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L’établissement

Historique

Le lieu de la Roche se situe à l’extrême bord de la plaine du Mesnil-Saint-Denis (ainsi nommée d’après la grande abbaye, qui possédait un vaste domaine à Beaurain et Trappes), à moins de deux kilomètres de Lévis-Saint-Nom et à une petite dizaine de kilomètres de l’abbaye des Vaux-de-Cernay et de Chevreuse. L’abbaye de Notre-Dame de la Roche relevait du diocèse de Paris, de l’archidiaconé de Josas et du doyenné de Châteaufort.

Comme la plupart des fondations médiévales, cet établissement tire son origine d’une légende, celle d’une statue de la Vierge miraculeusement découverte par un taureau, pour laquelle le seigneur de Lévis aurait fait bâtir une église et un monastère. Il semble en réalité que, vers la fin du XIIe siècle, Guy de Lévis et son épouse Élisabeth ont fait don à l’ancien curé de Maincourt, Guy, d’une terre pour l’établissement d’une nouvelle maison religieuse. Le premier acte conservé du cartulaire est la confirmation solennelle de ce legs par l’évêque de Paris, Maurice de Sully, vers 1196. Ainsi se forme la communauté du Bois-Guyon qui, devant son rapide essor, s’établit sur une terre voisine, nommée la Roche, au bord de la plaine du Mesnil-Saint-Denis, où elle construit une église. La vie se régularise bientôt : on rencontre la première mention de l’abbaye de Notre-Dame de la Roche dans un acte de 1233 et, en 1237, une bulle du pape Grégoire IX, le seul document de la chancellerie pontificale conservé dans le cartulaire, la prend sous sa protection.

De fait, en 1226, les frères reçoivent pour la première fois le titre de chanoines. Il est probable que c’est vers cette date qu’ils quittent le mode de vie érémitique qui avait présidé à leur fondation, qu’ils décident de suivre la règle des chanoines réguliers de Saint-Augustin et qu’ils reconnaissent dans un premier temps l’obédience de l’abbaye de Livry, fille de Saint-Victor de Paris, avant de se ranger sous l’obédience directe de l’abbaye parisienne. L’abbé est alors généralement un victorin, dont le premier est Gilbert en 1232. La communauté se compose d’une douzaine de chanoines.

Leur principal bienfaiteur, Guy de Lévis, meurt en 1233, non sans doter richement l’abbaye, et s’y fait inhumer. C’est ainsi que l’église de la Roche devient le lieu de sépulture des Lévis. La libéralité des fondateurs et de leur réseau de parents et amis permet à l’abbaye de se construire une église relativement somptueuse (vestiges de peintures murales, belles stalles), qui accueille de nombreux pèlerins venus en l’honneur de la statue miraculeuse de la Vierge.

Au XIVe siècle, Notre-Dame de la Roche connaît un net déclin, tant dans le nombre de ses membres que dans la discipline ou la gestion de ses biens. Dans les années 1460, les visites pastorales de l’archidiaconé de Josas attestent d’un délabrement inquiétant (un abbé mais aucun religieux entre 1461 et 1470)1. Sous le règne de Charles VIII, les abbés deviennent commendataires, mais, dès le début du XVIe siècle, les évêques de Paris nomment les abbés et essaient d’introduire une réforme (abbatiat de Pierre de Bruges, ami de Jean Standonck). Le nombre de religieux reste cependant très faible : en 1524, l’évêque de Paris François Ponchet en dénombre deux. Pourtant, jusqu’à la Révolution, le pèlerinage en l’honneur de la statue de la Vierge demeure très fréquenté.

Sous l’Ancien Régime, l’abbaye est à plusieurs reprises contrainte d’aliéner une partie de ses biens et passe sous l’influence de la famille Habert, propriétaire du château de Mesnil-Habert, proche de la Roche, et principal acquéreur de la plupart des seigneuries environnantes, dont celle de Lévis. Les abbés commendataires sont choisis presque exclusivement en son sein de 1576 à 1695, puis parmi ses fidèles. En 1786, l’abbé de la Clue vend au roi le fief des Rouches, sur lequel subsistaient de nombreux droits du monastère tombés en déshérence.

À la Révolution, les dernières possessions sont vendues comme biens nationaux et, en 1809, la statue miraculeuse est transférée à l’église de Lévis-Saint-Nom. Vers 1850, la famille des Lévis-Mirepoix rachète et restaure l’abbaye qu’elle met à la disposition de l’orphelinat de l’Assomption d’Élancourt. Au milieu du XXe siècle, une école de jardiniers y est ouverte par des religieuses.

Les vestiges de l’abbaye ont été classés Monuments historiques en 1926 (http://www.culture.gouv.fr/documentation/merimee/accueil.htm).

Localisation du patrimoine à grands traits

Pour autant qu’il transparaisse des notations morcelées des chartes, le patrimoine s’est constitué par bribes et sans forte unité aux alentours de l’abbaye, au sud-ouest de Paris, avec une pointe dans le diocèse de Chartres.

Réseaux de bienfaiteurs

La piété des seigneurs voisins procure de nombreux biens et dîmes aux frères de la Roche. Leur maison bénéficie en tout premier lieu de la protection de la famille de ses fondateurs, les seigneurs de Lévis, mais aussi d’autres membres de la noblesse locale, comme les seigneurs de Chevreuse et de Marly, et les Montfort, notamment le connétable de France Amaury, à son retour de Languedoc.


1 Cette source, inconnue de l’éditeur, est abondamment citée dans la recension de l’édition parue dans Bibliothèque de l’École des chartes, 1863, p. 334-340, qui pour le reste la résume. Elle a été depuis lors publiée (Abbé J.-M. Alliot, Visites archidiaconales de Josas, Paris, 1902).