École des chartes » ELEC » Cartulaires d'Île-de-France » Saint-Martin-des-Champs » Tome 1 » V. — Actes concernant Saint-Martin-des-Champs prieuré de Cluny, sous le règne de Philippe Ier » 30 novembre 1089 — 1er janvier ou 21 avril 1090

Geofroi, évêque de Paris, concède à Saint-Martin quatre autels : Sevran et Noisy-le-Grand, du consentement de Hugues, comte de Dammartin, et de Guérin II et Milon III de Paris ; Champigny et Bobigny, du consentement des bénéficiers, l'archidiacre Josselin et le préchantre Galeran. Dreux de Mello, archidiacre de Paris, ayant dans son ressort Sevran et Bobigny ; Renaud de Chelles, archidiacre de Brie, ayant dans le sien Champigny et Noisy, donnent aussi leur assentiment

  • A Original perdu.
  • B Copie de 1129, Bibl. nat. de Fr., ms. lat. 10977, Liber Testamentorum, fol. 81.
  • C Copie du xiie s. (extrait sommaire), ib., fol. 62-65, nº 133.
  • a Marrier, Monasterii S. Martini... historia, p. 486.
  • b Recueil des chartes et documents de l’abbaye de Saint-Martin des Champs, monastère parisien, éd. Joseph Depoin, Ligugé, 1913-1921.
D'après b.

Divinis Scripturarum auctoritatibus informamur, frequentius autem Apostoli monitis, quasi quadam manu sollicitudinis excitamur, ut, dum tempus habemus, bonum ad omnes, maxime autem ad domesticos fidei, operemur et, peccata nostra elemosinis redimentes, amicos et receptores nobis in eterna tabernacula faciamus. Quisquis ergo se multis meminit deliquisse, studeat necesse est illis prodesse, quorum precibus in districto examine non est timendum in manus Dei viventis incidere. Talibus autem humilitas nostra placere non differat, et necessaria petentibus habundans misericordia manum benedictionis non retrahat. Ego igitur Gosfridus, gratia Dei Parisiorum episcopus, ante mentis oculos diem illum reducens, et periculum anime mee, hinc accusante conscientia, hinc non adeo defendente misericordia, metuens, monachis Cluniacensibus, apud Sanctum Martinum de Campis Deo servientibus, quatuor altaria et queque sunt ad ea pertinentia, donamus, nulloque nobis nostrisque successoribus in eis jure retento, preter synodum et circadam et ecclesiarum reconciliationem, curamque animarum parrochiano presbitero a nobis concessam, perpetuo jure possidenda concedimus : unum videlicet in villa que dicitur Cevrannus97, aliud apud villam Nociacum12, annuentibus comite Domnimartini Hugone10 et Guarino, Milonis filio, et Milone Guarini : hec enim duo altaria supradictus comes ex nostro, Guarinus vero ex comitis possedit beneficio. Terciumque in villa que vocatur Campiniacus25, quartum in ea que nuncupatur Balbiniacus102 annuentibus Joscelino archidiacono et Gualeranno cantore, quorum illud Campiniaci Joscelinus ex nostro, illud autem Balbiniaci Gualerannus habuit benefitio. Hoc etiam libenti animo concesserunt Drogo et Rainaldus archidiaconi ; in Drogonis enim archidiaconatu illa duo qui sunt Cevranni et Balbiniaci, in Rainaldi vero ea que sunt Campiniaci et Nociaci consistunt altaria. Ut autem hoc donum stabile inconvulsumque permaneat, cartam istam fieri precepimus, manuque propria firmavimus, manibusque canonicorum nostrorum firmandam tradidimus, nostroque sigillo subtersignavimus. Actum Parisius, in capitulo Sancte Marie , Goffrido vero Parisiensi episcopo xxx, indictione quoque xii. S. Goiffredi, Parisiorum18 episcopi. S. Johannis decani. S. Gualeranni precentoris. S. Drogonis archidiaconi. S. Joscelini archidiaconi. S. Rainaldi archidiaconi. S. Gualteri canonici et episcopi Meldensis. S. Fulconis sacerdotis. S. Goderanni sacerdotis. S. Rogerii sacerdotis. S. Bernardi levite. S. Haimonis levite. S. Arnulfi levite. S. Alberici levite. S. Odonis subdiaconi. S. Thevini subdiaconi. S. Isembardi subdiaconi. S. Widonis pueri. S. Guilelmi pueri. S. Gauteri pueri. S. Hugonis pueri.

Wlgrinus cancellarius scripsita.


97 En marge : Cevran et Montceleux. Montceleux est une ferme sur le terroir de Sevran, ca. Gonesse, ar. Pontoise.

10 Hugues, comte de Dammartin, que nous rencontrerons plusieurs fois comme témoin de chartes postérieures, avait pour père Manassé, comte de Dammartin, frère de Haudouin III, comte de Ramerupt. Conseiller intime et probablement chambrier (noster a secretis) du roi Robert en 1031 (Bouquet, Rec. des Hist. de France, X, 626), Manassé périt auprès de Bar-le-Duc, dans la même journée où fut tué Eudes II, comte de Chartres (Hugues de Flavigny, Chron., ap. Mon. Germ. hist., Scriptores, VIII, 401 c'est-à-dire le 15 novembre 1037 (Aug. Longnon, Obituaires de la province de Sens, t. II, préface, p. viii). Sa veuve fit de grandes libéralités à St-Vanne de Verdun où les victimes du combat furent ensevelies (Vita S. Richardi abbatis Virdan., ap. M. G. h., Scriptores, XI, 288). Elle se nommait Constance ; c'était sûrement une fille de Robert le Pieux et de sa dernière femme ; filiation qui motive l'attribution des prénoms robertiens d'Eudes et de Hugues aux fils issus de son union avec Manassé (Guérard, Cartul. de St-Père de Chartres, p. 175). Eudes, omis par l'Art de vérifier les Dates, bien que cité avec son titre dans un diplôme de 1060, mourut peu après sans postérité mâle. Il laissa le comté de Dammartin à son frère cadet Hugues, précédemment établi à Bulles (Hugo Buglensis comes, titre que lui donne Ives de Chartres, éd. Bouquet, Rec. des Hist. de France, XV, 242), qui lui venait de sa femme Rohais. Au cours d'une grave maladie en 1075, il restitua à St-Lucien de Beauvais les églises de Bulles (Louvet, Hist. du Beauvoisis, I, 630-634) ; les chanoines qui les occupaient protestèrent devant le concile d'Issoudun en 1081 (Achery, Spicileg., III, 128). Revenu à la santé, Hugues partit en Terre-Sainte pour accomplir un vœu ; il y fut fait prisonnier, et sa rançon ayant été fournie par les Bénédictins du Bois-Saint-Michel, dépendant de Vezelay, il fonda à son retour le prieuré clunisien de St-Leu d'Esserent (Louvet, I, 645 ; cf. Mém. de la Soc. acad. de l'Oise, X, 493) en 1081 (Chan. Eug. Müller, Cartulaire de St-Leu d'Esserent, pp. 1-6) auquel l'abbé de Cluny réunit St-Michel dont les moines se transportèrent à St-Leu (p. 11).

Hugues avait causé des inquiétudes à Philippe Ier, qui fortifia Montmélian, aux frontières du Senlisois, pour se protéger contre ses atteintes (Rec. des Hist. de France, XI, 158, 410 ; XII, 135). Il finit ses jours sous la bure, à St-Leu d'Esserent (Müller, p. 17). Dès 1103, il était remplacé par Pierre, son fils (Cartulaire A de Montier-en-Der, coll. Baluze, XXXIX, fol. 239'). Celui-ci tomba malade à Rosnay en Champagne, d'où était originaire sa femme Eustachie (Müller, p. 16). Il y mourut un 13 septembre, en 1105 ou 1106 (Obit. de la prov. de Sens, I, 456) ; il fut inhumé à St-Leu d'Esserent où les moines qu'il avait appelés à ses derniers moments, ramenèrent son corps au prix de mille peines. Il y reposa près de son père et d'un frère aîné mort jeune (avant 1081). Il laissait d'Eustachie un fils qui lui succéda, certainement Hugues II qui dès lors exerçait les fonctions comtales. L'Art de vér. les Dates (II, 661) le fait à tort frère de Pierre. Les actes de Hugues Ier ne lui attribuent, sur la fin de sa vie, qu'un seul fils et trois filles ; Basle, Aélis, Eustachie (nom porté déjà par une tante, issue du comte Manassé, et dont une fille, Agnès, épousa Guillaume vicomte de Mantes). Mariée d'abord à Aubri Payen de Mello, Aélis se remaria à Lancelin II de Beauvais, qui après 1111, succéda à Hugues II. Lancelin eut d'elle quatre enfants, dont deux, Manassé et Rohais, relevèrent des prénoms de l'ascendance maternelle. Mais Dammartin passa à Aubri Ier, que par son prénom l'on peut croire issu de la première union d'Aélis ; Lancelin n'aurait été que son mainbour : on ne s'explique pas autrement, d'ailleurs, que la nombreuse postérité de ce sénéchal ait pu être exclue du comté dont il avait été titulaire.

25 La paroisse de Champigny-sur-Marne (ca. Nogent-sur-Marne, ar. Sceaux) était du diocèse de Sens, archidiaconé de Gâtinais. Josselin se ravisa et donna plus tard l'autel de Champigny à St-Martin. L'évêque Geofroi de Boulogne qui inspira cet arrangement, l'approuva en 1089.
102 Bobigny, ca. Noisy-le-Sec, ar. Saint-Denis (Seine).
18 Cette pièce a échappé aux auteurs de la Gallia christiana nova, qui font commencer l'épiscopat d'Imbert « circà annum 1030 ». Puisque, en novembre 1060, il était dans sa 33e année d'épiscopat, il a été intronisé avant le 29 novembre 1028 ; or son prédécesseur Francon, cité dans un titre de 1028, étant mort le 24 juillet, il faut placer l'avènement d'Imbert entre le 25 juillet et le 29 novembre 1028 (Cf. Gallia, VII, 47-49, et D. Bouquet, Rec. des Hist. de France, X, 619). Imbert mourut le 22 novembre 1060, peu de jours après avoir donné cette charte, qui fut probablement écrite à l'occasion de la fête de St-Martin d'hiver, le 11 novembre. Geofroi de Boulogne, successeur d'Imbert, mourut le 1er mai 1095. (Depoin, Essai sur la chronologie des évêques de Paris de 778 à 1138, p. 23 ; tir. à p. du Bulletin historique et philologique, 1906, p. 236).
a L'épiscopat de Geofroi a commencé après la mort d'Imbert (22 novembre 1060). Sa 30e année court du 22 novembre 1089 au plus tôt. L'année 1090 commença suivant le style de Pâques, le 21 avril. L'indiction 12 donne 1089/1090. Il n'est pas possible de faire cadrer la période du 22 novembre 1089 au 21 avril 1090 avec la 31e année de Philippe Ier, si l'on prend le point de départ de son règne à la mort de Henri Ier (4 août 1060). Il faut remonter à son sacre (23 mai 1059) ; dès lors les notes chronologiques concordent. Cependant il subsiste dans cet acte certaines difficultés d'un autre ordre. Haimon y est encore indiqué comme diacre, tandis qu'une charte de 1088 le montre promu au sacerdoce, et cette charte n'a point d'erreur de date, car on y rencontre Ives Ier de Mello, archidiacre avant Renaud de Chelles, qui est ici en charge. La date funèbre du doyen Jean de Grandpont serait aussi à modifier.