École des chartes » ELEC » Le formulaire d'Odart de Morchesne » Chartres et remissions et autres lettres en laz de soye » Don de nouveaulx privileges
[fol. 173]

Don de nouveaulx privileges

Charles etc. Savoir faisons a tous, presens et a venir, nous avoir receu l'umble supplicacion de noz bien amez les doyen et chappitre de l'eglise de Tours, contenant que, comme noz predecesseurs roys de France, ayans tres grant devocion a l'eglise de Tours, mere en chief de toute la province, et mesmement pour reverence de Dieu et des corps sains qui y reposent, ayent octroyé pluseurs beaulx privileges ausdiz supplians et a leurs officiers, et d'iceulx ayent tousjours joÿ et usé fors seulement deux de leurs officiers serviteurs nommez bastonniers, lesquelz on contraint a garder portes, faire guet de nuit et paier tailles et autres subsides, et pour ce que iceulx bastonniers du devoir de leur office sont abstrains et tenuz par serement estre chacun jour a matines, quant il y a double service, qui communement sont dictes de nuit et de jour, a la messe assistans prouchainement a l'autel au prestre celebrant, et aux autres affaires poursuir ce qu'il appartient a leur office, et quant on tient chappitre garder l'uis de chappitre, pour quoy ne pourroient vacquer a la garde des portes ne faire guet sanz prejudice de leur office du divin service de ladicte eglise, et mesmement qu'ilz ont a faire sonner les sains1 ou grant clochier et en ont la garde, et ilz sont tenuz a faire les messaiges et autres affaires de ladicte eglise, et comme principaulx messagiers portent en signe de ce tous temps chapperons de drap vermeil qui represente la fondacion de ladicte eglise, c'est assavoir des precieux martirs saint Maurice et ses compaignons, que, ces choses considerees et que pour lesdictes charges ne pourroient vacquer a faire leurdit office et servir ladicte eglise esdictes heures et que aussi [fol. 173v] leurs gaiges sont tres petiz, et mesmement que en pluseurs maindres esglises cathedralles et collegiales de nostre royaume les officiers semblables sont francs et exemps des charges dessusdictes et joÿssent des privileges des eglises ou ilz sont serviteurs, lesdiz supplians nous ont moult humblement supplié que, ce attendu et que depuis le trespassement de nostre tres chier seigneur et pere, cui Dieu pardoint, et que nous sommes parvenuz a la couronne nous n'avons point esté en ladicte eglise ne en la ville de Tours, ne donné ausdiz supplians aucuns nouveaulx privileges comme ont bien acoustumé de faire noz predecesseurs, nous, a nostre joyeulx advenement en ladicte eglise et ville de Tours2 et aussi en ensuivant les bonnes coustumes de nosdiz predecesseurs, il nous plaise lesdiz deux bastonniers affranchir et exempter de ce que dit est, afin mesmement qu'ilz puissent mieulx servir a l'eglise et, pour faulte de l'excercice de leur office, le service divima ne soit aucunement retardé, pour ce est il que nous, ces choses considerees, inclinans a la supplicacion desdiz supplians, voulans amplier les privileges et libertez de ladicte eglise, a ce que soyons participans des oroisons, aumosnes, messes, prieres, suffrages et autres biensfaiz qui en icelle sont faiz, desquelz nosdiz predecesseurs et nous sommes premiers et souverains fondeurs et chanoines, a iceulx supplians avons octroyé et octroyons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal par ces presentes que lesdiz deux bastonniers, leurs officiers, soient francs, quittes et exemps a tousjours mais de guetz, de gardes de portes et de tailles et semblablement de IIII es3, imposicions et de tous autres subsides quelzconques, au regart toutesvoyes des biens creuz en leurs heritaiges, et avec ce qu'ilz joÿssent des autres libertez, privileges et franchises que font et ont acoustumé de faire les gens des draps de ladicte eglise. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes a noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers les generaulx conseillers sur le fait et gouvernement de toutes nozb finances, au bailly des ressors et exempcions de Touraine, d'Anjou et du Maine et a tous noz autres justiciers et officiers ou a leurs lieuxtenans presens et a venir, et a chascun d'eulx si comme a lui appartendra, que de noz presentesc grace, exempcion, liberté et octroy facent, seuffrent et laissent lesdiz supplians et leursdiz deux bastonniers joïr et user plainement et paisiblement, sanz leur faire ne souffrir [fol. 174] estre fait aucun empeschement au contraire ores ou pour le temps a venir ; mais se aucuns de leurs biens sont ou estoient prins, saisiz, arrestez ou empeschiez pour cause ou occasion desdiz guetz, gardes de portes, tailles, aides ou autres subsides quelzconques, les leur mettez ou faites mettre tantost et sanz delay a plaine delivrance, veues ces presentes. Ausquelles afin que ce soit chose ferme et estable a tousjours, nous avons fait mettre nostre seel. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné a etc.


a sic ms, qui donne divin plus haut.
b noz corrigé en interligne au-dessus de toutes, répété par erreur puis rayé.
c presente ms.
1 Il ne s'agit pas d'une cacographie du ms, car le glissement par homophonie et fausse étymologie de sonner les seings (“cloches”, du lat. signa) à sonner les saints est bien attesté dès l'ancien français : Tobler-Lommatzsch, Altfranzösisches Wörterbuch, t. IX, Wiesbaden, 1973, col. 360-361.
2 Le 4 octobre 1423, Charles VII fit son entrée à Tours pour la première fois après son couronnement et il y séjourna deux mois. Le 8 novembre, il fut reçu comme roi à Saint-Martin où il prêta serment devant le chapitre (Du Fresne, t. II, p. 62). Le présent acte pourrait donc dater de novembre 1423.
3 Même leçon dans P. Ces quartes pourraient être un nom d'imposition (quatriemes, taxe sur le vin instituée par Charles V d'après Godefroy, t. VI, p. 490), mais la formulation reste un peu maladroite.