École des chartes » ELEC » Cartulaires d'Île-de-France » Saint-Martin-des-Champs » Tome 2 » XI. — Actes concernant Saint-Martin-des-Champs sous le règne de Louis VII (1137-1180) » 1141 — automne 1143

Eudes Percebot III, petit-fils d'Eudes Percebot Ier, revendique une terre à Barbery que son aïeul avait possédée et qu'ensuite dame Agnès et son mari Jean donnèrent à St-Nicolas d'Acy. La reine-douairière Adèle (Adélaïde) et son second mari Mathieu (de Montmorency) en qualité de suzerains (Adèle étant dame de Barbery) négocient une transaction : Eudes reçoit des moines vingt livres et un muid de froment, sa femme vingt sous, plus une rente de quatre muids de grain. Parmi les témoins : Thibaud II, prieur, et Pierre, sous-prieur de Saint-Martin ; Aimar II, prieur de Saint-Leu d'Esserent ; Gautier Torel, prieur de Saint-Nicolas ; Pierre, prieur de Saint-Adrien ; le vidame Ives de Senlis, Pierre de Gonesse et son fils Thibaud ; Evroin et Boniface, clercs de la Reine.

  • A Original scellé, jadis aux Archives Saint-Nicolas, nº 13.
  • B Copie de 1209, Arch. nat., LL 1351, fol. 119', non collationnée.
  • C Copie du xve s., Arch. nat., LL 1352, fol. 132.
  • D Copie du xvie s., Arch. nat., LL 1353, fol 155'.
  • E Copie du xviiie s., par Afforty, t. XIII, p. 898, d'après A, dont il décrit le sceau en ces termes : « Scellé en oval en cire blanche brunée : Une femme debout, un voile sur la tête, son bras droit tendu, la main ouverte, avec une longue manche. Un pan de sa robe retroussé sur son bras gauche ; une fleur de lis à la main. SIGILLUM ADELAIDIS. »
  • F Copie du xviiie s., Coll. Moreau, t. LIX, fol. 88.
  • a Duchesne, Hist. de la maison de Montmorency, Preuves, p. 43' (d'après A, et pourtant incomplet de toute la partie du texte mise entre crochet).
  • b Recueil des chartes et documents de l’abbaye de Saint-Martin des Champs, monastère parisien, éd. Joseph Depoin, Ligugé, 1913-1921.
D'après b.

Notum sit presentibus et futuris quod Ecclesia Beati Nicolai Silvanectensis tenebat per elemosinam Domine Agnetis et mariti illius nomine Johannis, apud villam que dicitur Barberi10, quamdam culturam et terram que fuit Odonis qui dictus est Percebot, quam calumpniatus est Odo qui ipse dicebatur Percebot, nepos predicti Odonis7 et usque adeo Ecclesiam Beati Nicolai pro eadem terra persecutus est, quod excommunicatinem incurrit. Ad ultimum, tam ipse quam monachi prefate ecclesie in presentia Domine Adele regine et Domini Mathei mariti ejus, sub quorum dominio tunc temporis terra illa erat195, convenerunt et isto fine firmissimam concordiam inierunt. Monachi dederunt predicto Odoni viginti libras et unum modium frumenti, et uxori illius viginti solidos. Concesserunt iidem Odoni insuper singulis annis quatuor modios annone que crescit in prefata terra ad modium Silvanectensem, duos videlicet modios ivernagii et duos modios avene qui debent solvi, et ipse Odo vel ad Sanctum Nicholaum vel ad Barberi veniet eos querere. Ipse autem totam prefatam culturam et terram libere et absolute monachis possidendam, vel quidquid de ea facere vellent concessit et adversus omnes calumpnias se eam monachis patrocinaturum promisit, et per fidem suam hanc conventionem se tenere pepigit ; Regina vero et Dominus Matheus hujus pactionis pro eodem Odone erga monachos obsides fuerunt et sui sigilli impressione hanc conventionem confirmaverunt. Hujus rei testes sunt : De monachis, Theobaldus prior Sti Martini, Petrus subprior ; Haimardus, prior Sti Lupi, Walterius, prior Sti Nicholai196 ; de clericis, Petrus, prior Sti Adriani, Ebroinus et Bonifacius, clerici Regine. [De laicis, Radulphus de Chirodono, Rainoldus Cocus, et Robertus, frater ejus ; Richardus castellanus et Johannes, frater ejus, Paganus, ejus sororius ; Bernardus Torchardus, Petrus Separatus, Josco de Fonte Sancti Firmini165, et Fridericus ejus filius ; Martinus, sororius ejus ; Radulphus, major de Esviliaco ; Fulco de Asci, Wasco, Robertus. Uxor vero ipsius Odonis, tempore hujus pactionis, de puerperio jacebat197. Propterea, cum ad Sanctum Nicholaum venisset, hoc pactum concessit coram testibus his subnotatis. Ex parte sui : Herberto de Insula, Rainaldo filio Warnerii clerici, Guidone Parvo, Garnerio filio Radulfi, Pagano, patre Herberti. Ex parte monachorum : Ivone, vicedomino198, Petro de Gonessa et Theobaldo filio ejus199, Malenutrito (?), Adam deffosse, Gilone filio Radulfi, Friderico, Roberto Coco]200.


10 Barbery, ca. et ar. Senlis.
7 Eudes Percebot paraît en 1104 à la cour de Louis VI comme un de ses familiers (Cf. Luchaire, Annales de la vie de Louis VI, nos 28 et 33, pp. 17, 21). Son surnom se traduisait, dès 1082-1089, Pertusiens-Utrem (nº36). La forme romane Odo Percebut se lit dans une charte de 1102 (note 91 suprà, t. I, p. 65). La bote, d'où vient le diminutif latin buticula (italien bottiglia, espagnol botella), est originairement un recipient de cuir pour mettre le vin qu'on emportait avec soin en voyageant à cheval. L'équivalence bote-outre est, par ces textes des xie et xiie siècles, bien établie. Les deux Eudes Percebot, père et fils, inhumés à St-Nicolas d'Acy antérieurement à 1132-1133, laissèrent pour successeur Eudes Percebot III, mari d'Eudeline. Ces époux, en 1140, restituèrent à St-Symphorien les églises de Pont-Saint-Maxence et St-Gervais en Beauvaisis, usurpées par eux (Coll. Moreau, LVIII, 197).
195 L'intervention de la reine douairière, Adélaïde de Maurienne, veuve de Louis le Gros, remariée on 1141 à Mathieu Ier de Montmorency (Art de vérifier les dates, II, 646), s'explique par le fait que le domaine de Barbery fut compris dans sa dot. Elle en disposa en faveur de l'abbaye de Montmartre, ce que Louis VII confirma par un diplôme de février-mars 1155. Cette approbation royale était indispensable pour une aliénation du domaine de la Couronne concédé en douaire ; elle fut accordée en 1146 pour le moulin de Barbery ; mais un jugement de la Cour, en 1155, ordonna la restitution par Pierre le Queux d'une terre que la reine avait en sa faveur démembrée du même domaine, de son propre chef ; en 1156 un autre concessionnaire d'une portion de ce domaine, Guillaume le Normand, fut autorisé à l'engager à l'abbaye de Montmartre, sous la réserve qu'il ne pourrait le vendre qu'aux religieuses de ce monastère, devenues dames de Barbery (Luchaire, Actes de Louis VII, nos 172, 341, 360, 376, pp. 154, 209, 216, 221).
196 Le premier prieur de St-Nicolas d'Acy, suivant la Gallia christiana, se nommait Gautier et mourut peu avant 1138. A cette date et en 1139 on rencontre le prieur Pierre Ier (nº245 et 249). Le prieur Gautier II, qui souscrit ici, est vraisemblablement celui dont le Nécrologe d'Acy note le décès au 1er mai : « Kal. Maii, obiit Galterius Torel, prior hujus loci. » Le surnom n'est ordinairement donné qu'en cas de succession immédiate ou très rapprochée de deux homonymes, pour différencier le second. Le sous-prieur des Champs, Pierre, remplaça Gautier II Torel peu de temps après que cette charte fut écrite, et ce Prieur Pierre II vécut jusqu'au 24 septembre 1163. Le Nécrologe de Notre-Dame de Senlis note ainsi son obit : « VIII kal. Octobris. Obiit vir religiosus domnus Petrus, prior Sti Nicolai de Aciaco super Onetam (la Nonette) qui dedit nobis xx solidos parisienses ». (Vallier, Notes historiques sur le prieuré de St-Nicolas d'Acy, dans les pub. du Comité archéologique de Senlis, 1886).
165 Avilly, com. de St-Léonard, ca. Senlis, était dès 1106 une propriété de St-Nicolas-d'Acy (t. I, p. 181). — Fontaine-Saint-Firmin, aujourd'hui Saint-Firmin, ca. Senlis, lui fut donné entre 1106 et 1124 (t. I, p. 279).
197 La femme d'Eudes Percebot III, qui n'est point désignée nominalement, s'appelait Eudeline, comme le prouve un acte de 1140, cité plus haut, p. 8, note 7.
198 Ives, vidame de Senlis, se rattache apparemment à Gui de Raray, qui occupait cette charge en 1106. Les prénoms d'Ives et de Gui se juxtaposent chez maintes lignées féodales de ce temps, dans l'Ile-de-France, la Picardie, l'Anjou.
199 Pierre Ier de Gonesse, fils d'Eudes Ier et petit-fils d'Eudiarde, bienfaitrice de St-Martin-des-Champs, eut pour fils Thibaud Ier. Cette famille de chevaliers se ramifia beaucoup au xiiie siècle.
200 La date de cet acte se place entre le convol de la reine-douairière (cf. note 195) et l'élection du prieur Thibaud II comme évêque de Paris.