 3 | 2 | 5 | |
1281-1290 | 2 | 3 | 5 | |
total | 40 | 25 | 21 | 86 |
Les deux tiers des actes se concentrent donc sur le tiers central du siècle, de 1240 à 1270 ; ce pic documentaire du deuxième quart ou du milieu du siècle, au moins pour ce qui est des actes, a été constaté en beaucoup d’endroits [p. 105] dans la moitié septentrionale du royaume de France, à Tournai19, en Picardie20, à Chartres21 et sans doute ailleurs22.
L’étude des caractères diplomatiques devrait donc porter sur 65 actes complets ; elle ne portera que sur 63 actes ; j’ai écarté un acte de 1244 émanant du bailli Simon de Villers, du maire et des échevins, car cet acte, qui s’écarte des usages airois, a sans doute été écrit par le personnel du bailli23, et un autre de 1273, émanant du maire et des échevins, qui a sans doute été rédigé par un notaire de l’officialité de Thérouanne.24
Les caractères diplomatiques
Caractères externes
Les caractères externes sont assez simples à définir. Tous les actes sont naturellement sur parchemin. Sur les 40 originaux étudiés, dix se présentent sous la forme d’une carta transversa25, les autres sous la forme d’une carta non transversa, dont quatre sont presque carrés26. Les cartae transversae ont 14 à 20 cm de largeur et 20 à 28 cm de hauteur ; les autres chartes ont 13,5 à 22 cm de largeur, 8 à 17 cm de hauteur, y compris le repli ; l’acte le plus petit (1250) fait 8 cm de haut sur 16 de large, le plus grand (une carta transversa de 1282), 28 de haut sur 20 de large (1282) ; dans l’acte “moyen” on constate un rapport approximatif de 2 à 3 entre la hauteur et la largeur.”
L’écriture est une écriture diplomatique de petit module qui présente des traits cursifs au fur et à mesure que l’on s’avance dans le siècle. Trois [p. 106] actes seulement donnent en 1227 et 1232 le nom du scribe, Jean Speket, clerc de la ville27, mais ils sont de structure très différente28 ; cette précieuse indication nous assure au moins que les échevins avaient un clerc capable de rédiger leurs actes sans recourir à une main-d’oeuvre extérieure, par exemple celle du chapitre. Peut-être en avaient-ils davantage, car l’acte original de janvier 1232 écrit par “par la main de Jean Speket” est d’une autre écriture qu’un autre acte original daté aussi de janvier 1232. De plus, comme on le verra plus bas, on ne dénombre pas moins de huit formules différentes pour les débuts d’actes entre 1227 et 1232 : ou bien la ville employait plusieurs clercs, ou bien Jean Speket était seul mais aimait la fantaisie.
Le trait le plus marquant des actes airois est l’emploi exclusif du latin pendant presque tout le siècle. Le dernier acte écrit en cette langue est de septembre 1285 ; cinq ans après, un acte perdu, mais analysé par F. Morand, était en français29 ; cependant, si les prénoms sont donnés sous leur forme latine, les noms de personnes, comme d’ailleurs les toponymes30, sont donnés tantôt en latin, tantôt en français31. Aucun acte n’est conservé pour la dernière décennie du siècle, mais les actes du XIVe sont en français32.
[p. 107] Caractères internes
Les éléments du discours diplomatique
Le discours diplomatique est beaucoup plus compliqué à analyser, car il n’est devenu stable que vers 1240. Pour plus de clarté, je commencerai par en exposer les divers éléments.
L’acte commence par la suscription du maire et de plusieurs échevins sur ce modèle : X tunc temporis major et scabini Arienses, Y, Z, etc., jusqu’en 1232, et à partir de 1233 : X tunc temporis major et X, Y, Z, etc., scabini Arienses… ; dans trois actes seulement, en 1224, 1232 et 1248, le maire et les échevins ne sont nommés qu’à la fin, aux côtés des témoins : dans les deux derniers cas le maire est l’acheteur dans la vente rapportée par l’acte ; il existe sûrement un lien entre les deux faits. Dans deux cas, on trouve deux listes différentes correspondant à deux actions juridiques33. Quant au nombre des échevins présents, sur les douze, y compris le maire34, qui dirigeaient la ville, il varie de quatre à onze, avec une majorité de quatre et de cinq sur douze, comme le montre le tableau suivant fait à partir de 71 actes et analyses utilisables :
décennie 4 5 6 7 8 9 10 11 échevins 1211-1220 1 1 1 1221-1230 1 1 1 2 1 1231-1240 2 2 1 1 1241-1250 5 12 3 3 1 [p. 108] 1251-1260 3 7 2 1261-1270 7 5 1271-1280 2 2 1281-1290 1 3 total 19 31 8 7 3 3 L’adresse peut prendre quatre formes : universis presentem paginam inspecturis (1218) ; omnibus presentem paginam inspecturis (1224, 1227) ; omnibus tam futuris quam presentibus inspecturis (1227) ; enfin la formule qui apparaît dès 121835 et évince les autres à partir de 1227 : omnibus presentes litteras inspecturis.
la salutation qui suit peut prendre quatre formes : salutem in Domino (1218) ; in Domino salutem (1220, 1224, 1227 [4 fois], 1228) ; salutem in omnium Salutari (1232 [2 fois], 1237) ; salutem (1232, 1233). À partir de 1239, le salut disparaît.
La notification se rencontre sous cinq formes : notum fieri volumus quod (1218, 1220, 1224, 1227 [2 fois], 1232 [3 fois], 1233) ; noverint universi quod (1227, 1228) ; noveritis quod (1227) ; notum sit tam futuris quam presentibus quod (1232) ; partout ailleurs nous trouvons le simple notum facimus quod qui évince toutes les autres à partir de 1233.
Les combinaisons variées de la suscription, de l’adresse, de la salutation et de la notification donnent 13 débuts d’acte différents ; onze de ces initia sont utilisés dans 14 chartes seulement entre 1218 et 1237 ; une douzième n’apparaît qu’une fois en 124836 ; quant à la treizième, utilisé une fois isolément en 1218, elle est reprise en 1239 et évince aussitôt tous les autres :
(maire et échevins) universis presentes litteras inspecturis, salutem in Domino. Universitati vestre notum fieri volumus quod…, 1218,
(maire et échevins) universis presentem paginam inspecturis, in Domino salutem. Universitati vestre notum fieri volumus quod…, 1220,
(maire et échevins) omnibus presentem paginam inspecturis, in Domino salutem. Notum fieri volumus quod…, 1224, 1227,
[p. 109] (maire et échevins) omnibus tam futuris quam presentibus litteras inspecturis, in Domino salutem. Notum facimus quod…, 1227,
(maire et échevins) omnibus tam futuris quam presentibus presentes litteras inspecturis, in Domino salutem. Notum fieri volumus quod…, 1227,
(maire et échevins) omnibus presentes litteras inspecturis, in Domino salutem. Notum fieri volumes quod…, 1227,
(maire et échevins) omnibus presentes litteras inspecturis, salutem in omnium Salutari. Noveritis quod…, 1227,
(maire et échevins) omnibus tam futuris quam presentibus presentes litteras inspecturis, salutem in omnium Salutari. Notum fieri volumus quod…, 1232,
Omnibus presentes litteras inspecturis, major et scabini Arienses, salutem. Notam sit tam futuris quam presentibus quod… avec le nom des échevins (mais pas du maire) à la fin de l’acte, 1232,
(maire et échevins) omnibus presentes litteras inspecturis, salutem in omnium Salutari. Notum fieri volumus quod…, 1232, 1237,
(maire et échevins) omnibus presentes litteras inspecturis, salutem. Notum fieri volumus quod…, 1233,
Notum sit omnibus presentes litteras inspecturis quod… avec le maire et les échevins à la fin de l’acte, oct. 1248
(maire et échevins) omnibus presentes litteras inspecturis. Notum facimus quod… 1218, 1239 et toujours ensuite.
Le texte et le dispositif, sans aucun préambule, sont beaucoup plus simples. L’exposé, rare, ne se trouve dans l’acte que cinq fois, pour rappeler des transactions antérieures compliquées37. Le dispositif est très sobre et dit l’essentiel en peu de mots avec une grande précision pour les chiffres, les lieux et les personnes. Sans nous occuper ici du contenu, notons simplement que près de neuf actes sur dix relatent une vente, le reste une donation, un arrentement, un accord entre parties en litige, un arbitrage ; il est fréquent que l’action soit double : l’acheteur rend souvent l’immeuble acheté au vendeur contre une rente. Tout cela rentre dans le cadre fort souple du werp, de la désaisine-saisine : le verbe werpire est souvent employé dès 1218 dans les actes pour désigner l’action juridique de desaisine d’un bien immobilier par le vendeur ou le donateur, suivi de sa saisine par le bénéficiaire, mais le terme abstrait correspondant a été plus varié : concessio38, venditio39 resignatio40 [p. 110] donum41, mais werpitio, qui apparaît en 123242, élimine les autres termes à partir de 1240. Quant aux clauses finales, elles sont rarissimes43.
A la fin de l’acte nous retrouvons la diversité du début, bien qu’à un degré moindre. Les éléments suivants s’y trouvent, dans un ordre qui n’est pas resté uniforme : lieu, nom du seigneur foncier ou de son représentant, parfois une formule de corroboration, date. Le tout introduit ou non par actum.
Le lieu précis dans la ville où l’acte est fait, sinon écrit, est toujours indiqué dans les textes conservés, mais à partir de 1232, et il est connu aussi dans quelques actes analysés : cela fait en tout 50 cas. On s’aperçoit avec surprise que l’acte peut être “donné” en des lieux variés et inattendus : halle, 6 fois : 1232, 1232, 1239, 1245 (githalla), 1247, 1247 (halla) ; église Saint-Pierre, 2 fois : 1243, 1270 ; âtre de Saint-Pierre, 10 fois : 1237, 1241, 1243, 1243, 1244, 1245, 1252, 1256, 1257, 1275 ; aula du comte, 2 fois : 1245, 1270 (logia aule) ; marché, 4 fois : 1247, 1247 (près de la halle des cordonniers), 1247 (près de la halle aux laines), 1260 (à l’entrée) ; chapelle de l’hôpital (qui est acheteur), une fois en 1244 ; maison particulière : 21 fois dans 14 ou 15 maisons différentes : de Pierre Lupus (1240, 1253), Henri de Saint-Venant (1242, 1251, 1253), Aelis, sa veuve (1255), Gilles de Pernes, échevin (1244), Gilles Taviel, juge (1246, 1270), Henri Groin, à la place du juge (1247), feu Raoul de Scopa (1250), Jean d’Arras le jeune, juge (1255) et échevin (1259), Pierre Marchant, chapelain (1264), feu Gervais Bollige (1267), Guillaume Alleluie (1269), Jean Odiel (3 fois en 1270), Renaut Faber (1277), sire Pierre Kokelet, chapelain (1282) ; devant une maison, 4 fois : Raoul de Scopa, deux fois en 1244, Cécile Lupa (1270), feu Robert Lupus (1270).
Nous pouvons nous représenter avec quelque effort d’imagination ces Airois passant leur contrat dans la maison d’un notable (la plupart des chefs d’hôtel cités ont été maires ou échevins44) et le clerc écrivant son bout de parchemin sur un coin de table, mais pourquoi dans la rue ou dans le cimetière de Saint-Pierre, même en plein hiver ? Peut-être faudrait-il tenir compte [p. 111] de la localisation des immeubles dans telle ou telle seigneurie foncière45, mais cette recherche difficile reste à faire.
Vers la fin46 de presque tous les textes connus47 et dans beaucoup d’analyses, 60 actes en tout, nous lisons une phrase qui signale la présence de deux sortes de gens. Premièrement une, deux, voire trois personnes qui assistent à l’action juridique et dont les textes disent qu’ils sont présents parfois “comme juge” (tanquam justicia), mais presque toujours “à la place du juge” : pro justiciario (3 fois), loco justicie (2 fois), loco justiciarii (5 fois), “à la place d’un tel” (loco talis, 3 fois), et surtout, trois fois sur quatre pro justicia assistente. Les noms d’une trentaine de ces agents du seigneur reviennent dans les actes, dont certains sont cités plusieurs fois, tels Renier le Tailleur (Renaldus Cisor), quinze fois entre 1233 et 1254, Robert de la Jumelle, huit fois entre 1242 et 1247, Gilles Taviel, huit fois de 1244 à 1270, etc. Les seigneurs qu’ils représentent ne sont pas toujours cités, mais il est manifeste que ce sont les seigneurs fonciers de la région d’Aire, à commencer par celui qui est à la tête de l’Artois : le seigneur Louis (le futur Louis VIII), puis le comte, représentés par le châtelain d’Aire48, le châtelain lui-même, les seigneurs de Méteque, de Hamel, de Planque, de Norrent, de Bleti49, de la Jumelle, de Blessel, de Malannoy ; ce sont les “seigneurs du sol”50, car le sol airois était composé de plusieurs “tènements” : l’autorisation du seigneur était indispensable51 pour toute transaction foncière qui doit donc se faire devant le seigneur ou son délégué52. Cela pose le problème très difficile du lien entre ces seigneurs et les échevins : pourquoi tous ces werps, même s’ils ne concernent pas le domaine comtal, se font-ils devant les échevins d’Aire, qui sont en principe les échevins du comte, et pas devant ceux des autres seigneurs fonciers ? Il [p. 112] reste un certain nombre d’actes de ces seigneurs53, notamment de Baudouin de Comines, châtelain d’Aire de 1200 à 1240 environ, rapportant des transactions de ce genre passées devant ses hommes, et non devant les échevins d’Aire, mais dans le plat-pays. Ce sont les échevins qui rendent désormais toute justice dans les limites de la ville et de la banlieue54, lege scabinali dictante55, quelle que soit la seigneurie. Deuxièmement les échevins nommés au début de l’acte avec le maire. Cette précision apparaît une fois en 1228, disparaît et devient habituelle à partir de 1239, sauf rares exceptions56. Il faut noter la rareté de la présence du maire, presentibus nobis majore et scabinis superius nominatis57 ; la formule normale depuis 1239 ne signale que l’assistance d’échevins : coram58 puis presentibus nobis scabinis superius nominatis.
La formule de corroboration avec annonce des signes de validation ne se trouve que six fois, entre 1220 et 1228, et avec six formules différentes : Ut autem hec venditio…rata stabilisque permaneat, presentem paginam exinde conscriptam tradidimus sigilli nostri karactere communitam (1220) ; Ut autem hec venditio permaneat… (1220, 1227) ; Ut autem concessiones iste firme stabililesque permaneant, presentem paginam contulimus sigilli majoris et scabinorum Ariensium munimine roboratam (1224) ; Quod ut ratum et firmum permaneat, presens scriptum exinde confectum contulimus signatum sigillo majoris et scabinorum Ariensium (1227) ; Quod ut ratum habeatur et firmum, presens scriptum inde confectum per manum Johannis Speket clerici nostri tradidimus signatum sigillo majoris et scabinorum Ariensium (1227) ; Quod ut ratum habeatur et firmum, presens scriptum inde confectum (manibus Johannis Speket clerici nostri) duximus signandum sigilli majoris et scabinorum Ariensium, 1227, 122859. Quelques autres actes se contentent de l’annonce du sceau sous les formes suivantes : In cujus rei testimonium, presens scriptum inde confectum contulimus sigillatum sigillo majoris et scabinorum Ariensium… (1218), In hujus rei [p. 113] testimonium, contulimus…presentem paginam sigilli nostri munimine confirmatam… (1218) ; In cujus facti testimonium, presens scriptum contulimus signatum sigillo majoris et scabinorum Ariensium… (1232), In hujus rei testimonium, presentem kartulam exinde confectum contulimus signatam sigillo majoris et scabinorum Ariensium… (1237), In cujus rei testimonium, presens scriptum inde confectum sigillo nostro duximus roborandum… (deux fois en 1239), dès 1218, nous trouvons des eschatocoles sans formules de corroboration et celles-ci disparaissent tout à fait après 1239. Les actes se simplifient à la fin comme ils le font au début de l’acte.
La date se compose de l’année et du mois. Huit fois seulement, le jour s’y ajoute, toujours par référence à une date du calendrier liturgique, quatre fois entre 1251 et 1254 et quatre fois entre 1270 et 1273.
De la diversité à l’uniformisation
Ces divers éléments peuvent se combiner entre eux d’une façon qui a varié au cours du siècle et qui s’est peu à peu simplifiée et uniformisée. On peut, en schématisant, distinguer trois étapes :
Au début du siècle, le protocole initial et le protocole final sont d’une très grande variété et aucun acte ne ressemble exactement aux autres. Mais un peu d’ordre s’introduit lentement : uniformisation de l’adresse vers 1227, de la notification en 1233, suppression du salut en 1239 : le début des actes est standardisé dès 1239. À la fin des actes, le dispositif se termine déjà souvent en indiquant la présence des juges fonciers, qui sont nommés, et en rappelant la présence des échevins cités au début de l’acte ; une formule de corroboration60, réduite assez vite à une simple annonce du sceau61 vient ensuite ; le tout se termine par actum62 et la date. Après 1239, l’abandon de toute corroboration allège cette disposition63. Ce type d’acte avec ses variantes se rencontre 26 fois, c’est le modèle A.
Dans les années 1240, un autre agencement pour terminer cet acte simplifié a eu un succès éphémère : le dispositif est suivi de actum avec le lieu, le nom des juges fonciers et la mention de la présence des échevins, et pour finir, la date. Cette construction se rencontre sept fois entre 1244 et 1256, puis elle disparaît64, je la nommerai le modèle B.
[p. 114] En 1240 également apparaît la formule finale qui allait éliminer les autres : le dispositif est suivi d’une phrase terminale qui, sauf exceptions65, commence par : hec werpitio facta fuit… avec le lieu, le nom des juges fonciers, la mention des échevins et la date. Cette construction, qui n’a plus de concurrente après 1256, se rencontre 38 fois.
Validation
Le signe de validation utilisé est évidemment le sceau66. Le grand sceau est conservé au bas du seul acte de l’extrême fin du XIIe siècle qui soit conservé et il a traversé tout le moyen âge67, mais les actes échevinaux du XIIIe siècle étaient scellés d’un autre sceau, difficile à décrire, car presque tous les actes originaux du XIIIe siècle, qui étaient scellés sur double queue de parchemin68, ont perdu leur sceau, sauf parfois à l’état de fragment. Ce sceau aux causes, fait pour sceller les actes de juridiction gracieuse, apparaît, semble-t-il, pour la première fois au bas d’un acte de juillet 124269 : l’inscription a disparu et il ne reste que le champ représentant une aigle éployée : on a peut-être pris le contre-sceau de 1200 pour en faire le sceau aux causes de la ville qui devient courant au XIVe siècle.
Le sceau est-il le seul élément de validation de l’acte ? Quelle est l’importance de la phrase par laquelle on nomme la présence du ou des juges fonciers et des échevins qui notifient l’acte avec le maire ? Est-ce une sorte de clause de convenance ou une liste de témoins ? Un acte de 1240 note, une seule fois il est vrai, que les échevins sont présents au werp in testimonium70. On mesure ici l’ambiguïté de la situation. Le seigneur du sol ou son représentant doit se trouver présent tanquam dominus71, pour juger ou plutôt [p. 115] faire ses échevins juges de l’acte de juridiction gracieuse demandé par les deux parties ; mais dans les faits les échevins de la ville sont devenus davantage que les échevins du comte : ils se sont imposés comme les échevins de tout seigneur foncier, dès lors que la transaction porte sur le sol de la ville et de sa banlieue.
Conclusions provisoires
Premièrement, les actes échevinaux d’Aire sont passés du stade de la diversité et de la richesse des formes au stade du werp standardisé ; ce passage se fait en 1239/1240, et les exceptions disparaissent après 1256. Le souci d’efficacité semble manifeste. Il coïncide avec la multiplication rapide des actes d’échevinage au milieu du siècle : on a peut-être simplifié le formulaire à cause du plus grand nombre d’actes à dresser, mais cela est difficile à prouver.
Deuxièmement, tout en innovant, les échevins airois sont restés attachés à des aspects traditionnels : usage du latin, actes scellés d’un sceau de la ville. Pour bien comprendre cet attachement, il faudrait comparer la situation d’Aire à celle des autres villes de l’Artois ou des Pays-Bas en général. Une enquête rapide dans les documents imprimés laisse deviner deux pôles : les villes conservatrices comme Aire, dans lesquelles les échevins utilisent, pour l’usage interne, le latin et l’acte scellé dressé par plusieurs échevins, et les villes novatrices dans lesquelles les échevins utilisent le français et le chirographe non scellé passé souvent devant quelques échevins de service. Entre les deux, on rencontre toutes les transitions possibles.
La ville qui a innové le plus vite est Douai ; dès 1204, date du premier acte original en langue d’oïl72 les actes échevinaux sont des chirographes non scellés écrits en français dont il reste environ 35000 aux archives de la ville. À Arras, dont les archives sont assez maigres jusqu’au XVe siècle, les documents diplomatiques les plus anciens en français sont, à l’heure actuelle, un acte des échevins pour les maladreries de Grandval et Méaulens [p. 116] écrit en français en 123873, un abrégé des finances de 1241-124274, de rares chirographes à partir de 1246-124775 ; dans la cité épiscopale d’Arras, les plus anciens chirographes conservés remontent à 125676. À Saint-Omer, les statuts de la hanse marchande sont rédigés peu avant 1241 en français, et de même toutes les listes de membres à partir de cette date77 ; si un accord entre la ville et le chapitre est écrit en 1248 en français78, les actes échangés avec l’abbaye de Saint-Bertin restent en latin jusque vers 1280-1290. À Lille, autre grande ville, les rares actes échevinaux connus sont encore en latin en 1233 et 124479, mais un acte du rewart de l’Amitié de 1243 et un acte du rewart et des échevins de 1249 sont en français80.
Dans les villes plus petites, le passage au français fut peut-être aussi rapide. Un cahier de baux à ferme de l’abbaye d’Anchin conclus entre 1247 et 1252 nous a conservé par chance une série de chirographes échevinaux en français : sept des échevins de Béthune81, cinq de ceux de Lens82, qui avait laissé avant un rare acte échevinal en latin de 119483, cinq d’Hesdin84, un [p. 117] d’Hénin-Liétard85, proche de Lens (auquel il faut ajouter un accord entre la ville et l’abbaye de 124886), et enfin un chirographe de Lille de 124787. Une charte de Bapaume avec l’état abrégé des comptes de 1268 est le premier document français connu de cette ville88.
La seule ville qui ait été presque aussi lente qu’Aire dans cette évolution est Calais. Dans les actes, le latin y a régné sans partage jusqu’en 1268, il coexiste avec le français de 1268 à 1282 et disparaît alors ; pour les comptes, le passage progressif se fait entre 1285 et 129889.
Seules des recherches approfondies90 et des éditions de sources confirmeront ou contrediront ces hypothèses de travail : un vaste champ d’études comparatives est ouvert dans le domaine de la diplomatique des documents urbains du Nord de la France.
[p. 118] Pièces justificatives : trois actes échevinaux airois de type différent
[Aire], mai 1218
Le maire et les échevins d’Aire ont savoir qu’Eustache de Calceia et sa femme Alays avaient vendu et cédé leur maison à Étienne, clerc de sire Louis, qu’Étienne leur a rendus contre 12 sous de rente annuelle ; de plus Jean Magnus et sa femme avaient vendu à Étienne leur maison et tènement tenus de sire Hugues de Nielles et Étienne les leur a rendus contre un cens annuel de 12 sous, en réservant 14 sous de rente qu’y perçoit l’hôpital d’Aire ; Étienne a alors vendu ces 24 sous de rente sur ces deux maisons à l’église Saint-André-lez-Aire.
A. Original, Metz, Archives communales, collection Salis, II 253/4 ; hauteur : 21 cm., largeur : 19 cm. ; jadis scellé sur lacs.
Radulphus Choke, tunc temporis major de Aria, necnon et scabini, videlicet Balduinus Bollige, Hainfridus Corduaniers, Alelmus Tanere, Arnulphus Carons, Johannes Tale, Petrus Paignés, Arnulphus Tostis, Hermandus Moistres, Gervasius de Foro, Balduinus Pinguis, Johannes Palmarius, universis presentem paginam inspecturis, salutem in Domino. Universitati vestre notum fieri volumus quod, cum Eustachius de Calceia et Alays, uxor ejus, domum suam et mansuram cum toto fundo et superficie Stephano, clerico domini Ludovici91, vendidissent et bene ac legitime werpivissent coram Adam, filio Lanwini militis, tunc temporis dicti fundi justiciario existente, et cum idem Stephanus dictam mansionem cum toto fundo et superficie, lege scabinali dictante, bene et legitime possedisset, ipse Stephanus dictam mansuram et domum prefato Eustachio et uxori ejus concessit ad redditum pro duodecim solidis Arie currentis monete, salvo jure domini fundi, sex solidis ad Natale Domini et sex solidis ad Pascha annuatim persolvendis ; et insuper cum Johannes Magnus et uxor ejus mansionem suam cum omni tenemento et redditibus illius tenementi quod tenebant a domino Hugone de Nieles, tunc domino illius tenementi, eidem Stephano vendidissent et bene ac legitime werpivissent, idem Stephanus totam mansionem cum omni tenemento et redditibus eidem Johanni et heredibus suis reddidit sub annuo censu duodecim solidorum simili modo in predictis terminis solvendorum, salvo jure domini fundi et salvis quatuordecim solidis quos hospitalis Arie habet in redditu super illud tenementum ; postmodum autem, sepedictus Stephanus prenotatos viginti quatuor solidos provenientes de hiis duabus emptionibus et concessionibus [p. 119] subsequentibus et quicquid inde juris habebat vendidit ecclesie Beati Andree juxta Ariam et werpivit bene et legitime, lege scabinali dictante, presente Adam de Milliacho et presentibus istis conscabinis nostris, scilicet Radulpho Choke, tunc temporis majore de Aria et scabino, Balduino Bolliga, Hainfrido Corduanier, Alelmo Taneor et Arnulpho le Caron, in omnibus salvo jure dominorum fundorum et salvis predictis quatuordecim solidis hospitalis. In hujus igitur rei testimonium, contulimus ecclesie predicte presentem paginam sigilli nostri munimine confirmatam. Actum anno Domini millesimo ducentesimo octavo decimo, mense maio.
Aire, [8-30 avril] 1256
Le maire et les échevins d’Aire font savoir qu’Étienne Tinctor et sa femme Oda ont vendu à Jean de Caffort 5 quartiers et 8 verges de terre sur le mont de Biennes entre les terres de ce Jean et celle de la dame de Dohem à 12 deniers de rente annuelle la mesure pour le comte. Gilles, leur fils, et Jean d’Arras, gendre de leur fille Renalda, ont abandonné leur “alengherie” sur cette terre.
A. Original : perdu
B. Copie de 1404, Saint-Omer, bibliothèque municipale, manuscrit 858, f° 23 v°.
Johannes de Attrebato, tunc temporis major, et Johannes de Barra, Johannes Poteniere, Johannes Farde, Robertus de Sancto Venancio et Robertus Deodatus, scabini Arienses, omnibus presentes litteras inspecturis. Notum facimus quod Stephanus Tinctor et Oda, uxor ejus, in nostra presencia constituti quinque quarteria et octo virgas terre sue jacentis in Monte de Biennes, inter terras Johannis de Caffort et terram domine de Dohem, vendiderunt dicto Johanni et eidem bene et legitime werpiverunt hereditarie possidendam per duodecim denarios annui redditus de mensura annuatim domino comiti persolvendos. Cui werpitioni Egidius, eorumdem Stephani et Ode filius et Johannes de Attrebato, gener Renalde eorum filie quondam, presentez interfuerunt et, werpitioni predicte manus apponentes, allengariam92 suam sive quicquid juris habebant in eadem terra dicto Johanni legitime quitaverunt et prefati Stephanus et Oda super se et sua eandem terram quitandam lege patrie pepigerunt. [p. 120] Actum in attrio Sancti Petri Ariensis coram Jacobo dicto Faverel, loco justiciarii assistente, juxta refectorium, presentibus nobis scabinis superius nominatis, anno Domini M°CC° quinquagesimo sexto, mense aprili.
Aire, février 1271
Le maire et les échevins d’Aire font savoir que Berthe la Rousse, aidée de son avoué, a vendu à Jean de Cafort sa maison en Putainruelle, près de la maison qui fut à Jean Fournier, chapelain ; puis il la lui a rendue, à elle et à ses héritiers, contre 3 sous de rente annuelle et 3 sous d’amende à chaque non-paiement.
A. Original, Arras, Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 G 19, Chapitre d’Aire ; hauteur : 11 cm, largeur : 16,5 cm ; scellé sur double queue de parchemin avec fragment du sceau ; mentions dorsales : Berta Ruffa (XIIIe siècle) ; chap. premier IIII XIX (XVe-XVIe siècles) ; III s. par. sur une maison en la Putain ruelle (XVIe-XVIe siècles) ; 4e cotté n° 246 ; en 1270 (XVIIIe siècle).
Johannes de Gardino, tunc temporis major, et Willelmus Capellarius, Johannes Hele, Thomas de Scopa et Andreas de Pelices, scabini Arienses, omnibus presentes litteras inspecturis. Notum facimus quod Berta dicta Rufa, assumpto sibi advocato, in presentia nostra constituta, mansionem suam quam habebat sitam in viculo qui dicitur Putain ruelle juxta mansionem que quondam fuit Johannis Fornarii, capellani, vendidit Johanni dicto de Cafort, burgensi Ariensi, et eidem bene et legitime werpivit hereditarie possidendam. Postmodum idem Johannes eandem mansionem eidem reddidit hereditarie tenendam de se et heredibus suis per tres solidos annui redditus annuatim in festo beati Johannis Baptiste persolvendos, sub tribus solidis de lege quolibet termino quo dictus non fuerit redditus persolutus et per redditus fundi pristinos. Facta fuit hec werpitio coram domo Roberti quondam dicti Lupi, Andrea Cisore loco justicie assistente, presentibus scabinis superius nominatis, anno Domini M°CC° septuagesimo mense februario.
[p. 121] [p. 122]