École des chartes » ELEC » Cartulaires d'Île-de-France » Notre-Dame de Chartres » Tome premier » 1171-1172, 8 avril

« Alexandri, de justicia prepositurarum in canonicos transfusa, et de forinsecis et de immunitate dandi telonei. »

  • A Original en parchemin bullé. Arch. dép. Eure-et-Loir, G 709 (ancienne cote : fonds du Chapitre, carton X, A, 4).
  • B Bibl. nat. de France, carton 28: Livre des Privilèges de l'église de Chartres, p. 24; et carton 28 bis, fol. 10v°.
  • a Theodori Penitent., II, 429.
  • b Jaffé, Reg. Pont. rom., 745, n° 8078.
  • c Cartulaire de Notre-Dame de Chartres, éd. Eugène de Lépinois et Lucien Merlet, Chartres, 1862.
D'après c.

« Alexander episcopus, servus servorum Dei, dilectis filiis decano et Capitulo Carnotensis ecclesie, salutem et apostolicam benedictionem. Pontificalis auctoritatis providentia exigit et pastoralis sollicitudo requirit ut cunctorum invigilemus profectibus et ad ea studio tocius sollicitudinis aspiremus que ad ecclesiarum pertinent incrementum ; quia laudabilis est et commendanda providentia prelatorum cum ecclesiis salubri regimine provident et earum statum dirigere satagunt et conservare illesum. Intelleximus autem quod venerabilis frater noster Willelmus, Senonensis archiepiscopus, apostolice sedis legatus1, cognoscens dolum et fraudem que in tractandis et disponendis redditibus ecclesie vestre ab infidelibus ministris fiebat, consilio et conniventia tocius Capituli vestri, statuit et ordinavit ut duo, tres, quatuor, vel plures numero, juxta competentem prebendalium proventuum estimationem, sibi ad invicem adjungantur, qui partes sorti sue deputatas, servata honestate, procurent, et de tuendis, fovendis atque juvandis qui in sua sunt ditione terrarum colonis curam fidelissimam gerant ; et, ne circa injunctam sibi sollicitudinem minus solliciti aut negligentes existant, omnes justicias que seculares appellantur et que solent ad prepositos pertinere, sive terrarum, seu rusticorum, in canonicorum jura transfudit, ita ut pro nullo penitus forisfacto liceat preposito quempiam ex rusticis summonere vel justiciare. Si autem aliquis eorum tam temerarius extiterit ut eidem redditus suos tempore quo debentur non solvat, illum prepositus justiciabit et emendationem forisfacti sibi soli vendicabit. Sane si quis rusticorum cuilibet extraneo injuriosus fuerit, clamor ad canonicos deferatur. Presentatio autem presbiterorum in ecclesiis que vacaverint canonicorum pariter et prepositi erit, et si prepositus noluerit aut dissimulaverit interesse, canonici quod suum est nichilominus exsequantur. Presbiter vero qui fuerit presentatus fidelitatem prestabit utrisque. Sane predictus archiepiscopus, volens constitutionem ipsam ratam et firmam manere, omnia que prescripta sunt in prepositura quam detinebat observari decrevit, et de ceteris preposituris, censivis quoque, atque precariis idipsum similiter censuit observandum, cum illos qui eas detinent contigerit ex hac vita decedere, vel forte illas quoquo modo dimittere. Preterea ab eodem statutum est et ordinatum ut qui ante hanc institutionem canonici facti, anno ad minus dimidio mansionarii in vestra civitate non fuerint, centum solidos minus quam mansionarii annuatim consequantur. Eos autem qui futuri erunt canonici nichil de prebenda preter quadraginta solidos, si mansionarii non fuerint, esse percepturos constituit, his quos excepistis duntaxat exceptis2. Additum est etiam quod hec particio prebendarum quinquennalem terminum debeat obtinere et hii quibus hec data est et collata potestas cum subjectis modeste agere, non eis calumpniam imponere, nec ipsos opprimere angariis debeant, aut immoderate gravare. Quam siquidem institutionem, prout superius dictum est, ratam et fimam habemus et auctoritate apostolica confirmamus. Ad hec libertatem claustri vestri, sicut in privilegiis regum Francie continetur, et antiquam et rationabilem consuetudinem ecclesie vestre, scilicet quod homines et hospites ipsius ecclesie in tota civitate et episcopatu vestro de omnibus mercationibus ad suum et familie sue usum pertinentibus, nullam, vendentes vel ementes, consuetudinem seu theloneum reddant, nichilominus auctoritatis apostolice duximus robore confirmandam3. Statuentes, etc..... Datum Tusculani, 4. »


1 La charte de Guillaume, archevêque de Sens, est datée de 1171, dans le Chapitre de l'église de Chartres (Bibl. Imp., cart. 28, p. 50, et 28 bis, fº 23 rº).

2 Cette question de la résidence des chanoines fut une de celles qui occupèrent le plus les Souverains-Pontifes et les Evêques aux XIIe et XIIIe siècles. Nous avons déjà vu la bulle d'Alexandre III du 4 avril 1168-1169 (nº LXXVII). Nous publierons plus loin une bulle du même pape du 23 janvier 1179, relative au même sujet. Lucius III, en 1183, renouvela les prescriptions de son prédécesseur. En 1208, l'évêque Renaud de Mouçon statua que nul chanoine ne pourrait jouir de son gros s'il n'avait résidé et assisté pontificalement à l'office du chœur au moins six mois de l'année (Bibl. nat. de France, cart. 28, p. 111, et 28 bis, fº 51 rº). Au mois de janvier 1252, le pape Alexandre IV déclara que les chanoines ne demeurant pas dans le cloître recevraient néanmoins leurs distributions, pourvu qu'ils fussent présents à Matines et à deux des Heures du jour (Orig. en parch., Arch. dep. d'Eure-et-Loir, fonds du Chap., C. I, L, 11). L'obligation de la résidence devint plus rigoureuse encore par la promulgation du canon du concile de Trente (Sess. 24, de reformat., cap. 12), qui disposa que les chanoines absents plus de trois mois par an perdraient leurs gros.

Cependant, malgré les protestations énergiques des chanoines, de nombreuses infractions furent faites à ces réglements. Une bulle du pape Honorius III, ne faisant au reste que confirmer une ordonnance capitulaire, statua, vers 1216, que les chanoines étudiants en théologie seraient réputés présents et gagneraient les gros fruits de leurs prébendes, à quelque école qu'ils fissent leurs études. C'est au surplus ce qui fut admis dans tous les diocèses comme règle canonique (Rebuffe, in prax. benefic., part. 2, tit. dispensatio de non residendo, nº 25. — Louet et Brodeau, lettre E, somm. 6. — Despeisses, t. III, des bénéf. ecclés., tit. 9, sect. II, nº 6). En 1252, le pape Innocent IV dispensa de la résidence Etienne, son chapelain, malgré la résistance du Chapitre, et déclara qu'il jouirait du revenu de son canonicat, à l'exception des distributions (Orig. en parch., Arch. dep. d'Eure-et-Loir, fonds du Chap., C. I, M, 2). Le pape Jean XXI en fit autant, en 1276, pour Pierre de Talaru, son chapelain (Id., ibid., C. I, M, 3). En 1402, le roi Charles VI exempta de la résidence Philippe de Bois-Giloud, conseiller en son Parlement. Henri II, Charles IX et Henri III, en 1554, 1567 et 1580, déclarèrent, par application d'une bulle de Clément VI, du 20 avril 1351, que les officiers et chapelains de leur oratoire devaient de même être réputés comme présents. Les musiciens du Roi et les chapelains de la Sainte-Chapelle furent assimilés aux chanoines de cette dernière catégorie par arrêts de 1582 et de 1613 : mais des lettres-patentes de Henri IV, en date du 6 mars 1606, réduisirent à six le nombre des chanoines privilégiés qui pourraient exister dans l'église de Chartres. Ces lettres-patentes furent fidèlement observées jusqu'à la Révolution, hormis à l'égard des chanoines de la Sainte-Chapelle, déshérités de ce privilége par une déclaration du 18 décembre 1740, registrée au Grand-Conseil le 30 du même mois, et, de 1771 à 1774, nous voyons diverses lettres écrites par le duc de la Vrillière, au sujet d'Augustin Lemée, chapelain de la comtesse de Provence, Claude-Jacques Peigné, clerc de chapelle du comte de Provence, Louis-Hector-Honorat-Maxime de Sabran de Forcalquier, aumônier du Roi, François de Fontanges, aumônier de la Dauphine, Hyacinthe de Bouniol de Montégut, instituteur des enfants de France, qui tous devront être classés au nombre des chanoines privilégiés, en tant toutefois qu'une des six places réservées à ces chanoines deviendra vacante. Cependant Gui de Thélis et Louis Buisson, conseillers au Parlement, ayant demandé à jouir des distributions manuelles ou de leur équivalent, quoique ne faisant pas résidence, furent déboutés par arrêt du Parlement du 31 janvier 1606 ; mais en 1677, une ordonnance capitulaire déclara que François Gobineau, avocat du Roi au bailliage, serait réputé présent toutes les fois qu'il s'absenterait pour l'exercice de ses fonctions (Arch. dep. d'Eure-et-Loir, fonds du Chap., C. I, M, 5, 7, 10, 13, 15, 16, 17, 25, 34 et 38).

3 Voir ci-dessus nº LXVII.
4 D'après l'itinéraire de Jaffé, Alexandre III était à Tusculum le 6 des ides de mars 1171-1172.