École des chartes » ELEC » Le formulaire d'Odart de Morchesne » Commissions en simple queue » Commission a demander empruntz
[fol. 126]

Commission a demander empruntz1

Charles etc., a noz amez et feaulx conseillers Telz et Telz, salut et dilection. Comme pour aucunes consideracions etc., pour ce est il que nous, qui desirons sur toutes choses mondaines, ainsi que plus que nul autre y sommes tenuz et obligiez, conserver et defendre nostre seigneurie et preserver noz bons et loyaulx subgetz de cheoir en la servitute de nosdiz ennemis, considerans comme dessus que de noz finances ordinaires n'y pourrions de present sanz aucun aide ou avancement d'autruy si hastivement et vallablement pourveoir comme le cas le requiert, et qu'il est mieulx raison et chose convenable que, aprés l'exposicion de nosdictes finances que n'y avons jamais voulu ne voulons en riens espargnier mais comme raison est les y mettre avant et du tout employer, les vassaulx et subgetz de nosdiza païs qui ont faculté et puissance et ausquelz la chose peut beaucoupb touchier aident aucunement a supporter lesdictes charges que autres qui pour leur mesmes fait ont assez a faire a souffrir d'autre part2, mesmement que l'aide que en ce nous feront ne sera que un simple prest a le recouvrer seurement et en brief temps, et confians a plain de voz discrecions, loyaultez et bonne prudence, vous ou les deux de vous en l'absence de l'autre pour les causes dessusdictes et pour pourveoir plus promptement au paiement desdictes gens d'armes et de trait, afin de les emploier a la defense desdiz païs et eviterc les pilleries et gastemens de biens que autrement pourroient faire sur les subgetz d'iceulx, avons commis, ordonnez et depputez et par ces presentes commettons, ordonnons et depputons pour requerir tant par voye amiable que aussi de [fol. 126v] sommacion, se mestier est, a toutes les personnes de telz païs escriptes et denommees en certain roolle de la date du jour d'uy, signé de nostre main et seellé de nostre seel secret, que pour ce vous avons baillié, qu'ilz nous prestent et aident les sommes de deniers contenues oudit roole, chascun selon la declaracion ou specificacion d'icelui roole, pour iceulx deniers convertir et employer par vostre ordonnance ou fait dessusdit et non ailleurs. Lesquelz deniers par eulx ainsi bailliez et prestez, par rapportant etc. voz lettres de mandement avecques la cedule ou certifficacion de celui qui les aura receuz et que commis y avons de quoy faire et de lui tauxer gaiges et voiages de chevaucheurs et autres mises et despens neccessaires et convenables pour les choses dessusdictes et les deppendences d'icelles competensd vous donnons puissance et auctorité, nous avons ordonné et voulons leur estre renduz et restituez de l'argent de certain aide et X me3 que par noz autres lettres du jour d'uy avons pour ceste cause ordonnez estre miz suz esdiz païs ou des deniers des monnoyes et autres noz finances a tel temps et terme comme par vous sera advisié et appoinctié avecques eulx et lesquelles monnoyes et finances voulons et consentons par vous obligees et ypothequees. Et des maintenant pour lors mandons et enjoingnons par ces presentes tant aux receveurs ou autres qui par vous seront commis a recevoir lesdiz aide ou X me que aux maistres particuliers desdictes monnoyes que tout ce que par vosdictes lettres leur sera sur ce ordonné ilz facent et acomplissent, toutes autres charges arriere mises, non obstans que sur ce n'aient autres lettres ou mandemens des commissaires et gouverneurs des finances. Et ou cas que aucuns des denommez oudit roole seroient refusans ou contredisans de prester lesdictes sommes sur eulx imposees, nous, pour l'urgent et eminent neccessité qui en est, voulons que a ce les contraingnez ou faites contraindre par la prinse et detencion de leurs biens et temporelz et plus avant s'il vous semble qu'il soit besoing et qu'il est acoustumé de faire pour noz propres debtes. De ce faire vous donnons povoir, auctorité et mandement especial ; et mandons a tous noz justiciers, officiers et subgetz que a vous et a voz commis en ces choses faisant et executant vous obeïssent et entendent et vous prestent conseil, confort et aide, se besoing en avez et par [fol. 127] vouse en sont requis. Car ainsi nous plaist il et l'avons ordonné estre fait, non obstans quelzconques opposicions, appellacions ou contradicions au contraire. Et par rapportant ces presentes ou vidimus d'icelles soubz seel autentique avec vostre mandement et quittance d'iceulx qui auront eu lesdictes sommes desdiz aides ou monnoyes, icelles sommes seront allouees es comptes et rabatues de la recepte desdiz receveurs et maistres desdictes monnoyes et chascun d'eulx qui paié les aura par noz amez etc. et autres qu'il appartendra. Ausquelz etc. Non obstans que lesdiz receveurs et maistres desdictes monnoyes n'aient sur ce autre mandement des generaulx, conseillers, commissaires ou autres gouverneurs de noz finances. Donné etc.


a suivi dans ms de vassaulx, rayé.
b beaucop ms.
c entre ms, corrigé d'après MPS et le formulaire fr. 5271.
d compet- ms, développé d'après M.
e précédé dans ms de et par, répété par erreur en haut de la nouvelle page.
1 La formule de Morchesne a une tradition intéressante, car l'acte-source a inspiré le compilateur d'un autre formulaire du règne de Charles VII (fr. 5271, fol. 141-v, cité par Du Fresne, t. I, p. 406, n. 9), dont le texte est si proche de celui de Morchesne qu'il exclut le recours à une source différente, même dans un champ rédactionnel très stéréotypé, mais qui permet aussi de le corriger à l'occasion, et qui a moins dépersonnalisé la formule, puisqu'il a conservé les noms des conseillers commis à demander l'emprunt : Denis du Moulin, maître des requêtes de l'hôtel du roi (il deviendra archevêque de Toulouse en 1423) ; Bertrand Campion, maître d'hôtel ; Jean Le Vavasseur. La comparaison entre les deux versions montre aussi que Morchesne (ou le rédacteur d'un acte qui serait ensuite passé à Morchesne ?) a modifié la nature de l'acte, intitulé au nom de Charles dauphin-régent dans l'acte-source et dans le formulaire fr. 5271, et devenu ici acte de Charles VII roi. Très conséquemment, Morchesne a supprimé dans l'exposé la référence faite à Charles VI, (nous) en l'absence et empeschement de mond. seigneur de France (desirans…).
2 Nous proposons de construire cette phrase complexe comme suit : “considérant, comme dessus, que nous n'y pourrions pourvoir avec nos [seules] finances ordinaires, sans aide ou avance d'autrui, aussi vite et valablement que le cas le requiert ; considérant qu'il est plus conforme à la raison et plus convenable que (après que nous avons mis en jeu nosdites finances — que jamais nous n'avons voulu ni ne voulons épargner, mais que nous voulons, comme raison est, mettre en avant et employer totalement) les vassaux et sujets de nosdits pays, qui ont faculté et puissance, et qui sont très impliqués dans l'affaire, aident à supporter lesdites charges [plutôt] que [ce ne soient] les autres, qui pour leur même fait ont assez à souffrir par ailleurs (…)”.
3 La leçon du ms est confirmée par plusieurs autres témoins : par M (Xe ), par S (dixiesme), et aussi par une mécompréhension du formulaire fr. 5271 (disme). C'est donc par erreur que P donne aide IXme . Le dixieme était souvent l'autre nom de la décime (Rey, Le domaine du roi, p. 228), imposée par le roi sur les revenus des bénéfices ecclésiastiques.