École des chartes » ELEC » Le formulaire d'Odart de Morchesne » Chappitre de diverses lettres diffuses » Autre lettre plus expresse pour greigneurs delitz
[fol. 117v]

Autre lettre plus expresse pour greigneurs delitz

Charles etc., au bailly de Sens et d'Aucerre ou a son lieutenant, salut. De la partie de nostre amé veneur Philipot Raffo1, escuier, nous a esté exposé en griefment complaingnant que, ja soit ce qu'il soit notoirement en nostre protection et sauvegarde, tant a cause de nostre service comme autrement deuement, et qu'il ne loise a aucun de faire larrecin ne violence a autruy, neantmoins ou mois de N. derrain passé N. N., acompaignez d'autres leurs complices, armés d'espees, auberjons et autres armes invasibles et defendues, se sont transportez de nuit en la garenne dudit exposant, ont prins ses counilsa 2, ses paons et autres biens et, pour ce que son garennier s'efforça de le leur empescher, l'ont batu et villené inhumainement etb, non contens de ce, firent encores tele chose et tele et, en procedant de mal en piz, se transporterent a l'ostel dudit exposant pour le tuer et murdrir, s'ilz l'eussent trouvé, y [fol. 118] rompirent coffres, huys et fenestres, emporterent vaisselle d'argent, robes, linges et autres biens meubles en l'estimacion de mil escuz et firent autres maulx et dommages en enfraingnant nostre sauvegarde, en commettant larrecin publique, port d'armes, invasion et autrement delinquant en grant esclande et lesion de justice et ou dommage et prejudice dudit exposant, et plus seroit se par nous n'estoit sur ce pourveu de remede convenable, si comme il dit, requerant icelui. Pour quoy nous, consideré ce que dit est, qui ne voulons telz malefices demourer impuniz, ainçoiz bonne justice en estre faicte telement que ce soit exemple a tous autres, vous mandons et, pour ce que lesdiz cas ont esté perpetrez en vostre bailliage, comme l'en dit, et que de l'infraction de nostre sauvegarde et aussi du port d'armes la congnoissance appartient a noz juges et officiers, mesmement que par devant vous la verité de ceste chose pourra plus tost estre attainte et la punicion en estre faicte que autre part, toutes faveurs rejectees, commettons que de et sur les choses dessusdictes, leurs circonstances et deppendences et autres, se mestier est, qui baillees vous seront par declaracion, vous vous informez ou faites informer bien et deuement et tous ceulx que par informacion, fame publique ou vehemente presumpcion vous en trouverez coulpables ou souspeçonnez prenez ou faites prendre au corps quelque part que trouvez pourront estre en nostre royaume, hors lieu saint, et les admenez ou faites admener soubz seure garde en noz principales prisons dudit bailliage pour fournir a droit sur ce que dit est et en recevoir tele punicion comme au cas appartendra ; et neantmoins prenez ou faites prendre en nostre main par bon inventoire tous leurs biens meubles et immeubles et soubz icelle les faites gouverner et tenir jusques a ce que par vous en soit ordonné ; et, ou cas que lesdiz malfaicteurs ou autres d'eulx se absenteroient ou latiteroient3, adjournez les ou faites adjourner a leurs personnes, se trouvez peuent estre, sinon a leurs hostelz et domicilles, s'aucuns en ont en nostredit royaume et on peut y avoir seur accés, ou es lieux ou ilz ont acoustumé de converser et repairer et ou lesdiz malefices ont eté perpetrez, a yssue de grant messe, a jour ferié, a son de trompe, par cry publique, es principaulx sieges et auditoires dudit bailliage et autrement, comme il est acoustumé de faire en tel cas, a comparoir personnelment par devant vous a trois briefz jours, sur peine de [fol. 118v] bannissement et d'estre attains et convaincus desdiz cas, pour respondre a nostre procureur a telz fins qu'il vouldra eslire et audit exposant et a chascun d'eulx sur ce que dit est et les deppendences proceder et aler avant en oultre selon raison, en administrant aux parties, icelles oÿes, bon et brief droit. Car ainsi nous plaist il et voulons estre fait. Non obstans quelzconques lettres surreptices empetrees ou a empetrer a ce contraires. Mandons et commandons a tous noz justiciers, officiers et subgetz que a vous et a voz commis et depputez en ce faisant obeïssent et entendent diligemment et vous prestent et donnent conseil, confort, aide et prisons, se mestier est et requis en sont. Donné etc.


a coulnis ms ; la correction est confirmée par P, qui donne connins.
b et est ensuite répété par erreur, sous la forme du signe tironien.
1 Même suppliant que dans la formule [11.32], où son nom est écrit Raso (voir annotation à la formule).
2 Connils, counils, sorte de lapins de garenne (Godefroy, t. II, p. 241).
3 Décalque direct du latin latitare, se cacher, fuir la justice (cf. Godefroy, t. IV, p. 737).